Par Philippe Marie
Ils se disent catholiques, parfois même engagés, mais leur foi ressemble davantage à un bulletin de vote personnel qu’à une adhésion au Credo. Ils fréquentent les sacristies, signent des tribunes, animent des groupes « inclusifs », mais refusent l’Église dès lors qu’elle ne valide plus leurs caprices. Ce sont les catholiques de façade, ceux qui revendiquent un Dieu sur-mesure, là pour approuver toutes leurs déviances, mais surtout pas là pour recueillir le moindre témoignage d’amour, de conversion, de sacrifice. Leur religion est à leur image, confortable, plastique, sans croix ni exigence.
Ce sont les vrais fossoyeurs de l’Église. Ils ne l’attaquent pas de front, ils la vident de l’intérieur, en relookant la doctrine comme une vitrine d’émotions et de tolérance molle. Tout est réinterprété à la lumière de leur subjectivité. La morale sexuelle devient « exclusion », le martyre devient « fanatisme », l’Eucharistie devient « symbole ». La sainteté n’est plus un appel universel, mais une offense à ceux qui préfèrent leur propre loi à celle de Dieu.Ils lisent souvent La Croix, La Vie ou Pèlerin Magazine, et pour eux, le reste, c’est la « fachosphère ». Le reste, c’est Satan. Les sédévacantistes, les intégristes, les traditionnalistes, tous jetés dans le même sac. Pire encore : ceux qui croient vraiment en Dieu, car eux ne croient qu’en eux-mêmes. Tout ce qui rappelle la transcendance, l’adoration, le mystère, les dérange profondément. Ils veulent une Église qui se regarde dans le miroir, pas qui regarde vers le ciel.
Ils veulent des femmes prêtres, des messes LGBT, des migrants érigés en victimes expiatoires perpétuelles, comme si ces derniers étaient les seuls martyrs valides selon leur doctrine de pacotille. Tout ce qui s’enracine dans la Tradition leur est insupportable ; ils préfèrent une foi façonnée par les idéologies du monde plutôt que par l’Évangile du Christ.Ils se disent intellectuels ou théologiens, réfléchissent à tout, redessinent tout, avec leur fameuse façon « de vivre une foi dans le monde moderne ». Vade retro l’adoration, vade retro le sacré, vade retro le silence. La foi devient une expérience spirituelle à sa guise, un petit supplément d’âme subjectif, tant qu’il ne dérange ni l’emploi du temps ni la vie privée. Ils parlent de Dieu en sociologues, jamais en croyants.
Ils prient peu, communient beaucoup, et ne se confessent plus. Tout est émotion, rien n’est conversion.Ils ont érigé le respect de la création en dogme absolu, non par amour du Créateur, mais pour mieux l’oublier. L’écologie devient leur seul credo, leur nouvelle liturgie. L’Église doit être verte, mais surtout pas aux couleurs du Christ. Ils parlent de planète, jamais de salut, de biodiversité, jamais de péché, de climat, jamais de jugement dernier. Leur conversion est énergétique, jamais spirituelle. Ils prétendent sauver la terre, mais refusent de se laisser sauver par le Ciel, et de sauver les âmes.
Faut-il encore s’étonner ? Certains théologiens catholiques, comme Andrea Grillo, ne supportent plus la foi simple et eucharistique des saints comme Carlo Acutis. Dans un texte aussi méprisant que révélateur, ce professeur influent du réformisme liturgique , très influent sous François, ose qualifier l’adoration eucharistique de « théologie dépassée ». Voilà le cœur du problème : une Église vidée du sacré, où l’on préfère les slogans sociologiques aux miracles, et les théories desséchées à la foi vivante.
À l’intérieur de l’Église, des religieux accompagnent effectivement ce naufrage. Dans certains diocèses, au plus proche de la capitale, des prêtres qui se revendiquent prélats se conduisent comme des porcs, profitant de leur statut pour se vautrer dans le scandale et l’immoralité, dans l’impunité la plus totale. Personne n’ose les dénoncer. Pas les confrères, pas les évêques, pas les instances ecclésiastiques. La priorité semble être de préserver les apparences, de ne pas faire de vagues, de protéger l’institution… au détriment de la vérité et de la justice. Le silence complice est devenu un principe de gouvernement. Pourtant les révélations sont terribles mais la peur est là…la peur de le dire la Vérité haut et fort. Faudra t-il attendre une photo compromettante comme ce fut le cas pour Monseigneur Aupetit pour enfin décider de faire bouger les choses ?
