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Pourquoi la Royauté du Christ est-elle oubliée en temps de crise ?

@tribunechretienne
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Alors que ce jeudi 13 novembre toute la France ou presque commémorait le plus laïquement possible les attentats du 13 novembre, plus de 150 personnes s’étaient rassemblées la veille à l’Espace Bernanos autour du thème de la « Royauté du Christ, la réponse oubliée à nos crises actuelles ? »

Seth Talk, fondé par Julien  Dodeman, porte un nom qui renvoie à Seth, le fils d’Adam et Ève, symbole de renouveau après la chute. Le mot est aussi un acronyme résumant sa mission : Serve, Explore, Teach et Heal, pour servir l’Église, approfondir la foi, transmettre l’Évangile et accueillir la transformation que Dieu opère. L’objectif de Seth est simple : aider chacun à laisser Dieu recréer là où tout semble perdu. C’est dans cet esprit de renouveau et de transmission que la rencontre du mercredi 12 novembre s’est tenue à l’Espace Bernanos.

Prêtres, professeur, journaliste, influenceur entrepreneur, ingénieur, militaire et consorts se sont succédés pour marquer les 100 ans de l’encyclique Quas Primas de Pie XI, publiée le 11 décembre 1925 . Après la première édition en juin sur le Sacré-Cœur de Jésus, l’événement a fait à nouveau salle comble. Aymeric Pourbaix, le journaliste de France Catholique et d’En Quête d’Esprit sur Cnews , a resitué le sens de cette soirée en la plaçant entre deux dates lourdes de mémoire : l’Armistice de la Grande Guerre, le 11 novembre, et la boucherie du Bataclan, le 13 novembre. Deux tragédies, conséquences d’une société qui s’est coupée de Dieu. Et si Quas Primas (encyclique de Pie XI instituant la fête du Christ Roi) est sortie le jour de l’Armistice, la date de la fête du Christ Roi n’a pas été un hasard. Célébrée le dernier dimanche de l’année liturgique, le 23 novembre cette année-là, elle a été comme un couronnement de celle-ci.

Dans cette perspective, Thibault Collin, professeur de philosophie, spécialiste des questions morales et politiques, a dénoncé le laïcisme qui est une structure de péché, et qui proclame que le Christ est pour la vie privée. Il a rappelé que cela n’a rien à voir avec la laïcité, que Thomas Schmitz, fondateur d’Ichtus, présente comme une invention chrétienne, conformément à l’adage : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ».

Le CEC (Catéchisme de l’Église catholique), lui, a précisé l’ordre des priorités : « Aucune activité humaine ne peut se soustraire à l’empire spirituel ». Thibault Collin a abondé dans ce sens en citant cette phrase du Christ : « Tout pouvoir m’a été donné au Ciel et sur la Terre ». Et Jésus a enfoncé le clou lorsqu’il a déclaré à Ponce Pilate : « Tu n’aurais aucun pouvoir si tu ne l’avais reçu d’en haut ».

De ce constat a découlé un appel à la conversion personnelle. Thibault Collin a insisté sur son importance pour toute conversion sociale et politique. Il a cité ainsi Saint Jean-Paul II : « Ne tombez pas dans l’erreur qu’on peut changer la société en changeant ses structures externes, il faut aussi se changer soi-même. » Le professeur a évoqué ensuite notre royaume intérieur : « Le premier royaume que le Christ veut conquérir, c’est notre intelligence, notre mémoire, notre volonté… » Cette dynamique intérieure a rejoint l’exhortation de Corentin Dugas, alias un Homme Catholique, à « briser l’intimidation ». « Comme l’armée d’Israël face aux Philistins, et à Goliath, nous ne devons craindre », a-t-il exhorté, que ce soit la mort sociale ou l’inconfort pour annoncer le règne de Dieu. Il a conclu par une image forte : « Il n’y a pas de conclusion dans les Actes des Apôtres ». Pourquoi ? « C’est à nous qu’il revient de l’écrire. »

Dans la continuité de ces appels, Aymeric de Malessix, colonel et président de l’association des Amis de Jeanne d’Arc, a affirmé : « Si nous faisons grandir les vertus de la foi, l’espérance et la charité comme Jeanne, la victoire sera assurée. » L’abbé de Massia de la Fraternité Saint Pierre a prolongé cette réflexion en citant Dom Gérard, fondateur du monastère du Barroux :

