Le 4 novembre 2025, lors de l’ouverture de l’Assemblée plénière d’automne des évêques de France à Lourdes, le cardinal Jean-Marc Aveline a pris la parole devant l’ensemble de l’épiscopat. S’inscrivant dans la continuité du magistère de ses prédécesseurs, le cardinal Aveline a alerté sur la fragilité du climat social et politique en France, affirmant que « la démocratie elle-même semble être en danger, comme le révèlent la recrudescence de l’antisémitisme et l’attrait exercé par des populismes devenus menaçants ». Ces mots, prononcés avec gravité, traduisent une inquiétude face à la montée des divisions et à la perte du sens spirituel dans la vie publique. Pour lui, la dérive du débat démocratique et la banalisation des discours de haine témoignent d’une crise plus profonde. Citant le patriarche Bartholomée, il a rappelé : « Lorsque Dieu disparaît du regard humain, la terre devient un bien à exploiter, l’autre un rival à craindre et la vie elle-même une marchandise. »
Le cardinal a également appelé à une attention particulière envers les jeunes générations, dont il a voulu comprendre les aspirations : « Ce désir d’identité taraude le cœur de nombreux jeunes et nous devons le considérer positivement, le comprendre et le nourrir, afin qu’il ne soit pas récupéré pour servir d’alibi à de dangereuses crispations identitaires. » Selon lui, ce besoin d’enracinement ne doit pas être jugé mais accompagné, pour qu’il devienne un chemin d’ouverture et non de fermeture.
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Pour éclairer la mission de l’Église dans ce contexte, le cardinal Aveline s’est référé à Jean-Paul II, citant l’encyclique Dominum et vivificantem (1986) : « Il est beau et salutaire de penser que, partout où l’on prie dans le monde, l’Esprit Saint, souffle vital de la prière, est présent. » Il a ajouté : « Je dois au pape Jean-Paul II d’avoir mieux compris, pour tout ce qui concerne la mission, l’urgence d’une solide théologie trinitaire et notamment d’une pneumatologie (c’est-à-dire la partie de la théologie qui étudie la personne et l’action du Saint-Esprit). » Le prélat a ensuite résumé cette vision en une formule marquante : « L’Église s’essouffle vite si elle prétend souffler à la place de l’Esprit. » Cette image, simple et percutante, illustre la conviction que la fécondité pastorale naît de la docilité à l’Esprit Saint et non d’une activité purement humaine.
Évoquant enfin la pensée de Benoît XVI, le cardinal Aveline a rappelé le dialogue que le cardinal Ratzinger avait mené avec le philosophe Jürgen Habermas en 2004 : « Peut-être nous faudra-t-il […] avoir le courage de dénoncer, grâce à la raison, les pathologies de la religion, lorsque celle-ci préfère la contrainte à la liberté, et, dans le même temps, dénoncer, grâce à la religion, les pathologies de la raison, lorsque celle-ci choisit d’ignorer la dimension spirituelle de l’humain. » Cette référence, a-t-il expliqué, souligne la nécessité d’un équilibre entre foi et raison pour préserver la liberté et la dignité de l’homme.Par ces références à Jean-Paul II et à Benoît XVI, le cardinal Aveline a voulu replacer la réflexion de l’Église de France dans la continuité d’une tradition spirituelle et intellectuelle solide. À Lourdes, son intervention a insisté sur la nécessité d’un engagement lucide face aux tensions sociales et d’une fidélité renouvelée à l’Esprit Saint, source du véritable discernement chrétien.


