Il y a 108 ans, un épisode singulier marquait l’histoire des apparitions de Fátima et allait, paradoxalement, contribuer à leur notoriété mondiale. Ce matin-là, les trois jeunes voyants, Lucia dos Santos, âgée de 10 ans, et ses cousins Francisco et Jacinta Marto, de 9 et 7 ans, s’apprêtaient à quitter leur hameau d’Aljustrel pour se rendre à la Cova da Iria. Depuis le mois de mai, ils y affirmaient rencontrer « une Dame venue du ciel » le 13 de chaque mois. À mesure que la rumeur se répandait, la foule grossissait : en août, on attendait plusieurs milliers de pèlerins.
Le Portugal de 1917 vivait une période agitée. La Première République, instaurée en 1910, portait un projet farouchement laïc et anticlérical. Les autorités républicaines voyaient dans les manifestations religieuses populaires une menace pour leur programme politique. Dans cette atmosphère tendue, le canton d’Ourém était dirigé par Artur de Oliveira Santos, franc-maçon, républicain radical et ancien typographe. Convaincu que les apparitions étaient un stratagème du clergé pour manipuler les foules, il décida de mettre un terme à ce qu’il considérait comme une mystification.Au matin du 13 août, il se présenta chez Lucia, prétextant vouloir escorter les enfants à la Cova da Iria. Mais au lieu de prendre la direction des champs, il les emmena vers Vila Nova de Ourém, à une quinzaine de kilomètres. Arrivés à l’ancienne mairie, qui abritait aussi la prison, les enfants furent séparés de leurs familles. Selon la version populaire, ils furent enfermés dans une cellule avec d’autres détenus, prièrent le chapelet et subirent de terribles menaces, notamment celle d’être jetés dans une cuve d’huile bouillante s’ils ne révélaient pas le « secret » confié par la Dame. Des recherches historiques récentes nuancent ce récit : ils auraient plutôt été logés dans une pièce attenante au bureau de l’administrateur, bénéficiant parfois de la bienveillance de son épouse, tout en subissant de fortes pressions psychologiques pour livrer leurs confidences.
À la Cova da Iria, la foule s’impatientait. On raconte que, malgré l’absence des enfants, un phénomène lumineux se produisit : un éclair suivi d’un nuage blanc qui se déplaça jusqu’au chêne vert des apparitions. Pour beaucoup, ce signe confirmait la réalité du message. Les enfants, eux, restèrent détenus jusqu’au 15 août, fête de l’Assomption, avant d’être renvoyés chez eux. Quelques jours plus tard, le 19 août, alors qu’ils gardaient leurs moutons à Valinhos, la Vierge leur apparut de nouveau. Elle leur expliqua qu’elle n’avait pu venir le 13 en raison de l’intervention des autorités et leur demanda de continuer à réciter le rosaire chaque jour, promettant un grand miracle pour le mois d’octobre.
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Ce qui devait être un coup d’arrêt se transforma en accélérateur. L’épisode attira l’attention de tout le pays et renforça la détermination des fidèles. Les enfants devinrent, malgré eux, des figures de résistance spirituelle face aux pressions politiques. La prophétie d’un miracle attira en octobre plus de 70 000 personnes, venues assister à ce qui allait rester dans l’histoire comme le « miracle du soleil ».
⚡️🔔13 août 1917 : le jour où les enfants de Fátima furent enlevés par les autorités
— Tribune Chrétienne (@tribuchretienne) August 12, 2025
Ce coup de force des autorités anticléricales, loin d’étouffer la dévotion, allait au contraire enflammer le sanctuaire et le faire connaître dans le monde entier
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Aujourd’hui, le sanctuaire marial de Fátima est l’un des plus importants lieux de pèlerinage du monde. Il accueille chaque année plusieurs millions de visiteurs, venus de tous les continents pour prier, se recueillir ou accomplir un geste de pénitence, comme le célèbre chemin à genoux. La grande esplanade, bordée de basiliques, résonne chaque soir des prières et des chants des processions aux flambeaux. À la veille de l’Assomption, le sanctuaire se prépare à accueillir une foule immense, perpétuant la ferveur née il y a plus d’un siècle, quand trois enfants tinrent tête aux autorités pour garder le secret qu’ils croyaient confié par le ciel.