Au 110 rue de Vaugirard, l’ancien couvent des Visitandines, fondé en 1619 par saint François de Sales et sainte Jeanne de Chantal, entre dans une nouvelle étape de son histoire. La Maison de la Visitation, dont la première pierre a été bénie lundi 22 septembre par Mgr Laurent Ulrich, sera bientôt transformée en centre d’accueil de solidarité. Derrière l’enthousiasme des promoteurs et des associations, un sentiment de tristesse s’impose : un lieu de prière et de contemplation tourné vers Dieu devient un lieu d’hébergement tourné vers l’homme.
Pendant plusieurs siècles, le couvent des Visitandines de la rue de Vaugirard a été un lieu de recueillement et de silence au cœur de Paris. Les religieuses cloîtrées et contemplatives y ont mené une vie de prière et de dévotion, fidèle à l’esprit de saint François de Sales et de sainte Jeanne de Chantal. En 2012, faute de nouvelles vocations, la communauté a quitté ce couvent pour se réinstaller au monastère de la Visitation, avenue Denfert-Rochereau, laissant derrière elles un lieu chargé d’histoire et de spiritualité.Avant la Révolution française, quatre couvents visitandins existaient à Paris : celui de la rue Saint-Antoine, fermé et affecté au culte protestant par Napoléon en 1802 ; celui de Chaillot, détruit en 1794 ; celui du faubourg Saint-Jacques, rouvert en 1806 ; et celui de la rue du Bac.
Aujourd’hui le projet de transformation prévoit d’accueillir des colocations pour adultes handicapés et valides, des jeunes en difficulté, des femmes enceintes en situation de précarité, et ouvrira un jardin public pour favoriser les rencontres et l’inclusion sociale.
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Mais cette transformation n’a pas été acceptée sans controverses. Plusieurs associations de défense du patrimoine, dont Sites & Monuments, ont multiplié les recours pour préserver l’intégrité historique et architecturale du couvent. Ces recours ont été rejetés, et l’affaire a même été portée devant la ministre de la Culture, Rachida Dati. Pour les défenseurs du patrimoine, le projet menace de dénaturer un site unique, qui comprend notamment un jardin de plus de 4.000 m², une chapelle du XIXᵉ siècle, des pilastres Louis XVI et des vestiges d’une petite ferme urbaine, témoignage rare d’autarcie monastique à Paris. Même des personnalités du quartier, dont Gérard Depardieu, se sont exprimées sur la valeur patrimoniale du lieu.
Aucune communauté religieuse n’aurait-elle souhaité s’installer au cœur de Paris pour raviver la vie contemplative dans ce monastère historique ?
L’Église, dans son rôle premier, est là pour sauver les âmes, guider vers la vie éternelle et nourrir la foi. Transformer ce lieu en centre social, aussi noble soit l’objectif, semble reléguer la dimension spirituelle au second plan.
Le diocese nous précise cependant que » la dimension spirituelle du site sera bien ravivée par la restauration minutieuse de la chapelle et de la salle capitulaire, et la reprise de la célébration de l’Eucharistie et des offices dans cette chapelle. La chapelle demeurera naturellement un lieu de prière accessible et vivant, particulièrement pour les personnes qui habiteront et fréquenteront la Maison ». Pourtant, malgré cette précision, il reste un profond regret : le chant des louanges des sœurs ne résonnera plus dans ces murs, et la contemplation ainsi que l’oraison d’une communauté religieuse ne continueront plus à offrir un témoignage vivant de la foi au cœur de Paris. La Maison de la Visitation-Vaugirard sera un lieu de fraternité humaine, un espace d’accueil et de solidarité, certes, mais il est regrettable qu’elle ne puisse plus incarner la présence continue de la prière et de la vie monastique, source d’inspiration pour les vocations et rappel tangible du rôle central de Dieu au milieu de la cité : » loin des homme tournés vers eux-mêmes au cœur du monde tourné vers Dieu ».
