C’est un collège cardinalice à l’image d’un monde en pleine mutation qui s’apprête à entrer en conclave. Le 7 mai prochain, 135 cardinaux électeurs issus de 71 pays se réuniront sous la fresque du Jugement dernier pour élire le successeur du pape François. Un chiffre record qui dépasse largement la limite de 120 électeurs fixée par la constitution Universi Dominici Gregis. Une dérogation accordée par le pape François en personne permet à tous de voter.Si l’Europe reste le continent le plus représenté, elle ne compte plus que 53 électeurs (39 % du total), contre 60 en 2013, soit un net recul. L’Italie conserve le groupe national le plus nombreux avec 17 cardinaux, mais en perd 11 par rapport au dernier conclave. À l’inverse, l’Asie et l’Océanie enregistrent une forte progression, passant de 11 à 27 électeurs. On y trouve notamment 4 Indiens, 3 Philippins, 2 Japonais, ainsi que des représentants de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, de la Malaisie ou encore de Tonga.
L’Afrique aussi voit son influence croître avec 18 électeurs, contre 11 en 2013. La Côte d’Ivoire est le seul pays africain à en compter deux. À travers ces nominations, le pontificat de François aura marqué une profonde réorientation géopolitique de l’Église : ce sont les périphéries, les jeunes Églises, qui prennent place au centre.Fait marquant : 15 pays seront représentés pour la première fois dans un conclave, dont le Cap-Vert, Haïti, le Luxembourg, Singapour, la République centrafricaine ou encore le Soudan. Autant de signes d’un élargissement des horizons de l’Église, où le catholicisme devient toujours plus universel dans sa gouvernance.
Sur les 135 électeurs, 109 sont des archevêques en fonction. Les cardinaux de la Curie sont en recul : 27 aujourd’hui, contre 38 en 2013. Cette tendance reflète la volonté de François de nommer à Rome des responsables issus du terrain, mais aussi d’ouvrir certains postes clés à des laïcs et des femmes consacrées — inéligibles au trône de Pierre, mais engagés dans la réforme.
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Un autre changement notable : la forte représentation des ordres religieux. Trente-trois cardinaux électeurs appartiennent à une congrégation, soit 15 de plus qu’en 2013
Les plus nombreux sont les salésiens (5), suivis des franciscains (4), jésuites (4), conventuels (3), mais aussi des dominicains, redemptoristes, lazaristes, verbites, un carme déchaux et un capucin. Ces hommes de mission, souvent appelés à servir loin de leur pays d’origine, incarnent une Église en sortie.Pas vraiment. L’âge moyen des électeurs est de 72 ans. Soixante-dix-sept cardinaux ont plus de 70 ans, et seulement 15 ont moins de 60 ans. Le benjamin, Mgr Mykola Bychok, a 45 ans et représente l’Église gréco-catholique ukrainienne en Australie. À titre de comparaison, Jean-Paul II avait 58 ans au moment de son élection en 1978, Benoît XVI 78 ans et François 76 ans.
Enfin, sur les 135 électeurs, 108 ont été créés cardinaux par François, 22 par Benoît XVI (qui vivront ainsi leur deuxième conclave) et 5 par Jean-Paul II, présents déjà en 2005 et 2013.Jamais l’Église n’aura été aussi diverse dans ses origines, ses cultures et ses accents. Si le Saint-Esprit est le seul maître du conclave, le collège qui se réunira ce 7 mai témoigne déjà d’une Église réellement universelle. Reste à savoir qui, parmi ces hommes de foi, de prière et de culture, sera appelé à porter le poids du Siège de Pierre.