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La crise au Vénézuela se transforme en crise ouverte avec le Vatican : le cardinal Baltazar Porras arrêté à l’aéroport de Caracas

Cardinal Baltazar Porras - DR
Cardinal Baltazar Porras - DR
Le cardinal Baltazar Porras, archevêque émérite de Caracas, a été stoppé à l’aéroport international de Maiquetía alors qu’il devait embarquer vers l’Espagne

L’incident intervient dans un contexte de fortes tensions entre l’Église catholique et le régime de Nicolás Maduro, quelques semaines après qu’il a été empêché de célébrer une messe au sanctuaire de José Gregorio Hernández.Le cardinal Baltazar Porras, né à Caracas en 1944, est l’un des visages les plus reconnus du catholicisme au Venezuela. Créé cardinal par le pape François en 2016, il a longtemps exercé comme archevêque de Mérida avant d’assumer la charge pastorale de Caracas. Depuis 2024, il est archevêque émérite. Son autorité morale et son rôle social lui donnent une place éminente dans un pays traversé par la crise.

Selon une source ecclésiale, le cardinal Baltazar Porras a été arrêté ce mercredi 10 décembre à l’aéroport international de Maiquetía alors qu’il s’apprêtait à partir vers l’Espagne, via la Colombie. La source espère que le passeport a été seulement retenu, et non retiré définitivement. Le cardinal Baltazar Porras n’a pas été placé en état d’arrestation, mais il lui a été interdit de prendre l’avion et il a dû retourner chez lui.

Cet épisode s’est produit alors que très peu de vols quittent Maiquetía ces derniers jours, presque tous vers la Colombie, en raison du blocage aérien imposé par les États-Unis.Ce nouvel incident fait écho à un autre événement récent. Le 26 octobre dernier, le cardinal Baltazar Porras devait célébrer une messe au sanctuaire de José Gregorio Hernández, à Isnotú, pour la fête liturgique du saint vénézuélien. Plusieurs mesures ont empêché sa venue : suspension annoncée de vols, déviation de son avion privé vers Barquisimeto et un important déploiement militaire autour de sa délégation. Dans une vidéo publiée sur son compte Instagram, il a expliqué que le viceministre de Cultes lui avait signalé « l’inconvenance » de sa présence, en évoquant des risques possibles de troubles. Une fois dérouté, il lui fut impossible de poursuivre par la route. « Nous n’avons subi aucune agression physique. On nous a seulement dit que ce sont des ordres supérieurs », a rapporté le cardinal Baltazar Porras. Il s’est interrogé publiquement : « Quel délit a été commis pour que l’on ne puisse pas remplir un devoir religieux ? »

Les tensions se sont encore accrues après cet épisode. Lors d’un discours retransmis depuis Caracas, Nicolás Maduro a accusé le cardinal Baltazar Porras, sans preuves, d’avoir conspiré pendant des années pour empêcher la canonisation de José Gregorio Hernández. Le chef de l’État a affirmé que la reconnaissance de la sainteté s’était produite « malgré Porras et sa confrérie », revendiquant un rôle personnel auprès du pape. Cette accusation n’est étayée par aucune source et paraît d’autant plus paradoxale que le cardinal Baltazar Porras a été l’un des principaux promoteurs de la cause du bienheureux auprès du Vatican, qu’il a suivie depuis des années et qu’il a annoncée publiquement. L’interprétation la plus vraisemblable est politique : en s’attribuant la canonisation d’un saint immensément populaire, le régime cherche à se présenter comme défenseur du peuple, tout en affaiblissant l’Église qui critique la situation nationale.

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Quelques jours auparavant, à Rome, le cardinal Baltazar Porras avait qualifié la situation du pays de « moralement inacceptable », dénonçant la réduction des libertés, l’augmentation de la pauvreté, le problème des migrants et la militarisation du gouvernement. Il avait appelé à la libération des prisonniers politiques et au retour de l’autonomie des pouvoirs publics. Ces déclarations ont ravivé les tensions historiques entre la hiérarchie catholique et le chavisme.

Rappelons que L’Église catholique demeure une force d’assistance et de critique dans un Venezuela frappé par l’effondrement économique.Caritas et les paroisses assurent une part importante de l’aide sociale, médicale et alimentaire. María Corina Machado, récemment honorée par le prix Nobel de la paix, a affirmé que les manœuvres du président Maduro ne feraient qu’accroître l’unité et la détermination du peuple vénézuélien.

L’interdiction de voyager imposée au cardinal Baltazar Porras n’est pas un incident isolé. Elle s’inscrit dans une série de mesures qui ont entravé ses déplacements et révèle un climat national où l’autorité politique l’emporte sur la liberté de mouvement, même pour une figure religieuse reconnue. Dans un Venezuela marqué par l’isolement international l’Église apparaît comme l’une des dernières voix institutionnelles capables d’appeler à la dignité, à la justice et au bien commun. Le cardinal Baltazar Porras en reste l’un des symboles. La crise ne semble pas près de s’apaiser.

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