Ce lundi 29 décembre, recevant au Palais apostolique du Vatican les membres de l’Association nationale des communes italiennes (ANCI), Léon XIV a prononcé un discours inscrit dans le temps liturgique de Noël et marqué par une réflexion sur le sens de l’autorité et les défis qui traversent les sociétés contemporaines.En s’appuyant sur le mystère de l’Incarnation, le Saint-Père a opposé la fragilité de l’Enfant de Bethléem à la violence du roi Hérode. Il a rappelé que le massacre des innocents constitue « une manifestation d’un pouvoir inhumain, qui ne connaît pas la beauté de l’amour parce qu’il ignore la dignité de la vie humaine », soulignant ainsi les dérives d’une autorité détachée du respect de la personne.
À l’inverse, a-t-il affirmé, « la naissance du Seigneur révèle l’aspect le plus authentique de tout pouvoir, qui est avant tout responsabilité et service ». Le pape a précisé que cette conception de l’autorité suppose l’incarnation de vertus concrètes, notamment l’humilité, l’honnêteté et le partage, et qu’elle s’enracine dans une véritable capacité d’écoute, en particulier à l’égard des familles et des personnes les plus fragiles.Évoquant la réalité des villes et des territoires, le Saint-Père a rappelé que « nos villes ne sont pas des lieux anonymes, mais des visages et des histoires à préserver comme des trésors précieux ». Cette attention au réel, a-t-il souligné, engage une responsabilité quotidienne et progressive de la part de ceux qui exercent des charges publiques.
Le pape Léon XIV a ensuite dressé un tableau des difficultés qui marquent la vie sociale actuelle en Italie et en Europe , mentionnant la crise démographique, les épreuves des familles et des jeunes, la solitude des personnes âgées, le cri silencieux des pauvres, la dégradation de l’environnement et les conflits sociaux. Ces réalités, a-t-il indiqué, interpellent directement l’action politique et appellent des réponses orientées vers le bien commun.
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Parmi ces situations préoccupantes, le Saint-Père a attiré une attention particulière sur le jeu d’argent, déclarant sans ambiguïté qu’il s’agit d’« une plaie » qui « ruine de nombreuses familles ». Constatant son augmentation en Italie ces dernières années, il a rappelé, en s’appuyant sur le dernier rapport de Caritas Italiana, qu’il constitue un grave problème éducatif, de santé mentale et de confiance sociale.Le pape a également évoqué d’autres formes de solitude et de souffrance, telles que les troubles psychiques, les dépressions, la pauvreté culturelle et spirituelle et l’abandon social, les présentant comme autant de signes d’un profond besoin d’espérance au sein des sociétés contemporaines.Dans la continuité du magistère de son prédécesseur, le Saint-Père a rappelé que la démocratie elle-même se fragilise lorsqu’elle cesse d’écouter les plus petits et les pauvres, au risque de devenir une simple formalité privée de véritable représentativité.
Pour conclure, le pape Léon XIV a invité les responsables publics italiens à offrir une espérance concrète aux personnes, en œuvrant à une promotion humaine intégrale. Il les a assurés de sa prière, a accordé sa bénédiction apostolique à eux et à leurs familles, et leur a adressé ses vœux pour la nouvelle année.
DISCOURS DU SAINT-PÈRE LÉON XIV
À L’ASSOCIATION NATIONALE DES COMMUNES ITALIENNES
Salle Clémentine
Lundi 29 décembre 2025
« Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
La paix soit avec vous !
Éminence,
chers frères et sœurs, bonjour et bienvenue.
Je suis heureux de vous rencontrer tous, vous qui représentez l’Association nationale des communes italiennes. Nous vivons cette rencontre dans le temps de Noël et à la conclusion d’une année jubilaire, la grâce de ces jours éclaire certainement aussi votre service et vos responsabilités.
L’Incarnation du Fils de Dieu nous fait rencontrer un enfant, dont la fragile douceur se heurte à l’arrogance du roi Hérode. En particulier, le massacre des innocents qu’il ordonna ne signifie pas seulement une perte d’avenir pour la société, mais il est la manifestation d’un pouvoir inhumain, qui ne connaît pas la beauté de l’amour parce qu’il ignore la dignité de la vie humaine.
À l’inverse, la naissance du Seigneur révèle l’aspect le plus authentique de tout pouvoir, qui est avant tout responsabilité et service. Pour que toute autorité puisse exprimer ces caractéristiques, il est nécessaire d’incarner les vertus de l’humilité, de l’honnêteté et du partage. Dans votre engagement public en particulier, vous êtes conscients de l’importance de l’écoute, comme dynamique sociale qui active ces vertus. Il s’agit en effet de prêter attention aux besoins des familles et des personnes, en prenant soin tout spécialement des plus fragiles, pour le bien de tous.
