Lors de leur assemblée plénière, les évêques de la Conférence épiscopale guatémaltèque (CEG) ont exprimé leur « profonde préoccupation » face aux nouvelles politiques migratoires mises en place par le gouvernement américain. Depuis l’entrée en fonction du nouveau président des États-Unis, des mesures plus strictes contre l’immigration ont été adoptées, mettant en difficulté des milliers de Guatémaltèques cherchant à fuir la pauvreté et l’insécurité.
« L’expérience des migrants, depuis le moment où ils quittent leur patrie jusqu’à leur arrivée dans le pays de destination, est marquée par la souffrance et la douleur », affirment les évêques, soulignant que nombre d’entre eux finissent par être capturés et expulsés, ruinant ainsi leur espoir d’un avenir meilleur.
Si l’Église locale prend la défense des exilés, elle met également en avant leur rôle vital dans l’économie nationale. En 2024, les migrants guatémaltèques ont envoyé plus de 21 milliards de dollars en transferts de fonds, une somme qui, selon les évêques, est « décisive pour maintenir la stabilité économique du pays ». Cette dépendance financière souligne le paradoxe d’un pays dont l’économie repose en grande partie sur ceux qu’il n’a pas su retenir.
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L’Église guatémaltèque face à la crise sociale
Au-delà de la crise migratoire, la Conférence épiscopale a dressé un tableau sombre de la situation sociale du Guatemala. La malnutrition infantile reste un problème structurel majeur, entravant le développement humain et économique du pays. « La sécurité alimentaire est un droit fondamental, mais elle est loin d’être garantie », insistent les évêques, évoquant les nombreux obstacles : pauvreté, manque d’accès à la terre, déficit éducatif et chômage.
Les prélats dénoncent aussi la recrudescence des violences. Le pays est en proie à une insécurité croissante, alimentée par des meurtres, extorsions, enlèvements et trafics en tout genre. Les réseaux sociaux sont même devenus des outils de menace et d’intimidation. Une situation alarmante que l’Église appelle le gouvernement à prendre en charge de toute urgence.
Ce cri d’alarme des évêques intervient dans un contexte politique tendu. Le Guatemala a récemment connu une transition présidentielle délicate, marquée par des tensions entre le gouvernement sortant et les nouvelles autorités. Le président élu, Bernardo Arévalo, entré en fonction le 15 janvier 2024, a hérité d’un pays confronté à des défis majeurs : une corruption endémique, une violence incontrôlée et une dépendance structurelle aux envois d’argent des migrants. Malgré ses efforts pour lutter contre la corruption, son administration fait face à une forte résistance de la part du ministère public, dirigé par la procureure générale Consuelo Porras, ainsi que d’autres acteurs politiques et économiques influents. Cette opposition entrave la mise en œuvre de réformes essentielles et complique la gouvernance du pays.
L’Église catholique, traditionnellement influente au Guatemala, tente de jouer un rôle de médiateur et de défenseur des plus vulnérables. Mais face à l’ampleur des défis, son discours oscille entre plaidoyer en faveur des migrants et constat amer sur l’échec des politiques nationales à offrir un avenir viable à sa propre population.