Par Anne-Marie Michel
Du 28 au 30 mars derniers, environ 500 prêtres missionnaires de la miséricorde étaient rassemblés à Rome dans le cadre de leur jubilé spécial en cette année de l’Espérance. Ils sont actuellement plus de 1200 à travers le monde.
Mandatés par le Saint Père en 2016, lors du Jubilé de la Miséricorde, ces prêtres ont pour mission particulière de confesser et d’absoudre les péchés jusque-là réservés à la Pénitencerie Apostolique. Au nombre de ces péchés figurent l’ordination non autorisée d’un évêque (concernant tant l’ordonnant que l’ordonné), la profanation de l’Eucharistie, la violation du secret de la confession, l’apostasie, l’hérésie, le schisme ou la conspiration ou violence contre le pape[1].
L’ancienne procédure auprès de la Pénitencerie pouvait être longue et la confidentialité éventuellement compromise. Désormais, grâce à ce service, le prêtre pénitent « reçoit le pardon de Dieu au for interne. Seul le confesseur le sait, et c’est tout », témoigne le père Omar Osiris, missionnaire de la miséricorde au Mexique et présent à Rome pour ce jubilé. Il ajoute :
« Le Pape est conscient que de nombreux prêtres ne vivent pas leur ministère de manière adéquate, et qu’avant de pouvoir être des instruments de miséricorde, ils doivent eux-mêmes en faire l’expérience. »
Le Saint Père leur a adressé un message depuis l’hôpital Gemelli où il fut longtemps hospitalisé : « J’aurais aimé vous rencontrer à l’occasion de votre pèlerinage jubilaire et vous exprimer personnellement, Missionnaires de la Miséricorde, ma gratitude et mes encouragements », reconnaît-il. « Par votre service vous témoignez du visage paternel de Dieu, infiniment grand dans l’amour, qui appelle chacun à la conversion et nous renouvelle toujours par son pardon », ajoute-t-il.
Ce ministère particulier du pardon trouve une place toute spéciale dans le cadre de l’année de l’Espérance. Le Saint Père précise que « la conversion et le pardon sont les deux caresses avec lesquelles le Seigneur essuie toute larme de nos yeux ; ce sont les mains avec lesquelles l’Église nous embrasse, nous pécheurs ; ce sont les pieds sur lesquels marcher dans notre pèlerinage terrestre. » Enfin, pour soutenir le ministère de ces prêtres, le Pape les encourage « à être attentifs dans l’écoute, prêts à accueillir et constants dans l’accompagnement de ceux qui souhaitent renouveler leur vie et revenir au Seigneur. »
Les missionnaires de la miséricorde reçoivent une formation spécifique en théologie, en droit canon, en matière de sacrement de réconciliation et de miséricorde. Le Père Osiris en a bénéficié et fut mandaté pour ce ministère en 2018. Avant de partir au Mexique, il a travaillé au Dicastère pour l’Évangélisation, en y coordonnant les activités d’autres missionnaires de par le monde.
Au Mexique, son apostolat de la miséricorde prend une importance toute spéciale en raison du contexte de violence extrême du crime organisé. « Il y a plus de 10 000 disparus. Aucune famille mexicaine ne peut vivre sans cela », précise-t-il. « Ceux qui s’approchent du sacrement de la réconciliation sont ceux qui ont vécu des violences », explique le père Osiris. Hélas, ceux qui commettent les atrocités ne s’approchent guère du sacrement de réconciliation. Il confesse « plutôt les victimes qui nourrissent du ressentiment, de l’amertume et de la haine envers leurs agresseurs. Nombreux sont ceux qui recherchent le sacrement parce qu’ils ne veulent plus vivre avec ces sentiments et aspirent à la libération que Dieu donne. »
La tâche est colossale pour les deux prêtres missionnaires de la miséricorde présents au Mexique. Deux lieux particuliers deviennent des lieux de miséricorde : la basilique Notre Dame de Guadalupe où les prêtres peuvent confesser jusqu’à douze heures d’affilée et les hôpitaux où le père Osiris reçoit les confessions de certains patients qui ne se sont pas confessés depuis des décennies.
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Certains d’entre eux partent vers le Père quelques minutes après avoir reçu le pardon… « C’est alors qu’on réalise à quel point elles avaient besoin de la miséricorde de Dieu pour pouvoir partir en paix », constate-t-il. Mais cela ne suffit pas au missionnaire : le père Osiris veut partir à la recherche des auteurs des violence, ceux précisément qui ne se confessent pas.
Certains prêtres distribuent des tracts dans les bus ou les stations de métro. Mais ils veulent aller encore plus loin : atteindre les prisons. Le défi est de taille, car les démarches bureaucratiques pour pénétrer les centres pénitenciers freinent considérablement leur mission.
Pour l’heure, le jubilé des 28-30 mars a permis aux 500 missionnaires présents à Rome de se ressourcer par des temps de prière, de formation, d’échange sur leurs expériences en divers points du monde et le franchissement de la Porte Sainte. En la basilique Sant’Andrea della Valle de Rome, le pro-préfet du Dicastère pour l’Évangélisation du Vatican, Mgr. Fisichella, a présidé une messe pour eux le 30 mars 2025. Dans son homélie, il les a encouragés à partir à la recherche de ceux qui sont éloignés de l’Église. « L’amour oublie le péché, et le pardon nous oblige à regarder directement vers l’avenir », a-t-il précisé.
[1] https://www.aciprensa.com/noticias/111933/misionero-de-la-misericordia-muchos-lloran-al-darse-cuenta-de-que-dios-siempre-perdona