Lundi 14 juillet, les chefs des Églises de Terre Sainte se sont rendus à Taybeh, unique localité entièrement chrétienne de Cisjordanie, pour manifester leur solidarité à la suite de nouvelles attaques menées par des colons israéliens. Cette visite, conduite par le Conseil des patriarches et des chefs des Églises de Jérusalem, survient dans un contexte d’hostilité croissante contre la population chrétienne locale.Parmi les participants figuraient le cardinal Pierbattista Pizzaballa, patriarche latin de Jérusalem, et le patriarche orthodoxe Théophile III de Jérusalem. Ce dernier a transmis un message du roi Abdallah II de Jordanie condamnant « les agressions des colons, leur terreur quotidienne à l’encontre des Palestiniens et leurs attaques systématiques contre des dizaines de villages, villes et camps dans les territoires palestiniens occupés ».
La délégation a participé à une prière sur les ruines de l’église Saint-Georges, datant du Ve siècle, située à Taybeh. Quelques jours auparavant, un incendie criminel avait été déclenché près du cimetière du village et du site archéologique. Les prêtres locaux ont dénoncé « une série d’attaques dangereuses et systématiques » visant les terres agricoles, les lieux saints et les habitants.
Dans une déclaration commune, les responsables religieux ont exigé « une enquête immédiate et transparente pour comprendre pourquoi la police israélienne n’a pas répondu aux appels d’urgence de la population locale, et pourquoi de tels actes odieux restent impunis ». Ils ajoutent : « Ces actes sont une menace directe et délibérée contre notre communauté locale, mais aussi contre le patrimoine historique et religieux de nos ancêtres et de nos lieux saints. »Malgré ces violences, les chefs d’Églises ont salué le courage des habitants de Taybeh : « Face à de telles menaces, le plus grand acte de bravoure est de continuer à appeler ce lieu votre maison. Nous vous soutenons, nous vous accompagnons dans votre résilience et vous portons dans nos prières. »
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Située à une trentaine de kilomètres de Jérusalem, Taybeh a vu, ces derniers mois, ses terres agricoles envahies par des colons y faisant paître du bétail, détruisant les oliviers qui assurent la subsistance de nombreuses familles. Le mois dernier, plusieurs habitations ont été attaquées et un panneau provocateur a été érigé : « Il n’y a pas d’avenir pour vous ici ».
Les Églises dénoncent « une stratégie d’intimidation clairement organisée contre les chrétiens » dans toute la région. Elles exhortent les diplomates, responsables politiques et ecclésiastiques à agir pour garantir aux habitants de Taybeh « la possibilité de vivre en paix, de cultiver leurs terres sans danger et de pratiquer leur foi librement ».Au Royaume-Uni, Mgr Nicholas Hudson, évêque auxiliaire de Westminster et coordinateur de la mission de solidarité avec la Terre Sainte, a affirmé : « Les chrétiens de Taybeh ont le droit de vivre en sécurité. J’invite tous les hommes et femmes de bonne volonté à élever leur voix face à l’oppression et à l’injustice, et à exhorter nos dirigeants à agir pour mettre fin à cette persécution. »
De son côté, l’organisation américaine Churches for Middle East Peace (CMEP) a également dénoncé les violences. Sa directrice, Dr Mae Elise Cannon, a déclaré : « La violence des colons et les destructions à Taybeh s’inscrivent dans un schéma inquiétant d’attaques qui chassent les chrétiens de leur terre natale. Nous ne pouvons rester silencieux pendant que des églises sont menacées, des terres volées et des familles déplacées. »Le CMEP appelle l’administration Trump et le Congrès américain à « ouvrir une enquête transparente sur ces crimes, à exercer une pression diplomatique pour que les colons soient tenus responsables, et à fournir un soutien concret afin que la vie chrétienne continue de s’épanouir dans la terre où le Christ est né ».
À Gaza, le Père Gabriel Romanelli, curé de la paroisse de la Sainte-Famille, a évoqué la détresse des 500 personnes réfugiées dans son église : « Elles sont épuisées par la guerre et le manque cruel de nourriture ». Il a toutefois confié à Radio Vatican : « Le fait de savoir que nous faisons partie de quelque chose de plus grand – l’Église universelle – et que plus d’un milliard de chrétiens prient pour notre petite communauté souffrante nous donne une force extraordinaire ».Décrivant la situation quotidienne, il a ajouté : « Avant même de penser à payer quelque chose, il faut le trouver. Et cela devient presque impossible. » Un seul oignon coûte jusqu’à 15 €, le kilo de sucre dépasse les 100 €, et le café, s’il est disponible, atteint les 250 € le kilo.
Taybeh, ville chrétienne au cœur d’une région tourmentée, symbolise aujourd’hui l’urgence d’une mobilisation pour protéger les chrétiens de Terre Sainte. Tandis que la prière reste une source de force, les Églises appellent les consciences à se réveiller et les autorités à agir avec justice.
Déclaration des Patriarches et Chefs d’Églises de Jérusalem
« Nous, le Conseil des Patriarches et Chefs d’Églises de Jérusalem, exprimons notre profonde inquiétude face aux récentes attaques ciblées menées par des colons israéliens radicaux contre la communauté chrétienne de Taybeh, la dernière ville entièrement chrétienne de Cisjordanie.
Le 7 juillet, des colons ont mis le feu près du cimetière de la ville et de l’historique église Saint-Georges, datant du 5ème siècle. Au cours des derniers mois, ils ont également détruit des oliveraies, envahi des terres agricoles, attaqué des maisons et affiché des panneaux déclarant « il n’y a pas d’avenir pour vous ici ».
Nous sommes solidaires avec le peuple de Taybeh et exigeons des autorités israéliennes qu’elles rendent des comptes, celles-ci n’ayant pas agi suite aux appels d’urgence répétés. Les lieux sacrés doivent être protégés et les communautés chrétiennes pacifiques ne doivent pas être chassées.
Nous appelons les chrétiens du monde entier, les diplomates et les dirigeants d’églises à prier, à s’exprimer et à soutenir Taybeh face à cette menace croissante. Que la justice et la paix prévalent, comme l’a proclamé le prophète Amos : « Que la justice coule comme l’eau, et la droiture comme un torrent intarissable. »