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Le pape Léon XIV choisit le cardinal Dominik Duka comme envoyé spécial en Pologne

Cardinal Duka - DR
Cardinal Duka - DR
Un prélat conservateur, initiateur de dubia adressés à François, désigné par Léon XIV pour représenter le Saint-Siège

Ce samedi 23 août le pape Léon XIV a nommé le cardinal Dominik Duka, archevêque émérite de Prague, comme son envoyé spécial aux célébrations du centenaire de l’érection de l’archidiocèse de Gdańsk, en Pologne. La cérémonie se tiendra le 14 octobre 2025 en la cathédrale d’Oliwa.

L’événement du 14 octobre prochain revêt une importance particulière pour l’Église en Pologne et pour l’Europe entière : il s’agit du centenaire de l’érection de l’archidiocèse de Gdańsk. Fondé en 1925, au sortir de la Première Guerre mondiale et dans le contexte de la renaissance de la nation polonaise, ce diocèse s’est affirmé au fil du siècle comme un bastion du catholicisme au cœur d’une région marquée par les luttes politiques et sociales. La cathédrale d’Oliwa, joyau de l’art baroque et lieu emblématique de la foi polonaise, accueillera les célébrations. En désignant un envoyé spécial, le pape Léon XIV souligne la dimension internationale de l’événement et l’universalité de l’Église unie autour de Gdańsk, ville qui fut aussi, à travers le mouvement Solidarność, un haut lieu de résistance au communisme.

Né en 1943 à Hradec Králové, en Tchécoslovaquie, Jaroslav Duka – futur Dominik – grandit dans une famille brisée par les persécutions du régime. Son père, officier contraint de servir dans l’armée nazie, s’était évadé pour rejoindre la Royal Air Force britannique. Après la guerre, jugé « trop proche de l’Occident », il fut emprisonné par les communistes. La famille expulsée de son logement, sa mère éleva seule Dominik et sa sœur dans des conditions très difficiles. Privé d’études universitaires, le jeune Duka est contraint de travailler en usine et d’accomplir son service militaire. Mais il entend l’appel du sacerdoce et, après de multiples tentatives, parvient à entrer au séminaire de Litoměřice en 1965. Ordonné en 1970, il rejoint clandestinement l’Ordre dominicain, interdit par le régime, et choisit comme nom religieux celui du fondateur, saint Dominique.

Après la Révolution de velours de 1989, Dominik Duka devient provincial des dominicains de Tchécoslovaquie et s’impose comme l’une des grandes figures du renouveau spirituel. Il participe activement à la traduction tchèque de la Bible de Jérusalem, enseigne dans plusieurs universités et publie de nombreux ouvrages de théologie biblique et spirituelle. Nommé évêque de Hradec Králové en 1998 par Jean-Paul II, il est ensuite administrateur apostolique de Litoměřice (2004-2008). En 2010, Benoît XVI le nomme archevêque de Prague. Deux ans plus tard, le pape allemand le crée cardinal. À ce titre, il participe au conclave de 2013.

Le cardinal Duka est également lié à la France. En 2012, l’ambassadeur Pierre Lévy lui remit la Légion d’honneur, distinction soulignant son rôle dans la lutte contre le totalitarisme. Francophone, il entretient des relations suivies avec l’Église française et n’a pas manqué, lors de son discours, de rappeler son admiration pour le père Henri-Dominique Lacordaire, restaurateur des Dominicains en France.

Considéré comme un prélat conservateur, il s’illustre au synode de 2015 par son opposition à toute remise en cause de la morale familiale. Toujours attentif à la liberté religieuse, il n’hésite pas à dénoncer les atteintes commises par la Turquie et la Chine.

En juillet 2023, le cardinal Dominik Duka s’est également joint à une démarche de grande portée : avec les cardinaux Raymond Leo Burke, Walter Brandmüller, Robert Sarah et Juan Sandoval Íñiguez, il a cosigné de nouvelles dubia adressées au pape François. Cette initiative avait pour objectif d’obtenir des réponses claires sur des points jugés préoccupants pour l’intégrité de la doctrine, en particulier concernant l’accès aux sacrements, la morale familiale et la question sensible des bénédictions de couples homosexuels ( fiducia Supplicans) . En participant à cette interpellation collégiale, le cardinal tchèque confirmait sa fidélité à la tradition de l’Église et son attachement à la clarté doctrinale, rejoignant ainsi un groupe de prélats soucieux de préserver l’unité dans la vérité.

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Le 26 avril 2023, le cardinal Dominik Duka a célébré ses 80 ans. Cette date l’a fait entrer parmi les cardinaux non-électeurs, mettant fin à son droit de vote en cas de conclave. Grande figure de la résistance catholique au communisme, il demeure une voix forte au sein du Sacré Collège. Aujourd’hui, le collège cardinalice compte 122 électeurs et 100 cardinaux sans droit de vote.

Ce choix de Léon XIV s’inscrit dans une ligne déjà visible depuis le début de son pontificat. En 2024, le pape avait confié au cardinal Robert Sarah, autre figure conservatrice et grande voix prophétique de l’Église, la mission de représenter le Saint-Siège lors du grand pèlerinage de Sainte-Anne-d’Auray, en Bretagne. Là encore, le pape avait choisi un pasteur marqué par sa fidélité, son attachement à la prière et son autorité morale.

Comme le cardinal Sarah, son Eminence Duka incarne une Église qui ne cède pas aux pressions idéologiques et qui puise sa force dans l’épreuve traversée avec foi. Ces désignations successives traduisent un cap : mettre en avant des cardinaux enracinés dans l’expérience, capables de parler au monde avec clarté. Léon XIV démontre qu’il n’entend pas gouverner l’Église par exclusions ou mises à l’écart. Son pontificat cherche à intégrer les différentes sensibilités et les diverses expériences de l’Église universelle, tout en mettant en valeur des figures qui ont traversé l’épreuve avec courage et fidélité. Ce n’est pas une politique de rupture, mais une vision d’unité : rassembler autour de la foi vécue, reconnaître les mérites de chaque tradition spirituelle, et faire entendre la voix d’une Église une et catholique, où tous ont leur place pour annoncer l’Évangile.

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