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« Trahir la doctrine peut signifier trahir le Christ » : l’avertissement du cardinal Sarah à l’Église d’aujourd’hui

cardinal Sarah - DR
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Et si les difficultés actuelles de l’Église ne venaient pas d’un manque d’adaptation, mais d’un abandon progressif de la vérité ? Le cardinal Sarah démonte les illusions d’une pastorale déconnectée de la doctrine, et rappelle que toute infidélité à l’enseignement reçu peut conduire à la trahison du Christ lui-même

Dans son ouvrage Dieu existe-t-il ?, le cardinal Robert Sarah livre une réflexion d’une importance majeure pour l’Église contemporaine. Au milieu d’une époque marquée par la confusion, l’émotion et l’instabilité, il remet au centre ce qui fonde véritablement l’action ecclésiale, la fidélité à la doctrine au service de la mission.Voici ce qu’il affirme :
« Une bonne pratique pastorale découle d’une bonne théologie et d’une sainte doctrine, et une mauvaise théologie, c’est-à-dire non nourrie des paroles de la foi et de la bonne doctrine, conduit à des désastres pastoraux. En ce sens, il est également bon de corriger l’idée erronée selon laquelle la théologie et, même la doctrine, seraient théoriques, seraient des idées. Il n’en est rien. »
Et d’ajouter:
« Ce n’est pas la théorie qui dépend de la praxis, qui en réalité est un principe marxiste, mais au contraire une bonne pratique pastorale découle d’une bonne théologie. »

Ces propos prennent un relief particulier dans une Église où la pastorale est devenue la priorité centrale, souvent présentée comme plus concrète, plus proche des gens, plus à l’écoute du terrain. Cette évolution, encouragée et assumée sous le pontificat du pape François, a profondément influencé les débats synodaux, les réformes liturgiques et les discours officiels. Mais elle pose une question grave : que devient la doctrine quand on la subordonne à la pratique ?Le cardinal Sarah met en garde contre cette inversion des priorités. Pour lui, l’Église ne peut se penser ni se conduire en dehors de la vérité révélée. L’action doit découler de la foi, et non la remodeler selon les attentes du monde.

Il le dit de manière encore plus forte dans un autre passage du livre :
« Pour un catholique, la doctrine est la chair du Christ, sa visibilité dans le temps et l’histoire, exactement comme l’Église. Elle est la manière concrète de dire, dans le temps, ce que l’événement de la Révélation nous a fait connaître de Dieu et de l’homme. Trahir la doctrine peut donc signifier trahir le Christ. »

Une telle parole ne se contente pas d’un rappel intellectuel. Elle engage tout : la fidélité au Christ, l’unité de la foi, la transmission du salut. Car si la doctrine devient malléable, adaptable, évolutive selon les circonstances, que reste-t-il de l’Évangile transmis par les apôtres ?

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Le cardinal Sarah poursuit :
« Dans le christianisme, dans la doctrine chrétienne, il n’y a pas d’évolutions, pas de soubresauts. Le développement doit être un développement organique, autrement dit il est toujours nécessaire que le développement et l’approfondissement légitimes de la vérité révélée, évidemment avec le concours de la raison et sous la conduite de l’Esprit Saint, soient totalement liés à la doctrine précédente et dépendent d’elle, sans éléments entièrement nouveaux et incohérents, sans soubresauts et sans contradictions. En ce sens, le développement est toujours déploiement de ce qui existe déjà et qui ne demande qu’à se manifester davantage. Il ne peut jamais être l’introduction absolument novatrice d’un élément étranger et totalement nouveau. Pour en fournir un exemple simple, nous pourrions rappeler qu’un homme se développe en grandissant dans son corps, mais jamais il ne lui pousse un troisième bras ou un deuxième nez. »

Cette image montre bien la différence entre un développement fidèle et une mutation qui trahit l’identité. L’Église ne peut se renouveler qu’en approfondissant ce qu’elle est déjà, non en inventant des formes nouvelles qui contredisent ses fondements. C’est ce que Benoît XVI appelait l’herméneutique de la continuité, par opposition à une rupture, voire une révolution.Aujourd’hui, certains documents ou discours issus des synodes récents suggèrent que l’on pourrait changer la manière de comprendre le péché, la morale, le rôle des femmes, la sexualité, la nature même de l’Église. Sous couvert d’écoute, de processus, de discernement communautaire, on glisse parfois vers des propositions qui ne sont plus liées à la doctrine antérieure, ou qui en prennent le contre-pied.Le cardinal Sarah alerte : ce chemin n’est pas celui de l’Esprit Saint, mais celui de l’oubli, de l’instabilité, du relativisme. Une Église qui se pense en mutation permanente ne peut plus être reconnue comme une, sainte, catholique et apostolique. Elle devient une structure humaine, sociologique, dépourvue de sa force surnaturelle.

L’avenir de l’Église ne réside pas dans des ajustements au monde, mais dans une fidélité renouvelée à la foi transmise. Toute réforme véritable naît d’un approfondissement de la doctrine, d’un retour à la source, d’une fidélité vivante à la Révélation.Le cardinal Sarah rappelle, avec gravité et clarté, que la sainteté de la pastorale dépend de la sainteté de la doctrine, et qu’en trahissant la doctrine, on ne trahit pas seulement un système d’idées, mais le visage même du Christ.

On espère que l’Église universelle, et spécialement l’Église de France, aura à cœur de méditer ces paroles limpides. Que nos évêques retrouvent le sens de l’enseignement clair, enraciné dans la Tradition vivante, et le courage d’une fidélité sans compromis à l’Évangile tout entier. Que le pape Léon XIV, en ce début de pontificat, sache discerner l’urgence d’un redressement doctrinal à la mesure des dérives accumulées, et replacer la vérité révélée au centre de toute vie ecclésiale. Car il ne s’agit pas seulement d’une réforme d’organisation, mais d’un combat pour l’âme même de l’Église.

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