Lire aussi
Et paradoxalement, alors même que certains sont protégés malgré leurs dérives notoires, d’autres affaires ont été montées en épingle et médiatiquement surexploitées. Il se dit, dans plusieurs milieux informés, que le rapport de la CIASE a été, dans sa réception, instrumentalisé, sur-utilisé, parfois biaisé, non pour faire toute la lumière sur les abus, mais pour affaiblir ce qu’il reste d’autorité dans l’Église.Au lieu de purifier, certains s’en sont servis pour délégitimer toute verticalité, toute transmission, et imposer une réforme structurelle radicale. Pour certains cela devait évidemment déboucher sur le sacerdoce féminin..seul « moyen » d’endiguer ces dérives.
À qui profite cette culpabilisation permanente et sélective ? À ceux qui rêvent d’une Église horizontale, déconnectée de la Tradition et de son histoire, où la figure du père est effacée au profit d’un consensus mou, où l’homme et la femme sont égaux jusque dans leurs organes génitaux, car parmi eux, certains sont favorables ou très compréhensifs à l’égard de la théorie du genre.
Et pendant ce temps, la doctrine est constamment repeinte à la couleur du jour. Les militants LGBT veulent une bénédiction de leurs unions ? On les leur accorde, ou on les « accompagne ». Les catholiques favorables à l’avortement ou à l’euthanasie se réclament de la dignité humaine, qu’ils redéfinissent selon des critères de confort et de consentement personnel, jamais selon sa nature divine. Tout devient négociable, rien n’est plus sacré. Même des prêtres, même des religieux tiennent ces discours dans des paroisses, dans des universités catholiques, sur des plateaux télé. Et l’on s’étonne que l’Église ne convertisse plus.
Surtout être inclusif, mais pas au point d’inclure les catholiques fidèles, la messe de toujours ou le Christ en personne, faut pas exagérer non plus !
Car dans la liturgie aussi c’est le grand effondrement. On ne célèbre plus pour Dieu, mais pour « parler à l’homme ». Le silence sacré est remplacé par le bavardage, la liturgie par des animations, le chant sacré par des prestations à la The Voice. Tout ce qui pouvait élever l’âme vers Dieu est supprimé pour ne pas heurter l’homme moderne. La messe devient un spectacle où l’on cherche l’émotion, pas la grâce. Comme si Dieu devait mériter notre attention. Comme si c’était à Lui de nous ressembler, et non l’inverse.Ce relativisme, cette foi personnalisée et édulcorée, ne sanctifie plus. Elle caresse, flatte, rassure, mais ne sauve plus. Elle ne convertit pas, car elle n’ose plus dire la vérité. Elle ne dérange plus, donc elle ne libère plus. Elle disparaît dans l’indifférence.Et que dire du père Guy Gilbert ? Connu pour son franc-parler, il a récemment présidé une messe à Nancy où il a modifié la prière eucharistique et appelé à l’ordination des femmes. Disons que c’est peut-être à mettre sur le compte de son âge avancé, mais tout de même : une telle dérive liturgique n’a provoqué aucune réaction du diocèse, comme si le sacrilège était devenu banal.
C’est le drame du catholicisme à la carte, qui transforme la foi en simple supplément d’âme, sans croix, sans confession, sans exigence...sans amour
Quand tout devient optionnel, plus rien n’a de sens. Quand la foi devient une variable d’ajustement, elle cesse d’être foi. L’Église n’a jamais été appelée à plaire, mais à enseigner, à sanctifier, à conduire vers le salut. Ceux qui la déforment de l’intérieur au nom de l’inclusion ou de la modernité sont des démolisseurs. Ils ne construisent pas un pont, ils creusent une tombe.Il faut aujourd’hui du courage. Le courage de dire non à cette religion molle. Le courage de rappeler que Dieu n’est pas une projection de nos désirs. Le courage aussi de dénoncer les loups déguisés en pasteurs. L’Église ne retrouvera sa force que si elle revient à la radicalité de l’Évangile, à la clarté de la doctrine, à la sainteté réelle, et à la fidélité totale au Christ.
Ceux qui aiment vraiment l’Église doivent cesser de la trahir pour la rendre aimable aux yeux du monde. Ce n’est pas le monde qu’il faut flatter, c’est le Christ qu’il faut suivre, entièrement, et pas à moitié.