Depuis la mort du pape François le 21 avril, les manœuvres et stratégies en vue du prochain conclave, qui débutera le 7 mai, alimentent les analyses et les soupçons. Mais cette fois, ce n’est pas un cardinal qui est mis en cause, mais le président français lui-même. Emmanuel Macron, déjà critiqué pour ses positions clivantes sur la laïcité, se retrouve accusé par plusieurs titres italiens de chercher à influencer l’élection du futur pape.
Le quotidien conservateur La Verità n’y va pas par quatre chemins : « Macron veut même choisir le pape », titrait-il mercredi 1er mai. Le journal Libero ironisait : « Il s’incruste même dans le conclave », tandis que Il Tempo dénonçait « la grandeur sans limites » du président français. Ces titres évoquent un activisme présidentiel qui franchirait les murs du Vatican.
Au cœur de la polémique : deux repas organisés à Rome par Emmanuel Macron dans les jours qui ont suivi la mort du souverain pontife. Le 25 avril au soir, le chef de l’État aurait dîné dans un restaurant réputé de la Ville éternelle avec Andrea Riccardi, fondateur de la Communauté de Sant’Egidio, acteur influent du dialogue diplomatique du Saint-Siège. Le lendemain, il aurait reçu à l’ambassade de France auprès du Saint-Siège quatre cardinaux français : Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, souvent cité parmi les papabili ; Mgr Christophe Pierre, nonce apostolique aux États-Unis ; le cardinal Philippe Barbarin ; et Mgr François Bustillo, évêque d’Ajaccio.
Pour Libero, ce déjeuner aurait permis au président de sonder les intentions et les stratégies en vue du conclave. L’objectif ? Promouvoir la candidature du cardinal Aveline. « S’il parvenait à faire élire son favori, Macron retrouverait du poids sur la scène internationale », écrit le journal, qui rappelle au passage l’épisode humiliant où Donald Trump aurait ostensiblement évité Emmanuel Macron lors d’un récent échange avec Volodymyr Zelensky dans la basilique Saint-Pierre.
Il Tempo va encore plus loin : « Après avoir été rejeté sans ménagement des discussions entre Trump et Zelensky, Macron veut entrer au moins par la fenêtre de la chapelle Sixtine ». Selon lui, la candidature de Jean-Marc Aveline « connaît une forte croissance » au Vatican, et le président français aurait interrogé les cardinaux sur la manière de « construire un consensus » autour de son compatriote.
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Ces affirmations interviennent dans un contexte où les relations entre Emmanuel Macron et le gouvernement italien de Giorgia Meloni sont tendues. Plusieurs observateurs interprètent cette soudaine effervescence médiatique comme le reflet d’un agacement politique plus large, nourri par la crainte d’une ingérence française dans une élection qui, selon le droit canonique, doit rester sous l’inspiration du Saint-Esprit, non sous celle d’intérêts diplomatiques.
Aucune source officielle n’a confirmé que le président aurait évoqué l’élection pontificale avec ses interlocuteurs ecclésiastiques. Mais la simultanéité des rencontres et la personnalité des convives suffisent, pour certains titres italiens, à nourrir la méfiance. En Italie comme ailleurs, le conclave demeure un espace de silence, de prière, et de discernement. Et l’idée qu’un chef d’État séculier puisse y glisser ses préférences, même de manière indirecte, dérange profondément.À quelques jours de l’entrée en conclave des 133 cardinaux électeurs, cette controverse autour de Jean-Marc Aveline pourrait se retourner contre lui. Car si l’Église est appelée à être universelle, elle se méfie des nominations perçues comme orchestrées depuis les chancelleries.