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5 € pour sauver son âme : pourquoi la cathédrale Notre-Dame de Paris doit être payante

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Le 8 décembre 2025, jour de l'Immaculée Conception, cela fera un an que Notre-Dame de Paris a rouvert ses portes après l’incendie. Alors faut-il faire payer l’entrée de la cathédrale ? La proposition de la ministre Rachida Dati tient la route

Par Philippe Marie

La fréquentation de la cathédrale de Paris bat des records depuis sa réouverture. En un an, plus de 11 millions de visiteurs ont franchi ses portes, un chiffre qui dépasse largement celui de la plupart des grands musées français. Ce n’est pas un flux discret, c’est une marée humaine. Chaque jour, des files s’étirent sur le parvis, des groupes guidés se succèdent, les appareils photo se lèvent, les téléphones filment. Difficile de venir prier dans le calme, alors inviter ces millions de pèlerins de l’instant aux coûts de l’entretien ne semble pas une hérésie.Au lieu de crier au scandale, il conviendrait de regarder ces faits avec réalisme.

Certains prélats, Monseigneur Ulrich, archevêque de Paris, en tête, réclament que l’accès demeure totalement gratuit, au nom d’une vision idéalisée de l’accueil fait par l’Église, tandis que d’autres appellent à assumer une évidence : Notre-Dame n’est pas seulement un sanctuaire, elle est aussi un monument national visité par des millions de touristes, plus en quête d’un cliché photo que d’une messe.Pour comprendre le sens de la proposition , il faut donc partir de la situation réelle. Environ 90 % des visiteurs de Notre-Dame ne viennent pas pour prier, mais pour admirer l’architecture, les vitraux, la nef, l’histoire. Ils entrent comme on entre au Louvre ou au Château de Versailles, avec le même émerveillement esthétique, parfois avec le même appareil photo à la main. Rappelons que Notre-Dame n’est pas une idée abstraite, mais une réalité matérielle. La cathédrale exige des vigiles ,du personnel d’accueil et beaucoup d’autres bénévoles sans compter les couts énormes de l’entretien et de la restauration de l’infrastructure architecturale. …Ignorer cela reviendrait à confondre spiritualité et magie budgétaire. La beauté a un coût, et la responsabilité chrétienne consiste aussi à en assurer la sauvegarde.

Dans ce contexte, demander 5 € aux visiteurs touristiques n’est ni abusif ni scandaleux. Les fidèles qui viennent pour la messe, la confession ou la prière silencieuse doivent évidemment continuer d’entrer librement. La distinction est simple, juste et habituelle ailleurs. Elle ne porte atteinte à personne, elle protège le cœur liturgique, tout en assumant la dimension patrimoniale.

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Les opposants convoquent aussitôt Paul Claudel : « la conversion au pied d’un pilier ». L’épisode est magnifique, et l’on souhaiterait qu’il se reproduise tous les jours. Le 25 décembre 1886, adolescent agnostique, Claudel entra dans la cathédrale pour entendre les vêpres et fut touché soudainement par la foi. « En un instant, mon cœur fut touché et je crus ». Mais on ne peut bâtir une politique patrimoniale sur un seul miracle de conversion. On peut en rêver, mais il ne fonde pas un modèle économique.

Et si l’on suit jusqu’au bout cet argument, une évidence apparaît : cinq euros pour une conversion de l’âme, ce n’est pas cher payé , Paul Claudel les aurait certainement payé et qui ne paierait pas 5 € pour sauver son âme ?

De plus, l’universalisme de l’Église n’a rien à prouver sur cet édifice si particulier, il se trouve dans les sacrements, dans l’Évangile, dans la liturgie, non dans une injonction à la gratuité permanente et toutes les autres églises de la capitale et de France sont gratuites. La charité n’a jamais signifié l’irresponsabilité. L’Église n’a pas à s’excuser d’entretenir la maison de Dieu. Elle doit le faire avec dignité, et les visiteurs peuvent y contribuer modestement.L’exemple international est clair. À Cologne, on paie pour accéder au trésor. À Florence, l’entrée du Duomo est tarifée. À Westminster Abbey ou à Canterbury, les visiteurs paient un billet, tandis que prier reste gratuit. Ce modèle n’a détruit aucune vocation. Il a permis au contraire la sauvegarde des lieux.

Ce qui choque vraiment, c’est l’idée inverse : voir des millions de touristes se presser, se photographier, acheter des souvenirs, tout en estimant que la cathédrale doit rester gratuite comme si elle s’entretenait d’elle-même.Faire payer les touristes étrangers, qui viennent par millions et s’émerveillent, n’est pas une faute morale. C’est une évidence.Cinq euros, pour marcher sous les voûtes immortelles, pour sentir la pierre, pour écouter une messe grégorienne, pour découvrir ce que Claudel a vu, cinq euros pour espérer une étincelle dans une âme, cinq euros pour sauver son âme ?

Notre-Dame mérite mieux que des illusions. Elle mérite qu’on la défende, concrètement, et qu’on la soutienne. Ceux qui la visitent peuvent, eux aussi, participer. C’est une forme d’offrande. C’est un acte de respect.

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