Depuis plus de deux siècles, les sœurs trappistines de l’Abbaye de la Coudre prient et travaillent dans la discrétion, aux portes de Laval. Leur spécialité, un flan sobrement nommé “Véritable Trappe”, a conquis les palais bien au-delà de la Mayenne. Derrière cette douceur simple, c’est tout un art de vivre monastique qui se révèle, silence, prière et travail bien fait.Fondée en 1816, l’Abbaye de la Coudre perpétue la tradition bénédictine selon la Règle de saint Benoît, “Ora et labora”, prie et travaille. Chaque jour, la cloche appelle les quarante sœurs trappistines à la louange, des Vigiles à quatre heures du matin jusqu’aux Complies du soir. Leur journée s’écoule au rythme des offices, de la lecture méditée des Écritures, du travail manuel et des repas pris en silence.
« Chercher Dieu en toute chose » : telle est leur vocation. Dans le silence du cloître, elles écoutent la Parole, la méditent et la traduisent en gestes simples, nourries par la certitude que Dieu cherche l’homme bien plus que l’homme ne cherche Dieu.
Si l’Abbaye fut longtemps connue pour son fromage “Trappe de la Coudre”, c’est un dessert qui, depuis les années 1970, a fait sa renommée nationale, le flan “Véritable Trappe”. L’aventure commence en 1974. Une sœur, héritant d’un ami du monastère d’une recette et d’un peu de matériel, se met à préparer de petits sachets de poudre pour entremets. Dans une simple mélangeuse, elle fabrique dix kilos de préparation à la fois, ensachés un à un, vendus dans la petite boutique du monastère. Le succès est immédiat.Face à la demande croissante, les sœurs se dotent d’une machine plus puissante en 1977, puis d’une ensacheuse en 1989. En quelques années, leur production atteint le demi-million de sachets par an. Ces entremets sont désormais distribués dans les boutiques monastiques, dans de nombreux magasins en France et dans les circuits de l’artisanat monastique.
Le “Véritable Trappe” est un flan à l’image de celles qui le fabriquent, simple, pur et sans artifice. Sans colorant ni conservateur, il est composé d’ingrédients naturels, algues, amidon de maïs, sucre et arômes authentiques, et décliné en huit saveurs, vanille, cacao, café, citron, praliné-noisette, framboise, pistache et caramel au beurre salé.
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Les sœurs ont veillé à réduire la teneur en sucre, privilégiant la finesse du goût à l’excès. Le résultat, un entremets léger, onctueux, riche en sels minéraux et en saveurs équilibrées. “Ce flan, c’est un peu notre manière de prolonger la prière par le travail des mains”, confie sobrement une sœur. “Il nourrit le corps, mais aussi l’âme, car il porte la paix du cloître.”
La fabrication des entremets n’est pas qu’une activité économique, elle s’inscrit dans la vocation même du monastère. “Le travail est prière”, rappelle saint Benoît. Pour les trappistines de la Coudre, travailler dans le silence, avec soin et humilité, c’est participer à l’œuvre créatrice de Dieu. Chaque sachet, chaque geste dans l’atelier est offert comme un acte de louange, dans ce juste équilibre entre contemplation et action qui caractérise la vie cistercienne.Leur production soutient la communauté, mais aussi leur mission d’accueil. Le monastère ouvre en effet ses portes à ceux qui souhaitent faire une retraite spirituelle, un temps de silence ou de discernement. Dans l’hôtellerie, les retraitants partagent les offices, les repas sobres et le rythme paisible de la communauté.
Située à quelques pas du centre-ville, l’Abbaye de la Coudre semble pourtant hors du temps. Le bruit du boulevard s’efface derrière les murs épais, laissant place au chant des oiseaux et à la prière des psaumes. Dans le parc planté de noisetiers, les coudriers qui ont donné leur nom au lieu, il n’est pas rare d’apercevoir des écureuils, image vivante de la paix de la Création.Depuis deux siècles, les sœurs demeurent là, fidèles à leur mission, prier pour le monde et vivre dans la simplicité évangélique. Leur flan, vendu aujourd’hui à travers la France, porte en lui quelque chose de cette paix intérieure, une trace tangible du silence priant du cloître.
Goûter le flan “Véritable Trappe”, c’est découvrir la profondeur d’une vie donnée à Dieu, où chaque geste, chaque travail et chaque prière sont tournés vers la louange. À travers cette œuvre discrète et fidèle, les sœurs de la Coudre rappellent que la beauté naît du silence et que la paix véritable s’enracine dans la simplicité du quotidien.
