Depuis 2000 ans

« Frères, sœurs, c’est l’heure de l’amour » : Léon XIV lance son pontificat sous le signe de l’unité, de la paix et de la mission

DR
DR
Devant 150 000 fidèles réunis place Saint-Pierre, le nouveau pape a appelé à bâtir une Église missionnaire, « fondée sur l’amour de Dieu et signe d’unité »

« Frères, sœurs, c’est l’heure de l’amour ! » Par ces mots vibrants, le pape Léon XIV a conclu son homélie de la messe d’inauguration de son pontificat, célébrée ce dimanche matin sur la place Saint-Pierre. Près de 150 000 fidèles étaient rassemblés, ainsi que plus de 150 délégations officielles venues du monde entier. La cérémonie marquait l’entrée solennelle dans le ministère du 267ᵉ successeur de Pierre, élu le 8 mai dernier.Dès les premières lignes de son homélie, le pape a choisi de se placer sous la lumière de saint Augustin : « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose pas en toi » (Confessions, I, 1, 1). Avec émotion, il est revenu sur la mort de son prédécesseur : « La mort du pape François a rempli notre cœur de tristesse. Dans ces heures difficiles, nous nous sommes sentis comme ces foules dont parle l’Évangile : des brebis sans pasteur. »

Mais, a-t-il poursuivi, « le jour de Pâques, nous avons reçu sa dernière bénédiction, et dans la lumière de la Résurrection, nous avons affronté ce moment avec la certitude que le Seigneur n’abandonne jamais son peuple, mais le rassemble quand il est dispersé et le garde comme un berger son troupeau. »Évoquant l’élection conclaviste, le pape a confié : « Arrivant d’horizons et d’histoires différents, nous avons placé dans les mains de Dieu le désir d’élire un pasteur capable de garder le riche patrimoine de la foi chrétienne et de regarder au loin, vers les défis d’aujourd’hui. » Et de conclure : « J’ai été choisi sans aucun mérite et, avec crainte et tremblement, je viens à vous comme un frère qui veut devenir le serviteur de votre foi et de votre joie, marchant avec vous sur le chemin de l’amour de Dieu, qui nous veut tous unis dans une seule famille. »

Au cœur de son homélie, Léon XIV a tracé les lignes fondamentales de son pontificat : « Construisons une Église fondée sur l’amour de Dieu et signe d’unité, une Église missionnaire, qui ouvre les bras au monde, qui annonce la Parole, qui se laisse interroger par l’histoire et qui devient levain de concorde pour l’humanité. »

Le souverain pontife a cité son prédécesseur Léon XIII, en s’appuyant sur l’encyclique Rerum Novarum : « Si ce critère prévalait dans le monde, tout dissensus cesserait-il aussitôt et la paix ne reviendrait-elle pas ? »Il a aussi insisté sur le style du successeur de Pierre : « À Pierre est confiée la mission d’aimer davantage et de donner sa vie pour le troupeau. […] L’autorité véritable de l’Église est la charité du Christ. » Et d’avertir : « Il ne s’agit jamais de captiver les autres par la domination, la propagande religieuse ou les moyens du pouvoir, mais toujours et seulement d’aimer comme Jésus l’a fait. »

Dans une critique claire de toute forme de cléricalisme, Léon XIV a ajouté : « Si le Christ est la pierre, alors Pierre doit paître le troupeau sans jamais céder à la tentation d’être un chef solitaire ou un supérieur des autres, se faisant maître des personnes qui lui sont confiées. ».

« La première grande aspiration que je veux partager avec vous », a poursuivi le pape, « est celle d’une Église unie, signe de communion, qui devienne ferment pour un monde réconcilié. » Reprenant une parole de saint Augustin – « L’Église est composée de ceux qui vivent en concorde avec leurs frères et qui aiment leur prochain » (Lettre 243, 9) – Léon XIV a dénoncé « trop de discordes, trop de blessures causées par la haine, la violence, les préjugés, la peur du différent, et un paradigme économique qui exploite la Terre et marginalise les plus pauvres. ».« Nous voulons être, au sein de cette pâte, un petit levain d’unité, de communion, de fraternité. Nous voulons dire au monde, avec humilité et joie : regardez le Christ ! Approchez-vous de Lui ! Accueillez sa Parole qui éclaire et console ! »

