À l’approche de la fin de l’Avent, l’attention au Vatican ne se limite pas aux célébrations liturgiques de Noël. Un autre rendez-vous concentre les regards : le consistoire extraordinaire convoqué par Léon XIV pour les 7 et 8 janvier. Il s’agit du premier de son pontificat, et son importance dépasse largement le cadre formel d’une réunion institutionnelle.Les cardinaux, convoqués dès le 7 novembre par le doyen Giovanni Battista Re, sont attendus à Rome l’après-midi du premier mercredi de l’année, puis le lendemain matin pour une concélébration à l’autel de la Chaire, dans la basilique Saint-Pierre. Si la convocation d’un consistoire extraordinaire relève pleinement des prérogatives du Pontife, l’absence initiale de toute motivation officielle avait surpris. Cette réserve est désormais levée par une lettre « de Noël » adressée personnellement par Léon XIV à l’ensemble des cardinaux, dans laquelle il fixe l’agenda et l’esprit de la rencontre.
Ce geste marque une rupture nette avec le style du pontificat précédent. Sous François, le collège cardinalice avait vu son rôle progressivement marginalisé, le gouvernement de l’Église reposant davantage sur un cercle restreint de collaborateurs, le fameux conseil des cardinaux, d’abord C9 puis C6.
Même lors de la convocation de tous les cardinaux en 2022 autour de la constitution apostolique Praedicate evangelium, les marges de discussion avaient été limitées, le texte étant déjà entré en vigueur. Cette mise à l’écart du Sacré Collège avait été l’un des points les plus critiqués lors des congrégations préconclave.Conscient de cet héritage, Léon XIV a voulu dès les premiers jours de son pontificat restaurer un lien fort avec les cardinaux. Deux jours après son élection, il avait exprimé son intention de les rencontrer régulièrement et de leur redonner leur rôle de principaux collaborateurs dans le gouvernement de l’Église universelle.
Le consistoire de janvier apparaît comme la concrétisation de cette promesse, six mois après le début de son pontificat
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Dans sa lettre, le Pape demande aux cardinaux de se préparer par la relecture de deux textes majeurs du pontificat précédent, Evangelii gaudium et Praedicate evangelium. Ce choix n’est pas anodin. Il invite à une réflexion de fond sur la vision de l’Église, sur la mission évangélisatrice, mais aussi sur l’exercice du pouvoir et le rôle de la Curie romaine. Léon XIV évoque également la synodalité, qu’il ne rejette pas, mais qu’il interprète dans une perspective clairement orientée vers la communion, et non vers une simple multiplication de processus ou de structures.C’est dans ce cadre qu’apparaît l’un des thèmes les plus sensibles du consistoire : la liturgie.
Depuis la promulgation de Traditionis custodes en 2021, la question du rite ancien est devenue un point de fracture majeur au sein de l’Église. Restrictions, fermetures de communautés, tensions entre évêques et fidèles ont profondément marqué ces dernières années. Pour de nombreux catholiques attachés à la liturgie tridentine, ce consistoire est perçu comme un moment décisif. Sans nourrir d’illusions excessives, beaucoup espèrent un changement de ton, une écoute réelle de leur situation et un assouplissement dans l’application du texte, au nom de la paix ecclésiale et de la communion.
Le consistoire de janvier pourrait ainsi devenir un espace de « confrontation sereine » entre différentes sensibilités ecclésiales, non seulement sur la liturgie, mais plus largement sur la manière de gouverner l’Église.
En choisissant de consulter largement les cardinaux, Léon XIV envoie un signal clair : celui d’un pontificat qui entend rompre avec une gestion perçue comme verticale et solitaire, pour renouer avec une collégialité réelle.
Selon la note officielle du Vatican, la rencontre sera marquée par des moments de communion et de fraternité, ainsi que par des temps de réflexion et de partage destinés à favoriser un discernement commun et à offrir conseil et soutien au Pape dans l’exercice de sa responsabilité. Une formulation qui confirme l’orientation choisie : non pas gouverner seul, mais gouverner avec.À l’heure où de nombreuses blessures restent ouvertes dans l’Église, notamment sur le terrain liturgique, les 7 et 8 janvier apparaissent ainsi comme une date charnière. Pour les cardinaux, pour les fidèles, et en particulier pour ceux qui attendent des signes d’apaisement après des années de tensions, ce consistoire pourrait bien marquer le début d’un nouveau style de gouvernement, fondé sur l’écoute, la communion et la responsabilité partagée.


