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Affaire de Sloane Avenue : du pape François au pape Léon XIV, une nouvelle phase d’un procès marqué par une communication « hésitante » du Vatican

Cardinal  Becciu - DR
Cardinal Becciu - DR
Le pape Léon XIV se retrouve à gérer un héritage judiciaire et médiatique lourd, marqué par les choix de son prédécesseur

Au cœur du débat, des messages compromettants qui jettent une lumière nouvelle sur le déroulement du premier procès.Le procès en appel concernant la gestion des fonds de la Secrétairerie d’État, et en particulier l’achat de l’immeuble de Sloane Avenue à Londres, s’est ouvert dans un climat bien différent de celui du jugement de première instance. La cour d’appel a accepté d’entendre les contestations de la défense du cardinal Angelo Becciu et de plusieurs co-accusés, parmi lesquels Fabrizio Tirabassi, Raffaele Mincione et Enrico Crasso, mettant en cause le rôle du promoteur de justice Alessandro Diddi.

La controverse remonte à des échanges de messages de Genoveffa Ciferri, proche de Mgr Alberto Perlasca, ancien collaborateur devenu accusateur clé dans l’affaire. Dans la nuit du 26 novembre 2022, elle avait envoyé pas moins de 126 messages à Alessandro Diddi. Pourtant, seuls huit d’entre eux avaient été versés au dossier, les autres ayant été masqués. Cette sélection a nourri les soupçons d’opacité et renforcé la position de la défense, qui estime que la première procédure a été entachée d’anomalies.Ces messages, ainsi que d’autres conversations impliquant Francesca Immacolata Chaouqui, ont depuis été rendus publics et transmis à l’ONU. Ils ont conduit le Vatican, en juin dernier, à ouvrir une enquête parallèle visant notamment Chaouqui pour trafic d’influence, faux témoignage et subornation.

La décision de la cour d’appel ne signifie pas un acquittement, mais elle relance la procédure en permettant un nouvel examen des conditions dans lesquelles le premier procès a été conduit.

Le promoteur de justice Alessandro Diddi dispose désormais de deux jours pour présenter ses observations ou décider de se retirer, afin d’éviter une décision de la Cour de cassation vaticane, composée de plusieurs cardinaux de premier plan.Ce rebondissement met aussi en lumière des choix institutionnels hérités du pontificat précédent. En 2021, le pape François avait modifié par motu proprio les règles de fonctionnement de la justice vaticane, autorisant le promoteur de justice à intervenir dans toutes les instances. Une mesure critiquée par plusieurs canonistes, qui y voient un risque de déséquilibre du procès et une atteinte aux droits de la défense.

Alors que la justice vaticane s’efforce de reprendre la main, la communication institutionnelle du Saint-Siège peine à convaincre. Vatican News, sous la direction éditoriale d’Andrea Tornielli, a publié un article qui minimise fortement l’importance des messages Ciferri-Chaouqui, allant jusqu’à qualifier de « simple narration » les accusations de manipulations. Ce récit partiel, qui omet de mentionner l’ouverture de l’enquête de juin dernier, soulève de nouvelles critiques sur la manière dont les médias du Vatican présentent le dossier.

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Le pape Léon XIV se retrouve à gérer un héritage judiciaire et médiatique lourd, marqué par les choix de son prédécesseur. L’issue du procès en appel sera scrutée de près, tant pour ses implications financières que pour sa valeur de test sur la crédibilité de la justice vaticane

L’affaire de Sloane Avenue, qui devait au départ illustrer la volonté de transparence du Vatican, s’est transformée en un long chemin judiciaire et institutionnel. Avec l’ouverture de l’appel, nous entrons dans une nouvelle phase : non seulement la cour devra examiner les zones d’ombre du premier procès, mais elle devra aussi donner des signes clairs que la justice vaticane est capable de fonctionner avec impartialité et crédibilité.

Au-delà de l’aspect strictement judiciaire, la communication officielle du Saint-Siège apparaît comme l’un des points faibles de ce dossier. Vatican News, en cherchant à minimiser ou à orienter certains éléments, donne l’impression de défendre une version institutionnelle plutôt que d’informer avec transparence. Cette posture fragilise la confiance des fidèles et nourrit le soupçon, alors que l’Église a précisément besoin de clarté et de vérité.Sous le pontificat de Léon XIV, une opportunité s’ouvre : rompre avec les ambiguïtés de la période précédente et établir une culture de communication plus sobre, plus fidèle aux faits et moins partisane. Si le procès en appel permet de rétablir certaines garanties et si la communication ecclésiale sait faire preuve d’humilité et de rigueur, alors cette douloureuse affaire pourra au moins servir de leçon pour l’avenir de la justice et de la crédibilité du Vatican.

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