Le programme du pontificat a été esquissé avec clarté : « Marchons ensemble, entre nous, avec les Églises chrétiennes sœurs, avec ceux qui empruntent d’autres chemins religieux, avec ceux qui cherchent Dieu, avec tous les hommes et femmes de bonne volonté. […] Ce chemin de paix est notre mission. » Parmi les témoignages les plus touchants figure celui d’Iván Herrera Geldres, ancien élève du pape au Pérou : « Nous l’avons connu comme un vrai missionnaire. Il n’était pas un homme de bureau. Il avait choisi la route, il aimait être au milieu du peuple, écouter leurs histoires, partager leurs luttes. ». « Il connaît le visage de la pauvreté, il sait ce que signifie habiter les périphéries de l’âme et de la société », a-t-il affirmé. « Il ne parlait pas d’espérance : il la construisait, jour après jour. […] Il portera à Rome le parfum de la mission. »

Comme le veut la tradition, le pape a reçu deux signes forts de sa charge : le Pallium, symbole du Bon Pasteur, lui a été imposé par le cardinal Mario Zenari ; l’Anneau du Pêcheur, représentant saint Pierre avec la barque et les filets, lui a été remis par le cardinal Luis Antonio Tagle. ( Le cardinal français Dominique Mamberti ayant été victime d’un malaise au cours de la messe)

Avant l’homélie, douze représentants du peuple de Dieu – dont trois cardinaux, un évêque, un prêtre, un diacre, deux religieux, un couple et deux jeunes – sont venus exprimer leur obéissance au nouveau souverain pontife.

Lire aussi

Après la messe, sur le parvis de la basilique, Léon XIV a récité le Regina Caeli. Il y a lancé de puissants appels pour la paix :« Dans la joie de la foi et de la communion, nous ne pouvons oublier nos frères et sœurs qui souffrent à cause des guerres à Gaza. Les enfants, les familles, les personnes âgées survivantes sont réduits à la faim. »Il a ensuite évoqué la guerre en Ukraine : « La martyre Ukraine attend enfin des négociations pour une paix juste et durable. »Et encore le Myanmar : « De nouvelles hostilités y ont fauché des vies innocentes de jeunes gens. »

Enfin, il a confié son pontificat à la Vierge Marie : « Tandis que nous confions à Marie le service de l’évêque de Rome, pasteur de l’Église universelle, depuis la barque de Pierre, nous la contemplons, Étoile de la Mer, mère du Bon Conseil, comme un signe d’espérance.Implorons de son intercession le don de la paix, le soutien et la consolation pour ceux qui souffrent, la grâce pour nous tous d’être témoins du Seigneur Ressuscité. »

Le discours du pape Léon XIV tranche nettement avec certaines ambiguïtés du pontificat précédent. Il n’a pas dissimulé les attentes : unité, clarté doctrinale, charité enracinée dans la vérité du Christ. Sa manière de citer saint Augustin et Léon XIII, de rappeler que l’autorité de Pierre est d’abord un service dans la charité, montre une volonté ferme de revenir à l’essentiel de la mission de l’Église : sauver les âmes et rappeler que le monde n’aura jamais la paix sans conversion à la vérité. Ce pape ne cherche pas à séduire, mais à guider.Notons qu’il a choisi d’insister sur la pauvreté, la fraternité et la mission, sans jamais céder à un discours sociologisant ou à des slogans sans contenu. Il parle de la misère non pour faire de l’idéologie, mais parce qu’il l’a vécue. Et surtout, il parle de l’Évangile comme d’un trésor à transmettre, pas d’un produit à adapter.

Le pontificat de Léon XIV commence avec une promesse claire : celle d’une Église fidèle à sa tradition, ancrée dans l’amour du Christ, tournée vers la mission et la paix véritable. Il appelle à marcher ensemble, non pas pour fondre toutes les différences dans un consensus vague, mais pour faire resplendir l’unité dans la vérité. Ce n’est pas le langage d’un gestionnaire : c’est celui d’un pasteur, d’un père. Et cela, dans l’Église d’aujourd’hui, est une bonne nouvelle.

Les larmes du Pape #LéonXIV après la remise de l’anneau du pêcheur ( images Vatican média)

Recevez chaque jour notre newsletter !