Depuis 2000 ans

Conclave 2025 : quel pape aura à cœur de restaurer la dignité de la liturgie ?

DR
DR
À l’heure où la liturgie est trop souvent devenue un « laboratoire » pour les goûts personnels de prêtres ou de groupes, l’Église semble ouverte à tous, à toutes… et à n’importe quoi. Là où l’homme prétend façonner le culte à son image, c’est Dieu que l’on relègue au second plan.

Alors que le conclave s’ouvrira le 7 mai prochain pour élire le successeur du pape François, de nombreuses voix s’élèvent pour demander une restauration de la liturgie dans sa vérité et sa beauté. Le choix du futur pape engagera l’Église face à une crise liturgique profonde et persistante.Dans l’architecture divine du salut, la liturgie est bien plus qu’un rite : elle est le cœur battant de l’Église, le lieu où l’Épouse parle à son Époux, le Christ. La tradition nous enseigne que la liturgie anticipe les noces éternelles de l’Agneau, révélées dans l’Apocalypse, et qu’elle forme l’âme chrétienne à entrer, humblement, dans cette relation sponsale. Mais aujourd’hui, ce lien sacré est gravement fragilisé.

Trop souvent, la liturgie est traitée comme un atelier d’improvisation où prêtres, groupes paroissiaux, voire évêques, projettent leur subjectivité, imposent leurs préférences, au lieu de se laisser former par l’Église.

La Messe, censée élever l’âme, devient un spectacle, un exercice de créativité désordonnée. Les fidèles sont contraints de supporter des variations liturgiques arbitraires, d’assister à des célébrations où l’essentiel disparaît sous l’accessoire, où l’autel devient scène.Le résultat de cette dérive ? Un éclatement de l’unité liturgique. Chaque paroisse semble avoir son rite, ses chants, ses gestes, ses inventions. L’on passe d’un diocèse à l’autre comme d’un monde à l’autre. Ce constat douloureux se résume dans cette formule : « Église que tu visites, Messe que tu trouves. »

Mais cette prolifération d’initiatives individuelles cache une maladie plus profonde : celle des abus liturgiques. On déforme les gestes, on modifie les paroles, on trivialise le mystère. Les prescriptions du Concile Vatican II, contenues dans Sacrosanctum Concilium, sont trahies, voire ignorées. Seule subsiste, répétée comme un mantra, la notion de « participation active », souvent réduite à un activisme horizontal, coupé de toute transcendance.

C’est dans ce contexte déjà alarmant qu’est intervenue la mesure brutale du Motu Proprio Traditionis Custodes (2021), qui a déclenché une véritable persécution des fidèles attachés au rite ancien. Et pourtant, ces catholiques sont pleinement en communion avec l’Église. Loin de résoudre un problème inexistant, cette décision a semé la discorde, aboli l’apaisement amorcé par Summorum Pontificum, et ravivé une fracture douloureuse. Là où les évêques ne constataient aucune difficulté de communion, les messes traditionnelles ont été supprimées sans justification.

Lire aussi

Une telle logique idéologique, rigide et unilatérale, ne peut que scandaliser : si l’on appliquait le même raisonnement aux célébrations du rite réformé, combien d’abus devraient être sanctionnés avec la même sévérité ? Pourquoi ne s’acharne-t-on que sur les fidèles du rite ancien, qui célèbrent avec piété, beauté et fidélité ?En réalité, ce que cette crise révèle, c’est une perte de compréhension du sens même de la liturgie. On oublie qu’elle ne nous appartient pas. Elle n’est pas un espace d’expression personnelle, mais une œuvre de Dieu, un bien commun confié à l’Église. Priver des fidèles d’une forme liturgique qui les sanctifie n’est pas seulement injuste, c’est une rupture dans le tissu même de l’Église. Benoît XVI avait justement insisté sur l’importance de cette réconciliation entre l’ancien et le nouveau, entre le passé et le présent.

L’urgence est double : restaurer une unité liturgique fondée sur la vérité, et guérir l’ordinaire de la Messe réformée de sa mondanisation. Il est impératif de revenir à une application sérieuse de Redemptionis Sacramentum, et de redonner au chant grégorien, aux livres liturgiques approuvés, leur place centrale. Trop souvent, les assemblées chantent des textes banals, aux mélodies profanes, improvisés sans lien avec l’Évangile ni la tradition.

La liturgie est pourtant un instrument puissant d’évangélisation. Par elle, les fidèles font l’expérience, par leurs sens, de la majesté sanctifiante de Dieu.

Elle nourrit leur vie intérieure, les protège du relativisme ambiant, et les fortifie face à la sécularisation. C’est un rempart contre l’effondrement spirituel.Le prochain pontificat ne pourra éluder cette question. Il faudra réparer la blessure ouverte par des décisions injustes, permettre une large liberté pour la célébration du rite ancien, et envisager, pourquoi pas, un ordinariat traditionnel stable, garant de la paix et de la fidélité.Mais surtout, il faudra faire taire les expérimentations pour que l’Épouse puisse de nouveau parler d’une voix pure et claire à son Époux. Pour que l’Église redevienne ce qu’elle est : le sanctuaire de la beauté divine, et non l’atelier des goûts humains.

Recevez chaque jour notre newsletter !