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Au Mali aussi, les chrétiens sont traqués, étouffés par l’avancée jihadiste

vue arienne de Bamako - Depositphotos
vue arienne de Bamako - Depositphotos
Dans ce pays à 94 % musulman où la charia s’impose peu à peu par la force, la minorité chrétienne, déjà fragile, se retrouve aujourd’hui pourchassée, affamée et privée de ses terres. L’encerclement de Bamako par les jihadistes et l’annulation du grand pèlerinage marial de Kita sonnent comme un cri d’alarme

Après le retrait des forces françaises, européennes et onusiennes, le Mali est en train de tomber dans les mains des jihadistes du JNIM, affiliés à Al-Qaïda. Ni l’armée malienne ni les mercenaires russes n’ont réussi à stopper leur progression. Résultat, les combattants islamistes contrôlent désormais de vastes portions du territoire et encerclent même la capitale Bamako.En 2020 puis en 2021, deux coups d’État avaient porté les militaires au pouvoir. La population, lassée par la pauvreté et l’insécurité, espérait alors que l’armée ferait mieux que les autorités civiles renversées. Les Maliens attendaient moins de corruption et plus d’efficacité face aux séparatistes touaregs et, surtout, face à la menace jihadiste qui ne cessait de s’étendre. Depuis 2013, cette menace n’avait été contenue que grâce à l’action de la Minusma, des troupes françaises de l’opération Barkhane et des forces de l’Union européenne.

La junte du général Assimi Goïta avait accueilli avec soulagement le départ des Français et des Européens en 2022 puis celui de l’ONU en 2023. Elle accusait ces forces étrangères de ne pas être parvenues à vaincre les jihadistes. Le Mali allait, disait-elle, gérer seul ses crises, libéré de toute ingérence, soutenu par la Russie pour la logistique, les armes, l’entraînement et les combattants. Dès 2021, la junte avait fait appel aux mercenaires russes de Wagner, remplacés en juin dernier par l’Africa Corps, une autre société militaire privée russe placée sous le contrôle du ministère de la Défense.Mais ce pari s’est écroulé. Après le départ des forces internationales, les jihadistes ont rapidement regagné du terrain. En 2024, ils frappaient déjà le centre du pays. En 2025, ils se sont avancés encore plus au sud jusqu’à encercler Bamako. Leur stratégie, pour l’instant, n’est pas nécessairement la conquête de la capitale mais son isolement. Depuis septembre, ils bloquent les importations de carburant, attaquent les convois de citernes, paralysent les activités économiques et provoquent la fermeture de nombreuses écoles.

Chaque avancée jihadiste renforce l’imposition brutale de la charia. Les témoignages se sont multipliés, décrivant des femmes battues pour avoir été vues tête nue, des amputations infligées pour vol et une ambiance de peur constante.

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Les chrétiens, environ un demi-million dans un pays de 22 millions d’habitants, deviennent invisibles, réduits au silence ou à la fuite. De nombreuses églises ont été incendiées, des familles chassées, des villages vidés de leurs habitants. Les jihadistes leur interdisent l’accès à l’eau et aux terres cultivables. Cette stratégie de terreur vise à provoquer la famine, l’exode, l’élimination silencieuse de communautés chrétiennes installées depuis des siècles.Avec l’avancée du JNIM, les zones autrefois relativement sûres ne le sont plus. La situation est devenue si grave que la Conférence épiscopale du Mali a annoncé, le 12 novembre, l’annulation du 54ᵉ pèlerinage national au sanctuaire marial de Kita. Situé pourtant à moins de 200 kilomètres de Bamako, le sanctuaire est aujourd’hui inaccessible en raison du manque de carburant, de l’insécurité, du risque d’attentats et de la multiplication des enlèvements.

Chaque année, des milliers de fidèles s’y rendaient, y compris depuis les pays voisins. Le sanctuaire de Notre-Dame du Mali, fondé en 1888 par les Spiritains, est le cœur historique de l’évangélisation de la région. La statue en terre cuite de la Vierge, réalisée par un missionnaire, y est toujours vénérée. Depuis la fin du Concile Vatican II, en 1965, Kita était devenu un lieu de pèlerinage national. Un nouveau sanctuaire, plus vaste, avait été inauguré en 1994 face à l’affluence grandissante.L’édition 2025 devait se tenir les 22 et 23 novembre sur le thème « Pèlerin de l’espérance ». Mais si les jihadistes parviennent à prendre le contrôle total du pays, celui de 2024 pourrait bien rester le dernier pèlerinage marial de l’histoire du Mali.

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