l’Église célèbre la mémoire de saint Ambroise de Milan, évêque et docteur de l’Église. Sa figure demeure l’une des plus lumineuses de l’Occident chrétien, où se rencontrent une intelligence juridique rare, un sens aigu du gouvernement et une fidélité absolue à l’Évangile.Cet avocat romain, promis à une brillante carrière administrative, avait tout pour réussir dans les rouages de l’Empire. Gouverneur de la province de Milan, il ne connaissait encore du christianisme que son rayonnement moral et culturel. C’est pourtant au cœur de cette fonction publique qu’il fut saisi par le Christ. Catéchumène, il n’aspirait à rien d’autre qu’une conversion humble ; Dieu en décida autrement. Par acclamation populaire, il est appelé à devenir évêque de Milan. Baptisé, ordonné et consacré en quelques jours, Ambroise se met à l’œuvre. Il le fait avec l’énergie des grands, mais aussi avec la patience des saints.
Son épiscopat se déroule dans une époque troublée. Les empereurs changent, l’ariennisme revient, les foules s’échauffent. Ambroise demeure, ferme sur la foi, soucieux de la paix sociale. En 390, après le massacre de Thessalonique ordonné par l’empereur Théodose, l’évêque de Milan accomplit un geste resté dans l’histoire : il interdit à l’empereur l’accès de la cathédrale tant qu’il ne se serait pas soumis à la pénitence publique. L’empereur obéit. Après des mois de repentir, Théodose renonce même à son privilège de communier dans le sanctuaire : il se tient désormais « au milieu des laïcs ». La leçon est claire : l’Église n’est pas une cour impériale, mais le lieu où Dieu purifie les cœurs.
Saint Augustin, encore païen, observe tout cela. Il écoute en cachette les homélies de l’évêque, admire son art de la parole, s’émerveille de sa sagesse. La conversion du jeune rhéteur doit beaucoup à ces prédications et au témoignage d’une Église priante, chantant d’une seule voix. Benoît XVI le rappelait : Ambroise a introduit dans la liturgie latine l’usage des hymnes chantées, « à la fois prières, actions de grâce et résumés du dogme ». Beaucoup nous accompagnent encore aujourd’hui, dont le splendide Aeterne rerum Conditor.
Ambroise fut un maître spirituel. Il enseignait aux catéchumènes « l’art de vivre bien afin d’être bien préparés aux grands mystères christiques ». La Lectio Divina en Occident doit beaucoup à son intuition : lire l’Écriture en silence, la ruminer, la laisser modeler la vie. Augustin note sa surprise de le voir lire mentalement : à l’époque, la lecture se faisait à haute voix. Ce silence nourrissait la prédication, car, disait le pape : « De fait, la catéchèse est inséparable du témoignage de vie ». Le pasteur ne doit jamais paraître « un acteur interprétant un rôle ». Il appuie sa tête sur le cœur du Maître, jusqu’à adopter son mode de penser, de parler et d’agir.Ambroise mourut la nuit du Vendredi saint, les bras en croix. Dans ce geste silencieux, il livrait son ultime catéchèse : participer à la mort et à la résurrection du Seigneur.
Aujourd’hui encore, il demeure un protecteur chéri. Les apiculteurs se réclament de lui, tant l’image de la ruche dit bien sa manière de gouverner : ordonner, unir, laisser circuler la douceur. Le diocèse aux Armées françaises l’a choisi comme patron, reconnaissant en lui non seulement le théologien, mais l’administrateur sage, capable de maintenir la paix sans renoncer à la vérité.À l’héritage d’Ambroise appartient aussi cette maxime, simple et forte, toujours actuelle :
« Lorsque la prière est trop longue, elle se répand souvent dans le vide mais, lorsqu’elle devient rare, la négligence nous envahit ».Saint Ambroise de Milan rappelle ainsi que la foi s’enracine dans la prière, dans le courage du gouvernement et dans l’humilité du cœur. Une leçon précieuse pour l’Église, pour nos cités, et pour nos vies.
Avec Nominis


