Comme une réponse cinglante, tranchante et désarmante de vérité, le témoignage de Yaël vient ridiculiser les accusations de Grégory Solari dans une tribune de La Croix, qui dénonce chez les pèlerins de Chartres de prétendus relents antisémites.
Issue d’une famille juive séfarade d’Égypte, Yaël a 26ans, elle raconte son chemin vers la foi catholique, une conversion profonde nourrie par la quête de Vérité. Cette année, elle a marché pour la deuxième fois vers Chartres, rattachée au chapitre des Vendéens de Paris ( Paris Sud) . Pourtant, rien ne la prédestinait à se retrouver au milieu de jeunes catholiques chantant les litanies des saints. Issue d’une famille juive séfarade originaire d’Égypte, elle a grandi dans un judaïsme marqué davantage par l’identité que par la foi. « On respectait Kippour, Pessa’h, Roch Hachana… mais sans ferveur. C’était de la tradition, pas une relation à Dieu. On récitait des psaumes ou des prières rabbiniques, mais moi, je n’avais jamais lu la Bible ni la Torah. J’étais étrangère à la foi. »
Une quête d’absolu et de vérité
Dès l’adolescence, un profond besoin de sens habite Yaël. « J’ai toujours été en quête d’absolu. Le matérialisme me rendait malheureuse. Je lisais de la philosophie pratique pour avoir une morale de vie. » Elle découvre d’abord les Accords toltèques ,« quatre préceptes moraux sans dogme » puis lit Schopenhauer, et s’identifie à Simone de Beauvoir : « Elle disait que l’intelligence mène à la foi. C’était mon modèle. »Mais dans son entourage, personne ne lui parle du Christ. « Je ne savais même pas qui était Jésus. Il y avait une grande ignorance. »
De la Sainte-Baume à Saint-Roch
Un jour, une amie l’invite à une randonnée dans le Sud. « Par hasard, on s’est retrouvées à la Sainte-Baume, là où sainte Marie-Madeleine a vécu trente ans. Ça a été un choc, un déclic. » Ce lieu marque la première étape d’un cheminement spirituel. Viennent ensuite deux rencontres majeures : « Deux catholiques, l’un tradi, l’autre progressiste, m’ont parlé de l’avortement avec une logique implacable. Leur cohérence m’a bouleversée. » Ces rencontres la mènent à l’église Saint-Roch à Paris, où elle découvre les deux rites, moderne et traditionnel. Elle y entend pour la première fois l’abbé Laurent. « J’ai compris que la foi catholique était intelligible. Il y avait une vraie valorisation de l’intelligence. »
Un « oui » intérieur
La bascule s’opère dans une rue parisienne. « J’ai ressenti qu’il fallait que je réponde à un appel. Il fallait dire oui. Je l’ai formulé clairement. C’est à ce moment que tout s’est éclairé. » Je me suis donc fait baptiser. Deux ans plus tard, sa foi est solide, nourrie de réflexion, et surtout vécue comme un acte de volonté : « J’ai posé un acte. »
Un lien retrouvé avec le judaïsme
« En me convertissant, j’ai pris conscience de mon ignorance du judaïsme. Le catholicisme m’a éclairée. » Elle insiste : sa conversion n’est pas une trahison. « Il a fallu que ma mère comprenne ça. Elle jugeait d’un point de vue social, pas spirituel. La judaïcité reste en moi. » Mais la rupture est réelle : « La famille de ma mère n’est pas au courant. Je cache ma croix. C’est une violence silencieuse. Je prie pour eux. »
Une réponse sans ambiguïté à La Croix
Interrogée sur la tribune du journal La Croix accusant le pèlerinage de Chartres d’être teinté d’antisémitisme, Yaël ne mâche pas ses mots : « Dire que les pèlerins tradi seraient antisémites est creux, vide de sens. La haine est du côté de ceux qui affirment cela. » Elle précise d’emblée : « Le mot “perfide” dans la liturgie désigne celui qui a manqué à la foi. Il n’y a aucune autre signification. Le christianisme est une relation d’amour. Ceux qui prétendent le contraire s’arrogent le monopole du cœur sans rigueur intellectuelle. »Et de conclure : « Oui, les catholiques sont dans la vérité, et les juifs ne le sont pas. C’est la seule différence. Il n’y a rien de racial ou de haineux là-dedans. »
La lumière de saint Thomas d’Aquin
Enfin, c’est en lisant saint Thomas d’Aquin que Yaël découvre la pleine cohérence de la foi. « Avec les Dominicains de la Fraternité Saint Vincent de Ferrier, j’ai compris combien cette pensée éclairait le monde. Elle m’a sortie de la confusion. » Elle insiste : « Il faut que les prêtres rendent cette pensée accessible. Les catholiques doivent savoir défendre leur foi. »Aujourd’hui, Yaël marche, prie, et espère. Le pèlerinage de Chartres est pour elle un acte de fidélité, non à une tradition, mais à la vérité rencontrée. Une vérité incarnée, aimée, choisie librement.
Yaël nous a spontanément confié sa prière et ses chants préférés
« Seigneur, dans le silence de ce jour naissant » Saint François d’Assise (1182-1226) reprise par le Père Maurice Zundel (1897-1975)
« Seigneur, dans le silence de ce jour naissant, je viens Te demander la paix, la sagesse, la force. Je veux regarder aujourd’hui le monde avec des yeux tout remplis d’amour, être patient, compréhensif, doux et sage. Voir au-delà des apparences Tes enfants comme Tu les vois Toi-même, et ainsi ne voir que le bien en chacun. Ferme mes oreilles à toute calomnie, garde ma langue de toute malveillance, que seules les pensées qui bénissent demeurent en mon esprit. Que je sois si bienveillant et si joyeux que tous ceux qui m’approchent sentent Ta présence. Revêts-moi de Ta beauté, Seigneur, et qu’au long de ce jour je Te révèle. Ainsi soit-il. »
Et les chants suivants,
La litanie des saints : « en latin, que j’ai entendu pour la première fois à mon baptême » nous dit-elle
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Propos recueillis par Philippe Marie