Au lendemain de la solennité de la Toussaint, l’Église célèbre la commémoration de tous les fidèles défunts, un jour de prière et d’espérance tourné vers la vie éternelle. Ce jour liturgique, distinct de la fête du 1er novembre, est consacré à la mémoire de ceux qui nous ont précédés dans la foi. Comme le rappelle le Martyrologe de Solesmes, c’est le « jour où l’Église intercède pour ses membres endormis dans la mort et qui souffrent dans une ultime purification avant d’entrer dans la Gloire ».
La journée des défunts est à la fois une journée de commémoraison et une journée d’intercession. On fait mémoire de ceux qui nous ont quittés, et l’on prie pour eux. Cette prière s’enracine dans la conviction profonde que la mort ne rompt pas la communion entre les membres du Corps du Christ.L’Église enseigne que les âmes appelées à la vision de Dieu passent par une purification nécessaire pour être pleinement unies à Lui. Notre prière, nos sacrifices et nos œuvres de charité peuvent les soutenir dans cette ultime étape, en vertu du mystère de la communion des saints. Celle-ci exprime le lien spirituel et indestructible entre les vivants et les morts : dans le Christ, une véritable solidarité unit les membres de l’Église terrestre, les âmes du purgatoire et les saints du ciel.
Le 2 novembre, chaque fidèle est donc invité à se recueillir, à visiter les cimetières, et à prier pour les défunts. Prier pour les morts, c’est poser un acte de foi et d’amour, une affirmation silencieuse de l’espérance chrétienne : la vie n’est pas détruite, elle est transformée.Pour que la Toussaint, instituée en France en 835, conserve son sens propre de fête de la gloire céleste, saint Odilon, abbé de Cluny, décida vers l’an 1000 d’instaurer, dans tous les monastères de l’ordre, une messe solennelle pour les défunts le lendemain, le 2 novembre. Cette commémoration, d’abord limitée à la famille monastique, s’étendit rapidement à toute la chrétienté sous l’influence du puissant réseau clunisien.À cette époque, la doctrine du purgatoire n’était pas encore pleinement formulée, mais les moines de Cluny exprimaient déjà la foi de l’Église : celle d’un Dieu miséricordieux, qui purifie et sauve. Le saint curé d’Ars résumera plus tard ce mystère avec des mots simples : « Le purgatoire est l’infirmerie du Bon-Dieu. »
Au XVe siècle, les Dominicains d’Espagne introduisirent la pratique de célébrer trois messes le jour des défunts, en signe d’intercession renouvelée. Ce privilège fut étendu à toute l’Église par le pape Benoît XV en 1915, en mémoire des innombrables victimes de la Première Guerre mondiale, afin que les prêtres puissent offrir le Saint Sacrifice pour les âmes de tous les défunts.Aujourd’hui encore, l’Église continue de prier avec ferveur pour ses enfants défunts. Le sanctuaire de Notre-Dame de Montligeon, en Normandie, demeure un lieu privilégié où des fidèles du monde entier confient leurs proches à la miséricorde divine. Les communautés paroissiales organisent des liturgies, et de nombreux fidèles se rendent dans les cimetières pour prier au pied des tombes, souvent en famille, un chapelet à la main.
Ce geste humble est un acte de foi : croire que nos morts vivent en Dieu, croire que notre prière peut les accompagner vers la lumière éternelle, croire enfin que la mort ne sépare pas ceux que le Christ a unis.La sainte Mère Église, fidèle à sa mission d’intercession, implore Dieu « pour les âmes de tous ceux qui se sont endormis dans l’espérance de la résurrection, mais aussi en faveur de tous les hommes depuis la création du monde, dont le Seigneur seul connaît la foi », afin qu’ils rejoignent « la communauté des habitants du ciel » et jouissent du bonheur éternel.
Et, selon la belle parole de saint Ambroise :
« Nos morts ont été envoyés non pas loin de nous, mais avant nous — eux que la mort ne prendra pas mais que l’éternité recevra. » Ainsi, la commémoration du 2 novembre n’est pas une journée de tristesse, mais une fête d’espérance, celle de la fidélité de Dieu et de la communion sans fin entre les vivants et les morts dans le Christ ressuscité.
Avec nominis


