La joie est immense en Haïti. Dimanche, l’organisation Nuestros Pequeños Hermanos (NPH) a annoncé la libération des huit otages enlevés le 3 août dernier par une bande armée à Kenscoff, localité de montagne réputée autrefois paisible, à une vingtaine de kilomètres de la capitale. Parmi eux se trouve la missionnaire irlandaise Gena Heraty, directrice de l’orphelinat Sainte-Hélène, où le rapt s’était produit, ainsi qu’un petit garçon de trois ans atteint de handicap.Dans son communiqué, NPH a exprimé « une profonde gratitude et un soulagement qui dépasse ce que les mots peuvent exprimer ». Les personnes libérées sont désormais en sécurité et reçoivent un accompagnement médical et psychologique, entourées de leurs proches.
La captivité a duré près de quatre semaines, dans un climat de grande incertitude. « Chaque jour sans nouvelles était une souffrance, mais nous n’avons jamais cessé de prier », confie une employée de l’orphelinat Sainte-Hélène. Des veillées de prière se sont multipliées dans les paroisses de la région, et l’Église locale a exhorté les fidèles à rester unis dans l’espérance malgré la peur.La libération est vécue comme une réponse à cette mobilisation spirituelle. « Nous avons senti la puissance de la prière et de la communion fraternelle », souligne NPH. « Cette lumière nous donne le courage de continuer à servir les plus petits dans ce pays bien-aimé ».
Le 10 août dernier, lors de l’Angélus, le pape Léon XIV avait lancé un appel pressant pour la libération des captifs. « Je confie au Seigneur ceux qui sont retenus contre leur volonté et j’invite chacun à prier pour la paix dans ce pays frère », avait-il déclaré.
Ses paroles, largement reprises dans la presse internationale, avaient permis de garder l’attention mondiale sur le drame, dans un pays souvent oublié des grands débats géopolitiques.Le cardinal Chibly Langlois, premier cardinal haïtien, avait lui aussi dénoncé « une spirale de violence qui détruit la vie quotidienne et prive le peuple haïtien de sa dignité ».
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Installée en Haïti depuis plus de trente ans, Gena Heraty a consacré sa vie aux enfants abandonnés, particulièrement ceux en situation de handicap. Son action au sein de l’orphelinat Sainte-Hélène a transformé des centaines de vies et lui a valu une reconnaissance profonde dans la communauté locale.« Dès son retour, elle est allée voir les enfants. Tous pleuraient, les petits et le personnel l’attendaient à bras ouverts », raconte un volontaire, décrivant une scène d’intense émotion.Cette libération, aussi joyeuse soit-elle, ne masque pas la gravité de la crise haïtienne. Depuis plusieurs années, la capitale et ses environs sont aux mains de groupes armés.Selon l’ONU, plus de 3 000 enlèvements ont été signalés en Haïti en 2024, un chiffre en constante augmentation. Les gangs n’hésitent plus à cibler des missionnaires, des médecins ou des enfants, ce qui accentue l’impression de chaos généralisé.Kenscoff, longtemps considérée comme une zone protégée, n’échappe plus à cette insécurité. La population vit dans la peur quotidienne, et de nombreuses familles songent à fuir.
L’Église en Haïti appelle régulièrement la communauté internationale à ne pas détourner son regard. « Chaque enlèvement, chaque victime est le signe d’une société qui s’effondre », rappelle un communiqué de la Conférence épiscopale haïtienne. « Nous avons besoin de soutien, de sécurité et de justice pour redonner confiance au peuple ».Pour les chrétiens, la libération des otages demeure un signe d’espérance. Elle rappelle que la prière et la solidarité ont un rôle essentiel dans les heures les plus sombres. Mais elle invite aussi à agir : pour reconstruire le pays, protéger les plus vulnérables et offrir aux générations futures une Haïti réconciliée avec elle-même.