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La France sombrera-t-elle comme le Canada dans l’inquisition laïque ?

Démolition de l'église Saint-François-d'Assise  au Québec en 2018 - DR
Démolition de l'église Saint-François-d'Assise au Québec en 2018 - DR
Au Québec, la laïcité se transforme en arme d’exclusion de la foi chrétienne. Et en France, de profanations en sacrilèges, de dégradations en vandalisme à peine condamnés, allons-nous banaliser à notre tour la persécution de la foi ?

En août 2025, le comité québécois sur la laïcité a rendu public ses recommandations. Loin d’un simple outil technique, ce rapport érige la laïcité en idéologie absolue. Présentée comme garante de la neutralité, elle se transforme en une sorte de religion de substitution, qui prétend couvrir toutes les autres, les dominer et les exclure de la sphère publique. Le message est clair : la foi chrétienne n’a plus sa place dans les institutions, ni même dans la société.Les cinquante mesures proposées révèlent un projet de marginalisation totale du religieux. La recommandation 23 demande de « modifier la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme afin de soustraire au processus d’approbation référendaire les changements de zonage permettant l’implantation de lieux de culte ». Autrement dit, seul l’État décidera désormais si une église, une mosquée ou une synagogue peut s’implanter.

La petite enfance n’échappe pas non plus à ce contrôle. La recommandation 29 impose de « surveiller de près les centres de la petite enfance et les garderies subventionnées de facto confessionnels afin qu’une réelle laïcité y soit déployée ». Quant à la recommandation 22, elle retire aux parents leur droit d’être avertis de l’enseignement de contenus liés à la sexualité à l’école : l’État entend se substituer à l’autorité parentale.Certaines mesures visent explicitement les chrétiens et les associations pro-vie. La recommandation 39 exige de « mettre fin au financement des organismes anti-choix et discriminatoires », sanctuarisant ainsi l’avortement comme valeur « laïque » incontestable.

Les symboles catholiques sont également pris pour cibles. Le rapport réclame le retrait de ceux « encore présents dans certains lieux publics », critique leur présence dans des salles municipales, et propose la suppression des lieux de prière dans les écoles et universités, remplacés par des espaces « neutres ».

Le contrôle municipal de la prière publique devrait aussi être renforcé, tandis que les demandes d’horaires adaptés pour motifs religieux pourraient être refusées plus systématiquement.Le rapport propose en outre que le gouvernement « abolisse graduellement les exemptions fiscales et les subventions publiques aux organismes religieux, y compris les écoles et les œuvres de charité, à moins qu’ils se sécularisent ». Une recommandation résume l’esprit général : « Consacrer le droit de tout enfant fréquentant une institution relevant de l’État de jouir d’un milieu neutre lui permettant d’être protégé contre toute forme de pression religieuse. » Une telle logique pourrait aller jusqu’à interdire une simple médaille autour du cou ou une image pieuse dans un cahier.

Pour Georges Buscemi, responsable de Campagne Québec-Vie, ce projet consacre « une exclusion explicite de la religion et de la morale traditionnelle des institutions et des espaces publics (et, éventuellement, privés) du Québec ». Il y voit l’instauration d’un « athéisme d’État imposé », où « le christianisme , la foi qui a fondé et nourri le Québec pendant des siècles ,est désormais suspect ». Les parents, dit-il, qui transmettent la foi à leurs enfants sont perçus comme suspects, et les écoles confessionnelles comme des institutions à éliminer.

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« La société occidentale, à travers les pouvoirs qui orientent les choix personnels et dictent les normes de la coexistence, a choisi de s’organiser sans Dieu : elle apparaît désormais livrée aux lumières clinquantes et trompeuses de la société de consommation, du profit à tout prix et de l’individualisme frénétique. C’est la démonstration la plus éclatante qu’un monde sans Dieu ,un monde d’où l’homme a prétendu expulser Dieu, si tant est que ce soit définitivement possible ,est un monde de ténèbres, de mensonges et d’égoïsme. » extrait de « Dieu existe-t-il  » ( Fayard) , cardinal Robert Sarah

Le langage employé par le comité québécois – « influences religieuses », « neutralité menacée », « pression religieuse » – trouve des échos troublants en France. Depuis des années, les tribunaux sont saisis pour interdire des crèches de Noël dans les mairies, retirer des croix ou déboulonner des statues de saints. Les pouvoirs publics justifient ces attaques au nom d’une « neutralité » de plus en plus restrictive.L’indifférence des responsables politiques face à la multiplication des attaques contre les symboles chrétiens doit nous alerter.

De profanations en sacrilèges, de dégradations en vandalisme, souvent passés sous silence ou à peine condamnés, allons-nous en France aussi vers une banalisation de la persécution de la foi chrétienne ?

La question est posée : la France suivra-t-elle le même chemin que le Québec ? Le risque est réel. Quand la foi est confinée dans la sphère privée, elle devient vite suspecte, puis considérée comme une menace pour la société. La laïcité, au lieu d’assurer la liberté, se mue alors en dogme exclusif qui étouffe toute transcendance.Pour éviter un tel naufrage, il faudra la vigilance et le courage de nos évêques, mais aussi l’engagement des fidèles. Défendre la liberté religieuse, c’est rappeler qu’elle n’est pas un privilège concédé par l’État, mais un droit inaliénable. Sans ce sursaut, la France risque elle aussi de sombrer dans un obscurantisme paradoxal : celui d’une laïcité inquisitoriale, où l’athéisme militant prend la place de Dieu et où l’homme finit par adorer sa propre image.

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