À l’occasion de la grande fête diocésaine de la Saint-Firmin, ce dimanche 28 septembre à la cathédrale d’Amiens, Monseigneur Gérard Le Stang, évêque d’Amiens, inaugure sa chaîne WhatsApp officielle. L’initiative se veut un signe de proximité avec les fidèles et un moyen moderne de rejoindre ceux qui, dans la Somme, vivent connectés à leur smartphone presque en permanence.Il est indéniable que l’Église doit chercher à rejoindre les âmes là où elles se trouvent, et aujourd’hui beaucoup se tiennent sur les réseaux sociaux. La promesse est belle : recevoir sur son téléphone des méditations, des paroles d’espérance, des invitations aux événements diocésains, ou encore des messages spontanés de l’évêque. L’idée de créer un contact direct entre pasteur et fidèles répond à un désir de proximité, d’écoute et de communication.
Cependant, la question demeure : ce type de canal numérique peut-il vraiment susciter une authentique croissance spirituelle, ou risque-t-il de n’être qu’une consommation de plus, réduite à l’immédiateté et au zapping ?
Beaucoup de jeunes témoignent aujourd’hui d’avoir découvert la foi et même d’avoir connu une conversion grâce aux réseaux sociaux. Le phénomène est réel et ne doit pas être négligé. Mais une étude récente a montré que ceux-là mêmes qui se disent « convertis » fréquentent peu les sacrements. Alors, on s’interroge : véritable conversion ou ferveur d’un instant ? Cette interrogation rejoint un constat plus large.
Le père Paul Adrien, figure bien connue du catholicisme en ligne, a lui-même reconnu les limites de ce mode de présence : il ne suffit pas d’accumuler des « vues », des « fans » ou des « abonnés ». La vraie difficulté réside dans la transformation de ces curieux numériques en fidèles enracinés dans la vie sacramentelle. Passer du clic à la communion, de l’écran à l’adoration, de l’émotion éphémère à l’engagement concret dans la paroisse, voilà le véritable défi.Or, les faits sont là : beaucoup suivent, peu se déplacent. L’enthousiasme suscité par une vidéo ou un message ne se traduit pas automatiquement par une participation à la messe dominicale, à la confession ou à l’adoration eucharistique. Et c’est pourtant là que se trouve le cœur de la foi : non pas dans la réception de contenus spirituels, mais dans la rencontre réelle avec le Christ dans les sacrements et dans la communauté vivante de l’Église.
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Il faut saluer l’intention de Monseigneur Le Stang : témoigner d’une Église « proche et vivante ». Mais la proximité véritable ne se joue pas seulement sur les écrans, elle s’éprouve dans la présence physique du pasteur auprès de son peuple, dans la célébration de l’eucharistie, dans la visite des malades, dans la catéchèse donnée en chair et en os.Une chaîne WhatsApp peut encourager, soutenir, éveiller la curiosité. Mais elle ne peut en aucun cas remplacer la vie liturgique, ni la communauté rassemblée autour de l’autel. Le danger serait d’installer une illusion : croire que suivre une chaîne revient à vivre la foi, alors qu’il ne s’agit encore que d’un premier pas, souvent fragile.L’évangélisation numérique est un outil, mais elle n’est pas une fin. Elle ne doit jamais se substituer à ce qui constitue le cœur de l’Église : la rencontre personnelle avec le Christ, vécue dans les sacrements, la prière et la charité. Le risque est grand de confondre popularité et conversion, visibilité et mission accomplie.
Ainsi, si l’Église d’Amiens choisit de se rendre présente sur WhatsApp, il conviendra de veiller à ce que cette initiative demeure clairement ordonnée à la vie paroissiale et sacramentelle. Car seule cette cohérence permettra de dépasser le simple effet d’annonce et de faire de cet outil un véritable tremplin vers la foi vécue en Église.