Au Meeting de Rimini, le religieux franciscain père Ibrahim Faltas a livré un témoignage bouleversant sur la situation à Gaza et en Cisjordanie. « Je vous parle d’une blessure ouverte », a-t-il déclaré, dénonçant le silence de la communauté internationale et rappelant qu’une génération entière d’enfants grandit dans la guerre, la faim et la peur. Selon lui, si rien ne change, la présence chrétienne au Moyen-Orient est vouée à disparaître.Dans un communiqué conjoint, le patriarche latin de Jérusalem, le cardinal Pierbattista Pizzaballa, et le patriarche grec-orthodoxe Théophile III ont assuré que prêtres et religieuses des deux Églises resteront à Gaza aux côtés d’une population marquée par la faim et la guerre, même face à une possible expulsion forcée annoncée par Israël. Ces paroles font suite aux avertissements du ministre israélien de la Défense Yoav Katz, qui a affirmé que « Gaza serait rasée » si le Hamas ne libère pas les otages, Israël réagissant ainsi dans une logique de défense face à une guerre qu’elle n’a pas déclenchée.
Présent à Rimini pour la présentation du documentaire Osama ,en voyage vers la maison, le père Ibrahim Faltas, ancien curé de Jérusalem et actuel directeur des écoles de Terre Sainte, a répondu sans détour aux questions du média italien La Bussola Quotidiana :
« Rien. Pire encore », affirme-t-il lorsqu’on lui demande ce que fait la communauté internationale pour soulager Gaza. « Les largages d’aide tuent les gens, détruisent leurs tentes. Des centaines meurent chaque mois de faim. Et le monde se tait. » Il a tenu à remercier l’Italie, premier pays européen à avoir accueilli trois cents Palestiniens, dont des enfants gravement blessés. Mais il dénonce une réalité dramatique : « À Gaza, les sœurs de Mère Teresa accueillaient quatre-vingts handicapés. Il n’en reste que trente aujourd’hui. Trois cents personnes sont mortes de faim en un mois. »
Pour les chrétiens palestiniens, l’horizon est sombre. « Ils partent », explique-t-il. « Rien qu’à Bethléem, sept cents personnes ont déjà quitté la ville. Si les choses continuent, la présence chrétienne au Moyen-Orient prendra fin. »
Son témoignage se fait alors déchirant « Depuis le 7 octobre, tout a changé. L’espérance a disparu. Nous souffrons tous, juifs, musulmans et chrétiens, car la douleur et la vengeance ne connaissent pas de religion. Mais si une voix crie plus fort, c’est celle des enfants de Gaza. J’ai vu des petits amputés, mutilés, traumatisés, une génération entière qui ne connaît que la guerre, la faim et la fuite. Aujourd’hui, pour des milliers de familles, une tente est une maison. Gaza est une blessure ouverte dans la chair vive de l’humanité. »
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En Terre Sainte, les chiffres confirment cette inquiétude. En moins de vingt ans, la communauté chrétienne a diminué de moitié dans plusieurs villes, et elle représente désormais moins de deux pour cent de la population. Bethléem, jadis majoritairement chrétienne, se vide peu à peu de ses habitants. En Cisjordanie, 180 familles chrétiennes ont émigré au cours des deux dernières années. À Gaza, environ un millier de chrétiens subsistent dans des conditions dramatiques.Le père Faltas insiste sur le rôle spirituel des communautés chrétiennes qui choisissent de rester malgré tout. À Gaza, plus de six cents personnes vivent depuis deux ans dans les locaux de la paroisse. Le curé, don Gabriel, et le père Joseph partagent leur quotidien. La paroisse est devenue un signe vivant de l’Évangile, qui s’incarne dans la douleur et la solidarité. Pour lui, ces prêtres et ces religieuses incarnent le Christ au milieu de la Croix, une présence qui ne se mesure pas seulement en nombre mais en témoignage.
les chrétiens de Terre Sainte sont appelés à être non pas des spectateurs mais des gardiens de la mémoire et de la foi, même lorsque tout semble perdu.
L’épreuve ne touche pas seulement Gaza. Dans toute la région, la guerre détruit non seulement les vies mais aussi la mémoire et la culture. Monuments, œuvres d’art et témoignages millénaires disparaissent, comme si l’on voulait effacer l’identité même d’un peuple. Le patriarche Pizzaballa et Théophile III en ont fait un symbole en affirmant que rester à Gaza, malgré la peur et les bombardements, c’est refuser l’effacement de l’histoire et de la foi.La question du pape Léon XIV sur la protection des minorités chrétiennes dans le monde résonne alors avec plus de force. Qui restera pour garder les lieux saints si les familles, les jeunes et les écoles disparaissent ? Comment célébrer l’Eucharistie dans la ville de la Nativité si Bethléem est vidée de ses chrétiens ? Le père Faltas lance un cri de vérité et de paix : Cet appel ne peut laisser personne indifférent. Pour les catholiques du monde entier, la survie du christianisme en Terre Sainte est une responsabilité partagée. Elle appelle la prière, le soutien matériel, mais aussi une prise de conscience : sans les chrétiens de Terre Sainte, les lieux mêmes où le Christ a marché deviendront des musées vides.