Pour son premier déplacement depuis le début de son mandat, la présidence de la Conférence des évêques de France a choisi un geste fort : du 16 au 20 août, le cardinal Jean-Marc Aveline, accompagné de Mgr Vincent Jordy et de Mgr Benoît Bertrand, se rendra en Terre Sainte. L’objectif affiché est d’exprimer le soutien de l’Église de France aux communautés chrétiennes de la région, et plus largement à tous les artisans de paix, dans un contexte marqué par la tragédie humanitaire à Gaza et l’attente de la libération des otages israéliens.
Mais ce communiqué, publié en amont du voyage, ne se limite pas à la diplomatie pastorale internationale. Il aborde aussi un sujet brûlant en France : la nomination, par Mgr Guy de Kerimel, archevêque de Toulouse, du Père Dominique Spina au poste de chancelier diocésain. Condamné par la justice civile pour viol, incarcéré puis réintégré dans le ministère presbytéral, le Père Spina occupe cette fonction administrative au cœur de l’évêché.
Face aux réactions indignées de nombreux fidèles et à l’incompréhension suscitée, la présidence de la Conférence a choisi de s’exprimer avec prudence mais fermeté :
« Les évêques indiquent avoir engagé un dialogue constructif avec Mgr Guy de Kerimel, archevêque de Toulouse, l’invitant à reconsidérer la nomination de son chancelier, afin d’éviter toute blessure supplémentaire dans le peuple de Dieu. »
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Ces mots, mesurés mais explicites, traduisent la volonté des responsables nationaux de préserver la crédibilité de l’Église dans un domaine où la vigilance et l’intégrité sont plus que jamais attendues. Ils interviennent dans un climat déjà sensible, alors que la Conférence multiplie les efforts pour restaurer la confiance après les révélations d’abus et les engagements pris en faveur des victimes.La prise de position de la CEF fait écho à des critiques plus sévères, accusant Mgr de Kerimel d’instrumentaliser la miséricorde pour justifier une décision jugée inappropriée. Le rappel public au discernement vise, selon plusieurs observateurs, à éviter que cette nomination ne vienne brouiller le message de vérité et de conversion porté par l’Église de France depuis plusieurs années.
En associant dans un même texte un appel à la paix en Terre Sainte et une demande d’apaisement dans un diocèse français, la présidence de la Conférence des évêques rappelle que la mission de l’Église se joue autant sur les lieux de pèlerinage que dans la gestion quotidienne de ses propres responsabilités. Dans les deux cas, c’est la même exigence qui prévaut : la cohérence entre la parole et les actes.
Communiqué de la Présidence de la Conférence des évêques de France
« Du 16 au 20 août, la présidence de la Conférence des évêques de France a décidé de se rendre en Terre Sainte afin de manifester le soutien de notre Église, non seulement aux communautés chrétiennes mais aussi à tous les amis de la paix, quelles que soient leurs convictions ou leurs religions, dans une période extrêmement douloureuse et incertaine, marquée par la redoutable tragédie humanitaire à Gaza et l’interminable attente de la libération des otages israéliens. Nous avons souhaité que le premier geste du mandat qui nous a été confié soit d’aller rendre visite à l’Église qui vit à Jérusalem et dans toute la région, afin de nous associer aux efforts que, dans sa pauvreté, elle déploie avec les hommes et les femmes de bonne volonté, afin d’assurer aux peuples de cette terre, spécialement aux plus pauvres, le soutien matériel et spirituel dont ils ont besoin. Nous confions à la prière de tous ce pèlerinage d’espérance.
En France, ces dernières semaines, l’actualité ecclésiale a été bien chargée. Nous tenons à rappeler que notre Église, depuis plusieurs années, a pris courageusement le chemin de la vérité dans la question douloureuse des abus commis en son sein. Il est très important de poursuivre ce travail dans tous les secteurs de la vie ecclésiale. Peu à peu, nous avons appris à regarder ces faits d’abord du point de vue des personnes qui en ont été les victimes et qui en subissent les conséquences à longueur de vie.
Ce déplacement du regard, l’écoute bouleversante de leur détresse et de leur douleur, l’accueil de leur invitation à poursuivre humblement avec elles un chemin de vérité, ont amorcé, pour notre institution ecclésiale, un long et exigeant travail de conversion, que nous sommes résolus à poursuivre. Dans cet esprit, nous avons engagé un dialogue constructif avec Mgr Guy de Kerimel, archevêque de Toulouse, l’invitant à reconsidérer la décision qu’il avait prise quant à la nomination du Chancelier de son diocèse. En effet, une telle nomination à un poste aussi important, canoniquement et symboliquement, ne peut que raviver des blessures, réveiller des soupçons et déconcerter le peuple de Dieu.
Dans quelques jours, la solennité de l’Assomption de la Vierge Marie marquera un nouveau moment très intense dans nos diocèses, après la grande et belle semaine du Jubilé des jeunes à Rome. « Le monde a besoin d’un message d’espérance. Vous êtes ce message ! », leur a dit le Pape. En écho à cet appel, nous invitons tous ceux qui se rassembleront pour les célébrations du 15 août, à unir leurs prières pour le respect de la vie et pour la paix dans le monde.
Card. Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, président de la Conférence des évêques de France
Mgr Vincent Jordy, archevêque de Tours, vice-président de la Conférence des évêques de France »