« Et si nous cherchons à pacifier la terre, à embellir la terre, ce n’est pas pour remplacer le Ciel, c’est pour lui servir d’escabeau. »

Cette mention de Jeanne d’Arc a conduit naturellement Aymeric de Malessix à développer son rôle dans la Royauté du Christ : « L’étendard de sainte Jeanne d’Arc est une magnifique catéchèse de ce qu’est la royauté du Christ exercée par le Roi de France. » Jeanne d’Arc disait elle-même à Baudricourt : « Le royaume de France appartient au roi du ciel ». En écho, le Cardinal Sarah a rappelé récemment à Sainte-Anne d’Auray : « La France est une terre sainte, une terre réservée à Dieu ». Mais ces mots se sont inscrits dans une tradition bien plus ancienne. Léon XIII affirmait déjà : « La France est une nation prédestinée. » Et Saint Pie X a ajouté : « La France est la nouvelle tribu de Juda. » Le fait que les rois de France étaient sacrés, et non simplement couronnés, en a témoigné : une huile sainte était donnée par le Saint-Esprit au nouveau souverain ; une réalité jamais contredite par l’Église. Enfin, Jésus, par Marcel Van, a révélé la mission de la France dans une prière : « Répandre le règne de Dieu dans tout l’univers. »

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Cette vision a éclairé aussi les combats actuels. Jean Ousset, fondateur d’Ichtus, a été invoqué par Thomas Schmitz, (président d’Ichtus) citant son ouvrage Pour qu’il règne, véritable référence sur le Christ Roi. Jean Ousset y a intimé de dénoncer absolument la neutralité, qui n’est pas une catégorie morale. Aux laïcistes qui agitent l’épouvantail de la théocratie, il a rappelé qu’il ne s’agit nullement d’investir des cardinaux dans le gouvernement politique. Pour lui, « le Christ est en exil » et c’est tout laïc qui est appelé à œuvrer à son retour. Jean Ousset pensait même qu’« à 5 000 hommes résolus bien formés il suffirait de faire revenir le Christ Roi de son exil ».Toutefois, ce règne ne devait pas être envisagé comme la restauration d’un passé révolu. L’Abbé Jean de Massia a mis en garde : « Il ne s’agit pas de faire claquer nos bannières en regrettant une époque médiévale regrettée ».

Pour autant, dans certaines régions, la Royauté du Christ a pu prendre une dimension identitaire face à l’épreuve. C’est ce qu’a expliqué le père Ralph Chamoun, prêtre maronite, en évoquant le Liban.Dès le XIXe siècle, en effet, le Christ Roi a été institué au Liban dans un contexte de persécutions des maronites par les Ottomans. Un patriarche avait décidé en 1870 d’ajouter à la litanie du Sacré-Cœur « le Christ Roi des nations » et de supprimer l’image du sultan des processions. Dans un contexte de martyrisation continue, les Maronites se sont attachés petit à petit au Christ Roi. Aujourd’hui encore, dans un pays exsangue, ravagé par les persécutions religieuses et la ruine, cette fête a porté une forte charge identitaire. Le père Ralph Chamoun l’a résumé ainsi : « voir dans le Seigneur un roi, un maître absolu face aux nations qui nous refusent. Il donne la force d’être fort face à ce monde, être résilient, c’est cela le témoignage du Christ Roi, pour le Liban et toute la chrétienté. »

Au terme de cette soirée dense, une intuition s’est imposée : la Royauté du Christ n’est pas un thème du passé, encore moins un vestige médiéval, mais une lumière offerte pour relire les crises de notre temps. Tous les intervenants, chacun depuis son domaine – réflexion philosophique, engagement spirituel, expérience militaire, héritage historique ou témoignage venu d’Orient – ont rappelé que le Royaume du Christ n’est ni un programme politique ni une nostalgie, mais une réalité vivante qui transforme les cœurs avant de toucher les structures.Dans un monde qui semble osciller entre inquiétude, fragmentation et perte de sens, cette soirée a montré qu’il existe encore des femmes et des hommes décidés à reconnaître une souveraineté plus haute, non pour dominer, mais pour servir. Le Christ Roi n’appelle pas à la conquête mais à la fidélité, pas au repli mais à la conversion, pas au pouvoir mais à la vérité.C’est ce que résume la parole de saint Paul, rappelée pour conclure : « Le Règne de Dieu n’est pas à venir, car il a déjà commencé. »

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