Ce constat brutal, porté par une élue attachée à son patrimoine religieux, résume l’urgence qui secoue aujourd’hui la petite commune de Plesder et malheureusement de nombreuses autres villes et villages de France. En Ille-et-Vilaine, la maire Évelyne Simon-Glory ne veut plus et ne peut plus attendre : L’église Saint-Martin-de-Tours souffre de graves dégradations qui menacent désormais sa structure.
Nous avons interrogé la maire, qui se bat pour son église , elle revient sur la somme exorbitante précisée par un cabinet d’expertise de Rennes : » 1,5 million, c’est hors taxes. J’ai fait appel à un cabinet spécialisé dans ce domaine et c’est une première ébauche », explique-t-elle. » « Les intempéries successives ont aggravé une situation déjà fragile. Nous avons beaucoup souffert de la chaleur de l’été 2022, très chaud en 2023, et des pluies les années suivantes. J’ai pris conscience du problème depuis plusieurs années. Je suis maire depuis 2008. Je ne critique pas mes prédécesseurs, mais il y avait plusieurs travaux urgents sur les bâtiments communaux. L’église est arrivée en dernier. »

Catholique pratiquante, elle le dit sans détour : « Je suis de religion catholique, mon église, j’y tiens. L’église fait partie de mon patrimoine, c’est un repère de vie pour le village. Je suis née ici, mon église, c’est mon repère. »
La situation administrative complique encore davantage le dossier. L’église n’étant pas classée, les aides publiques sont très limitées. « On aura un peu de DETR, mais c’est insuffisant. Le ministère de la Culture ne pourra pas faire beaucoup plus « . Elle refuse cependant de céder au défaitisme « Je ne veux pas arriver à un point où on serait obligés de fermer mon église. J’ai déjà priorisé l’intervention sur les cloches , je ne veux pas attendre que l’on soit obligés de la fermer. »
De son coté , le père Pierre Lamballais du diocèse de Rennes , rattaché à six paroisses, est étroitement associé à la démarche. « Le père est au courant du compte rendu du cabinet d’architecte. Nous lui avons fait part de notre volonté de mettre cela en priorité, après les élections. Avoir son soutien moral, c’est important. » Mais au-delà du cas local, l’élue pose une question nationale : « Il faut redéfinir un cadre national. Ce n’est pas normal que les maires de France soient obligés de faire la manche. On ne se sent pas aidés. On s’interroge sur le rôle de l’évêché et des évêques. Ont-ils bien conscience de cela au niveau national ? »
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Et elle ajoute, avec émotion : « Que les églises soient désacralisées, c’est plus que dommage alors que nous sommes un pays chrétien, on doit respecter notre religion catholique. Sans faire de polémique, on voit des mosquées payées intégralement par les fidèles musulmans et nous, on doit faire la manche. Je suis née ici, mon église, c’est mon histoire et mon repére de vie »Avant de conclure : « Si je me bats pour cette église, c’est aussi un témoignage je ne veux pas renier ma foi, et ce n’est pas incompatible avec le fait d’être élue de la République. »
Au-delà du cas de Plesder, l’histoire de cette église en péril, met en lumière une question qui dépasse largement les frontières d’un village breton. Depuis des années, des centaines de communes rurales alertent sur l’impossibilité financière d’entretenir seules leurs églises, pourtant au cœur de l’identité et de l’histoire de France.Ce dossier révèle aussi une autre réalité : le sentiment d’abandon que ressentent de nombreux élus face à un système d’aides devenu trop complexe et trop pauvre. Les maires, premiers dépositaires de ces lieux sacrés, se retrouvent à organiser des souscriptions, des appels à dons , des collectes …etc comme si le patrimoine religieux français devait survivre uniquement par des dons privés et le système D.

L’Association des maires de France, et David Lisnard, son président, s’est déjà dit prêt à collaborer à une vaste réflexion nationale pour préserver les églises communales et définir un cadre d’intervention clair et durable.
La responsabilité ne peut plus reposer uniquement sur les épaules des communes isolées. Le ministère de la Culture doit entendre la détresse des territoires ruraux et repenser un modèle d’aide réellement adapté aux besoins patrimoniaux du pays. Quant à l’Église de France, une question s’impose : nos évêques mesurent-ils pleinement l’ampleur de la crise et la rapidité avec laquelle disparaissent ces lieux de culte qui structurent encore nos villages ? Il ne s’agit pas de polémique, mais de lucidité.Une mobilisation concertée, nationale et durable, devient indispensable. Alors, où en sommes-nous ? Et surtout : quand cela bougera-t-il enfin ?


