Du 28 juillet au 3 août 2025, des milliers de jeunes venus du monde entier participent à Rome au Jubilé des jeunes, l’un des grands rassemblements de l’Année sainte. Parmi eux, un groupe égyptien, conduit par le père Antoine Alan, franciscain et vicaire général de l’Église latine en Égypte. À travers sa présence et son témoignage, ce religieux souligne la méconnaissance persistante des chrétiens d’Orient et les défis auxquels ils sont confrontés dans un contexte régional instable.
« Parfois, je rencontre des jeunes qui ne savent même pas qu’il y a des chrétiens en Égypte ! Et cette ignorance fait plus de mal que le fondamentalisme », confie le père Antoine, visiblement marqué par l’expérience. Une remarque lourde de sens, qui met en lumière l’invisibilité dont souffrent encore aujourd’hui les communautés chrétiennes du Moyen-Orient. Présentes depuis les origines de l’Église, elles sont pourtant peu connues au-delà de leur région.En Égypte, les chrétiens représentent environ 10 % de la population, en majorité coptes orthodoxes. La communauté catholique, bien plus restreinte, est répartie entre plusieurs rites, latin, copte catholique, melkite, maronite ou syro-catholique. Bien que l’État reconnaisse officiellement la liberté de culte, les chrétiens égyptiens font face à des obstacles concrets, discriminations dans la vie publique, restrictions administratives pour la construction d’églises, tensions communautaires, surtout dans les zones rurales. L’identité chrétienne, même lorsqu’elle s’exprime de manière paisible, reste souvent marginalisée.
Dans ce contexte, la participation au Jubilé prend un sens particulier. « Nous sommes ici pour redécouvrir notre foi, nous renouveler et retourner en Égypte remplis d’espérance », explique le père Antoine. Conscient que tous n’ont pas eu la possibilité de faire le voyage, il ajoute, « Nous le faisons aussi au nom de nos confrères qui n’ont pas pu venir. » Ce pèlerinage, bien plus qu’un événement spirituel, devient un acte de représentation pour une Église minoritaire. « Nous venons d’une terre biblique entourée de conflits », rappelle-t-il, « À l’est, Gaza et la Terre Sainte meurtrie, à l’ouest, la Libye, au sud, le Soudan. C’est pourquoi il y a parmi nous des réfugiés. Nous venons de situations difficiles et portons ces préoccupations dans notre cœur. » La délégation égyptienne reflète ainsi, au sein du Jubilé, une part du drame vécu aux frontières du monde méditerranéen.
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Mais malgré ce contexte, le message du père Antoine reste résolument tourné vers l’avenir. Il voit dans le Jubilé une source d’inspiration pour la jeunesse chrétienne :
« Le Jubilé est une matrice, enseignons aux jeunes à être des instruments de paix dans leurs communautés. Une fois rentrés, ils sèmeront. »
À travers cette dynamique fraternelle vécue à Rome, il espère aussi éveiller les consciences au-delà du cercle ecclésial. « Que le “modèle du Jubilé” puisse être adopté par les puissants pour faciliter les relations entre les pays », propose-t-il avec une conviction paisible mais ferme. Et de conclure, « La guerre n’a aucune raison d’être, elle n’apporte que destruction. Nous sommes tous perdants avec la guerre. »L’Égypte joue depuis des années un rôle diplomatique et humanitaire central dans la région. Le père Antoine y voit un symbole d’espérance, « L’Égypte est une lumière et un passage d’espérance », notamment grâce à son engagement en faveur des convois humanitaires vers Gaza.
À Rome, ces jours-ci, des milliers de jeunes prient, chantent, et découvrent la richesse de l’Église universelle. La parole du père Antoine Alan, enracinée dans une foi confrontée à l’épreuve, vient rappeler que cette universalité ne se comprend vraiment que si elle donne aussi voix aux minorités oubliées,témoins silencieux qui y vivent l’Évangile.
Avec Agensir