Du 20 mai au 25 juillet 325, près de 300 évêques venus de toutes les provinces de l’Empire romain sont convoqués par l’empereur Constantin dans la ville de Nicée, en Bithynie. Converti au christianisme, le souverain entend mettre fin aux divisions doctrinales qui déchirent l’Église et menacent l’unité de l’Empire. Ce concile, le premier de nature œcuménique, marque une date décisive dans l’histoire du christianisme.
En 2025, l’Église catholique célèbre le 1700e anniversaire de cet événement fondateur. À cette occasion, une journée d’étude s’est tenue à l’Université Urbanienne à Rome, avec la présentation d’un document intitulé « Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur ». Monseigneur Piero Coda, théologien et secrétaire général de la Commission théologique internationale, y a souligné l’actualité du message de Nicée. « Nicée indique encore aujourd’hui que la forme synodale de vivre l’Église, c’est-à-dire la rencontre, le dialogue, l’écoute, est l’unique voie pour surmonter les polarisations, non en éliminant les différences, mais en les portant à un niveau plus élevé », a-t-il déclaré.
Le concile de 325 condamne l’arianisme, une doctrine défendue par le prêtre Arius d’Alexandrie, qui niait l’égalité du Fils avec le Père. En réponse, les Pères conciliaires proclament le dogme de la consubstantialité du Christ au Père, fondement de la foi trinitaire. Ce terme, bien que central à l’époque, a été progressivement mis de côté dans la théologie postérieure au Concile Vatican II. Le concile fixe également la date de la célébration de Pâques, unifiant ainsi la liturgie chrétienne sur ce point essentiel.Le concile de Nicée est aussi le point de départ d’un processus qui mènera, quelques décennies plus tard, à l’édit de Thessalonique promulgué par l’empereur Théodose Ier en 380, faisant du christianisme la religion officielle de l’Empire romain selon les principes définis à Nicée.
Monseigneur Coda rappelle que le symbole de foi rédigé lors du concile complété à Constantinople en 381 demeure aujourd’hui encore une profession de foi commune aux catholiques, orthodoxes et à de nombreuses confessions protestantes. Et pourtant, un paradoxe persiste : « Le Symbole de Nicée-Constantinople, fruit direct de ce concile, est devenu optionnel dans la liturgie moderne et rarement récité, alors qu’il représente un pilier de l’orthodoxie chrétienne », souligne-t-il.
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À l’époque déjà, les débats furent vifs et les tensions réelles. Comment parvenir à une unité authentique dans la diversité ? « Ce fut le miracle de l’Esprit : permettre à l’Église de dépasser des divergences profondes, non en les effaçant mais en les sublimant », explique Mgr Coda. Cette méthode, fondée sur le dialogue, l’écoute mutuelle et la fidélité à la Parole de Dieu, est pour lui le cœur même de la synodalité que promeuvent aujourd’hui les papes François et Léon XIV.
Le pape Léon XIV, dans sa messe inaugurale, a d’ailleurs souligné le lien providentiel entre son élection et cet anniversaire exceptionnel : « L’unité a toujours été une de mes préoccupations constantes, comme en témoigne la devise que j’ai choisie : In Illo uno unum ». La présence du patriarche Bartholomée et d’autres responsables ecclésiaux lors de cette célébration ainsi que la coïncidence, cette année, de la date de Pâques entre catholiques et orthodoxes sont, selon Mgr Coda, « des signes d’espérance ».
L’unité ne signifie pas uniformité. « Il s’agit du fleurissement de la diversité dans la communion des dons réciproques, mûris même à travers les siècles de division », précise-t-il. Et de conclure : « Il faut ouvrir les yeux du cœur à la lumière qui vient de Jésus. Cette lumière, c’est l’amour, qui nous fait nous reconnaître les uns les autres ».Citant le pape Léon XIV, il rappelle : « L’amour et l’unité sont les grandes paroles de notre temps ». Une exhortation puissante, dans un monde de fractures, à redécouvrir l’héritage lumineux du concile de Nicée, à la fois théologique, spirituel et profondément ecclésial.