Chaque 1er octobre, l’Église célèbre la mémoire de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte Face, la « petite Thérèse » de Lisieux. Docteur de l’Église, patronne des missions, patronne secondaire de la France, elle demeure l’une des figures spirituelles les plus aimées et les plus invoquées à travers le monde. Sa « petite voie » de confiance et d’amour a marqué des millions de croyants et continue d’inspirer des hommes et des femmes bien au-delà des frontières de l’Église.En 2025, cette fête revêt un éclat particulier : elle s’inscrit dans le centenaire de sa canonisation, célébré le 17 mai, et dans le grand jubilé voulu par le pape François sur le thème Pèlerins de l’espérance.
Comme le rappelle Monseigneur Guy Gaucher, grand connaisseur de Thérèse : « Sa sainteté ne repose pas sur des phénomènes extraordinaires. Elle consiste à faire de manière extraordinaire des choses tout ordinaires.«
Née à Alençon le 2 janvier 1873, dernière d’une fratrie de neuf enfants de Louis et Zélie Martin, Thérèse grandit dans une famille profondément chrétienne. La mort de sa mère, alors qu’elle n’a que quatre ans et demi, marque une rupture douloureuse. Son père et ses sœurs s’installent à Lisieux, aux Buissonnets ( maison de famille) , où Thérèse reçoit une éducation pieuse mais traverse des épreuves d’hypersensibilité et de « scrupules ».
À dix ans, gravement malade, elle est guérie par ce qu’elle appellera le « sourire de la Vierge Marie ». Sa première communion, en 1884, est pour elle une « fusion d’amour ». Deux ans plus tard, la nuit de Noël 1886, elle vit ce qu’elle nommera sa « conversion » : elle devient forte, tournée vers les autres, prête à offrir sa vie.Dès son adolescence, Thérèse désire entrer au Carmel de Lisieux. Elle prie pour les pécheurs, notamment pour Henri Pranzini, condamné à mort, dont la conversion in extremis la conforte dans sa mission. Lors d’un pèlerinage en Italie, elle ose demander au pape Léon XIII l’autorisation d’entrer au Carmel à quinze ans. Le 9 avril 1888, son vœu est exaucé : elle franchit la clôture du monastère et devient sœur Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte Face.
La vie carmélitaine, austère et cachée, est marquée pour elle par l’épreuve : sécheresse spirituelle, solitude, maladie de son père interné à Caen. Mais elle découvre peu à peu sa voie propre : non pas accomplir de grandes œuvres, mais vivre dans une confiance absolue en l’amour miséricordieux de Dieu.Le 9 juin 1895, Thérèse s’offre à l’Amour miséricordieux. Elle comprend que la sainteté n’est pas réservée à quelques-uns, mais accessible à tous ceux qui s’abandonnent à Dieu comme un enfant dans les bras de son Père. « L’ascenseur qui doit m’élever jusqu’au Ciel, ce sont vos bras, ô Jésus », écrit-elle.
Ce chemin de confiance et d’amour devient son héritage spirituel. Elle le formule dans son Histoire d’une âme, rédigée par obéissance à ses supérieures, et dans de nombreux poèmes et prières. À travers eux, elle enseigne une théologie simple et lumineuse, centrée sur l’amour.Atteinte par la tuberculose dès 1896, Thérèse vit son agonie comme une union au Christ souffrant. Loin de se révolter, elle transforme sa douleur en offrande : « Ma joie, c’est d’aimer la souffrance », écrit-elle dans son poème Ma joie (1897).
Ce texte, dédié à sa sœur Pauline, alors prieure, résume son testament spirituel : accueillir la souffrance comme une occasion d’aimer davantage, voir dans chaque instant un signe de l’amour de Dieu.
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Dans ses derniers mois, elle répète inlassablement : « Je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre. » Elle meurt le 30 septembre 1897 à 24 ans, en prononçant ces mots : « Mon Dieu, je vous aime. » Un an après sa mort paraît Histoire d’une âme. Le succès est immédiat et mondial. Les témoignages de grâces affluent, au point que Pie XI parlera d’un « ouragan de gloire ». Béatifiée en 1923, canonisée en 1925, elle est proclamée patronne des missions en 1927 et docteur de l’Église en 1997 par Jean-Paul II, comme « experte en la science de l’amour ».
Elle est aujourd’hui l’une des saintes les plus populaires de la catholicité. Le sanctuaire de Lisieux accueille chaque année des centaines de milliers de pèlerins.À travers son visage d’enfant, sa simplicité et sa radicalité évangélique, Thérèse demeure une maîtresse spirituelle pour le monde. Dans une époque marquée par la peur, l’individualisme et la souffrance, elle propose une réponse de confiance, de miséricorde et d’amour.Elle continue de « faire tomber une pluie de roses », selon son expression, par les innombrables grâces reçues par son intercession.
Au cœur de sa découverte, Thérèse comprend que sa place dans l’Église est d’être l’amour au cœur même du Corps mystique. Elle l’exprime dans un poème bouleversant ( 8 septembre 1896 à Sœur Marie du Sacré Coeur) , qui conclut son Histoire d’une âme.Voici le texte intégral :
« Je serai l’Amour »
« Au cœur de l’Église, ma Mère,
je serai l’Amour…
Ainsi je serai tout,
ainsi mon rêve sera réalisé !
Je veux aimer Jésus
jusqu’à mourir d’amour.
Je veux aimer comme Il aime,
donner sans mesure,
me livrer sans retour.
Je veux sourire même dans la souffrance,
ne rien refuser,
être petite et pauvre,
n’avoir d’autre richesse que la confiance.
Je veux être l’amour au cœur de l’Église,
le cœur qui brûle et qui donne vie,
le cœur qui prie et qui pardonne,
le cœur qui attire et qui console.
Ô Jésus, mon unique Amour,
mon ciel se passera sur la terre,
à faire du bien jusqu’à la fin du monde. »
En ce jour de sa fête, l’Église se souvient que la sainteté n’est pas une grandeur inaccessible mais une vocation pour tous. Thérèse nous apprend qu’« au soir de cette vie, il ne reste que l’amour », et que la joie naît dans la confiance et l’abandon.Son message reste une lumière pour l’humanité : « Je puis donc, malgré ma petitesse, aspirer à la sainteté. »


