La Bataille de Hattin, également connue sous le nom de la Bataille des Cornes de Hattin ou la Bataille de Tibériade, fut une confrontation militaire décisive qui se déroula le 4 juillet 1187, près des rives du lac Tibériade en Galilée. Cette bataille opposa les armées du Royaume de Jérusalem, dirigées par Guy de Lusignan, aux redoutables forces de Saladin, le renommé leader musulman. Saladin en sortit vainqueur, sécurisant ainsi un triomphe retentissant qui lui ouvrit les portes de la Palestine.
Contexte Historique
Après la mort du jeune Roi Baudouin V de Montferrat à Acre, à l’âge tendre de huit ans, Raymond III de Tripoli, le régent, fut destitué du pouvoir. Guy de Lusignan accéda au trône de Jérusalem grâce à son mariage avec Sibylle, la sœur du Roi Baudouin IV, décédé de la lèpre le 16 mars 1185.
À la fin de 1186 ou au début de 1187, Renaud de Châtillon, le seigneur d’Outre-Jourdain et de Montréal, viola une trêve de six ans entre les Francs et les Musulmans en attaquant une caravane fortement protégée voyageant du Caire à Damas. Il massacra les escortes armées et emprisonna les marchands et les caravaniers dans sa forteresse de Kerak. Par la suite, il cibla d’autres caravanes de pèlerins se rendant à La Mecque, envisageant même de détruire le site sacré de l’islam.
En réponse à ces actes de pillage, Saladin opta pour la diplomatie, donnant la priorité à l’administration de son royaume. Son empire avait été ravagé par des années de conflits entre les seigneurs arabes et les Croisés. Il venait tout juste d’unifier les forces musulmanes, et même la ville de Mossoul, assiégée à maintes reprises, avait signé un accord de paix en 1186. La trêve qu’il avait personnellement négociée avec Raymond de Tripoli devait lui donner le temps de préparer sa réponse, et il croyait que le moment de la rompre n’était pas encore venu. Par conséquent, il envoya des émissaires porteurs de messages d’indignation à Renaud de Châtillon, exigeant le respect de la trêve, la libération des prisonniers et la restitution des biens saisis. Dédaigneux, Renaud lui conseilla de demander à Mahomet de venir à leur secours.
Incapable de laisser cette offense sans réponse, Saladin rassembla plus de 12 000 soldats à Damas et, à partir de mars, assiégea la citadelle de Kerak en Moab, puis la citadelle de Montréal au nord-est de Shaubak. Il porta ensuite son attention sur Panéas, près de Tibériade. Les troupes musulmanes rencontrèrent par hasard une délégation de barons francs, qu’ils massacrèrent ou capturèrent.
Pendant ce temps, les Croisés se retrouvèrent embourbés dans des querelles internes. En mars 1187, Raymond de Tripoli, confiant dans la trêve de quatre ans qu’il avait signée avec Saladin et soutenu par elle, refusa de prêter allégeance au nouveau Roi de Jérusalem. Le roi, désireux de se débarrasser d’un rival qu’il accusait d’être trop clément envers les Musulmans, se prépara à attaquer Tibériade, qui appartenait à l’épouse du Comte de Tripoli. Alerté, ce dernier forgea une alliance avec Saladin, qui leva le siège de la ville.
Le 30 avril 1187, conformément à leur alliance, Saladin demanda à Raymond de Tripoli de permettre à ses éclaireurs de faire une reconnaissance près du lac Tibériade. Le comte, dans une situation délicate, ne put refuser. Cependant, il exigea que les troupes musulmanes quittent son territoire avant le soir et n’attaquent ni les personnes ni les biens.
Le 1er mai, 7 000 cavaliers passèrent sous les murs de la ville. Le soir même, alors qu’ils étaient en chemin de retour, ils rencontrèrent 150 chevaliers templiers et hospitaliers qui avaient attaqué une colonne près de Saffuriya, au nord de Nazareth.
