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« Il faut attendre les éléments budgétaires » : les églises de France à la merci de la bonne volonté des maires

L'église néogothique Saint-Jacques d'Abbevilledétruite en 2013 - DR
L'église néogothique Saint-Jacques d'Abbevilledétruite en 2013 - DR
N’est-il pas temps que la France considère ces dépenses comme prioritaires, au même titre que l’éducation, la sécurité ou l’environnement ?

Faute d’un entretien régulier et de crédits prioritaires, de nombreuses églises ferment en France. Chaque décision dépend du calendrier électoral et des arbitrages locaux. À Pontonx-sur-l’Adour, l’église Sainte-Eugénie en est le triste symbole : fermée au public, son clocher menace de s’effondrer, et les fidèles sont privés de leur lieu de prière. Derrière cette urgence, un constat désolant : la survie des églises de France dépend des aléas budgétaires des mairies, eux-mêmes soumis aux cycles électoraux.

France Bleu précise que au-dessus du portail condamné, derrière les barrières de chantier ornées de panneaux « zone interdite, danger », la flèche du clocher penche d’une manière anormale. C’est un simple maçon qui, en début d’année 2025, avait alerté la mairie. « Un maçon s’est arrêté à la mairie pour nous signaler que le clocher semblait pencher. C’était en début d’année 2025. Le bureau d’études est venu en mai avec des cordistes et ils se sont rendu compte que la partie supérieure était fissurée, voire légèrement fracturée », explique le maire, Dominique Urolategui.

La décision de fermeture a été prise début septembre, une fois les fissures jugées trop dangereuses. « Moi, j’attends les préconisations du bureau d’études pour intervenir le plus rapidement possible. Mais nous sommes une municipalité, il faut attendre les éléments budgétaires. Plus on attend, plus on prend le risque de voir les choses empirer. Si la croix ou le bout du clocher tombait sur la toiture, il y aurait des risques d’endommager l’intérieur de l’église, un peu comme Notre-Dame de Paris lors de l’incendie », poursuit-il.

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Pour l’évêque d’Aire et Dax, Monseigneur Souchu, la douleur est grande. Devant l’église fermée, il rappelle que « la paroisse Saint-Vincent Notre-Dame n’a pas de chance : l’église de Téthieu est fermée pour travaux depuis longtemps, celle de Saint-Vincent-de-Paul aussi pour des raisons de sécurité. Et maintenant celle de Pontonx. La question, c’est pour les obsèques, les baptêmes, les mariages. Ils auront lieu dans les églises les plus proches, très certainement à la basilique de Buglose. Pour les grandes fêtes comme Noël ou Pâques, on verra au cas par cas. »Et de confier son déchirement : « Pour un évêque, c’est toujours un déchirement de voir une église fermée et endommagée. Une église vide, ça ne sert à rien. Elle est faite pour rassembler les chrétiens. Pour une commune, c’est aussi un phare. »

Ce drame local illustre un problème national. Tant que l’entretien des églises restera une variable d’ajustement budgétaire, dépendante des majorités municipales, elles continueront de se dégrader. On invoque toujours les coûts pour différer les travaux d’entretien , jusqu’au jour où l’on conclut qu’ils sont devenus « trop chers » et qu’il faut fermer ou détruire.

N’est-il pas temps que la France considère ces dépenses comme prioritaires, au même titre que l’éducation, la sécurité ou l’environnement, et qu’elle les protège par une dotation garantie, à l’abri des changements d’orientations politiques ? Une solution serait de créer un classement spécial des dépenses liées aux églises dans les budgets communaux, afin d’empêcher que leur entretien dépende uniquement de la bonne volonté ou des sensibilités personnelles des élus locaux.Cette dotation pourrait être assurée par l’État, garantissant un financement régulier et obligatoire pour les communes propriétaires d’églises, comme c’est le cas depuis 1905. Car si l’État impose la propriété communale, il doit aussi assumer sa part de responsabilité dans la conservation de ce patrimoine.Il est illusoire de croire qu’un petit village rural pourra seul porter la charge de restaurations qui atteignent parfois plusieurs centaines de milliers d’euros. Or, ce sont précisément ces villages qui abritent les églises les plus fragiles, et souvent les plus anciennes.Sans une telle dotation garantie, nous continuerons de livrer notre patrimoine religieux à l’usure du temps et aux priorités fluctuantes des conseils municipaux. Et nous verrons se répéter le même scénario : le clocher penche, les devis tardent, le budget manque, et la porte de l’église se ferme. Jusqu’au jour où il sera trop tard pour rouvrir.

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