L’affaire Michel Santier connaît un tournant judiciaire et politique. Selon France Bleu Normandie, le sénateur socialiste de la Manche, Sébastien Fagnen, a adressé le lundi 25 août 2025 un courrier au procureur de la République de Coutances. Il y relaie la demande de l’association « Mouv’Enfants », qui dénonce l’absence de suites judiciaires contre l’ancien évêque de Créteil.Dans les années 1990, Mgr Michel Santier était prêtre et directeur de l’école de la foi à Coutances. C’est dans ce cadre qu’il a imposé à de jeunes adultes de se dénuder durant des confessions. Ces pratiques abusives, révélées en 2019, ont été reconnues par lui-même. Nommé évêque de Créteil en 2007, il a présenté sa démission en 2021, avant d’être discrètement envoyé à l’abbaye de Saint-Sauveur-le-Vicomte (Manche).
« Une telle absence [de réponse pénale] est tout autant surprenante que dommageable pour les victimes », écrit le sénateur Fagnen. Et d’ajouter : « Michel Santier ne peut s’exonérer de ses responsabilités devant la justice de notre pays. »
S’il est aujourd’hui visé par un procès canonique interdiocésain, aucune procédure civile n’a été ouverte. C’est ce vide qui révolte les associations. L’un de ses responsables, Arnaud Gallais, parle d’un « crachat au visage des victimes ».Pour le sénateur, seule une enquête pénale permettra « l’éventuelle identification d’autres victimes, puis la tenue d’un procès dont les vertus réparatrices sont essentielles ». Et de conclure : « La République doit ce devoir de vérité et cette quête de justice aux victimes, notamment les plus vulnérables. »Au-delà de la demande judiciaire, l’affaire Santier continue de susciter malaise et interrogations. Dans le Val-de-Marne, plusieurs prêtres auraient eu connaissance des agissements de leur évêque. Certains nient aujourd’hui toute information, malgré des témoignages convergents. Ce silence mine la crédibilité du discours ecclésial.« Le cri des victimes nous oblige, et regarde vers Dieu », écrivait le pape François en 2018. Le cardinal Robert Sarah, lui, rappelait : « Ce n’est pas la médiatisation des péchés qui détruit l’Église, mais leur dissimulation. »
À cela s’ajoutent les relations de Mgr Michel Santier, qui avait multiplié les rencontres avec certains imams controversés, proches des Frères musulmans et parfois surveillés par les autorités.
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Une proximité qui, avec le recul, ne peut qu’interroger. Mais il faut rester vigilant : si la justice doit passer et si les victimes ont droit à la vérité, il serait dangereux que cette affaire serve de prétexte à instrumentaliser la souffrance des blessés contre l’Église elle-même.
Car certains font de ces zones d’ombre un paravent pour masquer la beauté du message chrétien et la lumière de l’Évangile, réduisant le chemin de foi à la simple misère humaine de quelques-uns. L’affaire Santier ne saurait être présentée comme le symbole d’un « double échec » global. L’Église, marquée par des faiblesses, a aussi engagé des procédures canoniques. Mais un procès civil apparaît désormais nécessaire, afin que la justice républicaine fasse toute la lumière et que la parole des victimes soit reconnue.La vérité est une exigence évangélique : elle seule permet la purification et la reconstruction, à condition qu’elle ne soit pas dévoyée par des idéologies ou des agendas militants. Car l’Église ne se résume pas aux fautes de certains clercs, elle reste avant tout le signe visible de la grâce, et c’est cette réalité qu’il ne faut jamais perdre de vue.