Cet événement, connu sous le nom de la Bataille de la Fontaine du Cresson, se solda par un massacre, seuls cinq hospitaliers et trois templiers réussissant à s’échapper, dont le Maître de l’Ordre, Gérard de Ridefort. Roger de Moulins, le supérieur des hospitaliers, mourut lors de la bataille des suites d’un coup de lance.
Suite à ce désastre, Raymond de Tripoli se repentit et mit ses forces à la disposition de Guy de Lusignan. Le 24 juin, les Francs étaient prêts. Ils avaient rassemblé une puissante armée comprenant 2 000 chevaliers (dont 1 200 chevaliers dirigés par Gérard de Ridefort et des hospitaliers dirigés par le grand précepteur de l’Hôpital, Guillaume Borrel, remplaçant Roger de Moulins), et 13 000 fantassins. Ils furent renforcés par 40 000 mercenaires, principalement des Musulmans, comprenant 2 500 cavaliers et 7 000 fantassins payés et armés par les Templiers et les Hospitaliers. De l’autre côté, de nouvelles troupes avaient rejoint Saladin, rassemblant une force de plus de 30 000 soldats.
La Marche Fatidique
Le 2 juillet, dans l’après-midi, l’armée franque atteignit Séphorie, à environ vingt-sept kilomètres de Tibériade. Ils étaient à l’abri des attaques et avaient accès à des provisions abondantes et à l’eau des sources de la ville. Pour forcer les Francs à entrer en action, Saladin attaqua la ville de Tibériade, où se trouvait toujours la femme du Comte Raymond de Tripoli, Échive de Bures.
Ses troupes réussirent à capturer la ville basse, qui fut incendiée, forçant la population à se réfugier dans la forteresse, tout en laissant passer des messagers pour rejoindre l’armée franque à Séphorie. Saladin espérait ainsi pousser les Francs à livrer bataille.
Le soir même de l’attaque, le roi convoqua un conseil. Confrontés à la menace pesant sur Tibériade, les trois gendres de Raymond de Tripoli souhaitaient que l’armée vienne au secours de leur mère. Cependant, Raymond s’y opposa, estimant qu’il était plus sage d’attendre Saladin en position de force. Il argumenta que les Sarrazins seraient épuisés par leur marche sur des routes poussiéreuses et brûlantes, souffrant cruellement du manque d’eau. Il déclara qu’il « préférerait perdre Tibériade et tout ce qu’elle contient plutôt que l’unique armée du Royaume. » Renaud de Châtillon accusa Raymond de lâcheté. Néanmoins, ce dernier l’emporta dans la décision du conseil.
Après le conseil, Gérard de Ridefort s’entretint personnellement avec le roi sous sa tente pour le convaincre de changer d’avis. Il lui rappela la réputation de traîtrise de Raymond de Tripoli et argua que céder la victoire aux Sarrazins alors que l’armée était si proche serait un signe de faiblesse. Il laissa également entendre que si le roi n’autorisait pas ses hommes à venger les morts de la Fontaine de Cresson, les Templiers risquaient fort de déserter. Guy de Lusignan se rangea à l’avis du Maître de l’Ordre.
L’armée franque, divisée en trois unités, se mit en route à l’aube du 3 juillet. Les hommes souffraient de la chaleur et de la soif, leurs réserves d’eau s’épuisant rapidement. Saladin avait veillé à boucher les puits et à empoisonner les points d’eau. Sans jamais s’engager dans la bataille, les troupes montées sarrazines harcelaient les Francs de tous côtés avec leurs flèches, ralentissant leur progression.
Cette tactique réussit si bien qu’au soir du 3 juillet, le roi proposa de se diriger vers le village de Hattin, où l’un des rares points d’eau pouvait être trouvé. Cependant, le rusé Saladin bloqua leur chemin. À la tombée de la nuit, les Francs, assoiffés, furent contraints de camper au milieu des pierres brûlantes, sur le sable desséché. Toute la nuit, les attaques de harcèlement se multiplièrent, obligeant les Francs à rester éveillés pour la troisième nuit consécutive.