La crise démographique et les difficultés des familles et des jeunes, la solitude des personnes âgées et le cri silencieux des pauvres, la pollution de l’environnement et les conflits sociaux sont des réalités qui ne vous laissent pas indifférents. Tandis que vous cherchez à y apporter des réponses, vous savez bien que nos villes ne sont pas des lieux anonymes, mais des visages et des histoires à garder comme des trésors précieux. Dans ce travail, on devient maire jour après jour, en grandissant comme administrateurs justes et dignes de confiance.
À ce propos, que vous serve d’exemple le vénérable Giorgio La Pira, qui, dans un discours aux conseillers municipaux de Florence, affirmait :
« Vous n’avez à mon égard qu’un seul droit : celui de me refuser votre confiance ! Mais vous n’avez pas le droit de me dire : Monsieur le Maire, ne vous occupez pas des personnes sans travail (licenciés ou chômeurs), sans logement (les expulsés), sans assistance (les personnes âgées, les malades, les enfants). C’est mon devoir fondamental. S’il y a quelqu’un qui souffre, j’ai un devoir précis : intervenir de toutes les manières, avec tous les moyens que l’amour suggère et que la loi fournit, afin que cette souffrance soit ou diminuée ou soulagée. Il n’existe pas d’autre règle de conduite pour un maire en général, et pour un maire chrétien en particulier » (Écrits, VI, p. 83).
La cohésion sociale et l’harmonie civique exigent avant tout l’écoute des plus petits et des pauvres : sans cet engagement, « la démocratie s’atrophie, elle devient un nominalisme, une formalité, elle perd sa représentativité, elle se désincarne parce qu’elle laisse le peuple à l’écart dans sa lutte quotidienne pour la dignité, dans la construction de son destin » (François, Discours, 5 novembre 2016). Face aux difficultés comme devant les occasions de développement, je vous exhorte à devenir des maîtres de dévouement au bien commun, en favorisant une alliance sociale pour l’espérance.
À la fin du Jubilé, je partage volontiers avec vous ce thème important que mon bien-aimé prédécesseur, le pape François, indiqua dans la Bulle d’indiction. Tous, écrivait-il, « ont besoin de retrouver la joie de vivre, car l’être humain, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1,26), ne peut se contenter de survivre ou de vivoter, de s’adapter au présent en se laissant satisfaire par des réalités uniquement matérielles. Cela enferme dans l’individualisme et corrode l’espérance, en générant une tristesse qui s’insinue dans le cœur, rendant aigres et intolérants » (Spes non confundit, 9).
Nos villes connaissent malheureusement des formes de marginalisation, de violence et de solitude qui demandent à être affrontées. Je voudrais attirer l’attention, en particulier, sur la plaie du jeu d’argent, qui ruine de nombreuses familles. Les statistiques en enregistrent en Italie une forte augmentation ces dernières années. Comme le souligne Caritas Italiana dans son dernier Rapport sur la pauvreté et l’exclusion sociale, il s’agit d’un grave problème éducatif, de santé mentale et de confiance sociale. Nous ne pouvons pas oublier non plus d’autres formes de solitude dont souffrent de nombreuses personnes : troubles psychiques, dépressions, pauvreté culturelle et spirituelle, abandon social. Ce sont des signes qui indiquent combien l’espérance est nécessaire. Pour en témoigner efficacement, la politique est appelée à tisser des relations authentiquement humaines entre les citoyens, en promouvant la paix sociale.
Don Primo Mazzolari, prêtre attentif à la vie de son peuple, écrivait que « le pays n’a pas seulement besoin d’égouts, de maisons, de routes, d’aqueducs, de trottoirs. Le pays a aussi besoin d’une manière de ressentir, de vivre, d’une manière de se regarder, d’une manière de se considérer comme frères » (Discours, Bologne 2006, p. 470). L’activité administrative trouve ainsi sa pleine réalisation, parce qu’elle fait croître les talents des personnes, en donnant une épaisseur culturelle et spirituelle aux villes.
Très chers, ayez donc le courage d’offrir de l’espérance aux gens, en projetant ensemble le meilleur avenir pour vos territoires, dans la logique d’une promotion humaine intégrale. Tandis que je vous remercie pour votre disponibilité à servir la communauté, je vous accompagne par la prière, afin qu’avec l’aide de Dieu vous puissiez affronter efficacement vos responsabilités, en partageant cet engagement avec vos collaborateurs et vos concitoyens. À vous et à vos familles, j’accorde de tout cœur la bénédiction apostolique et je vous adresse mes meilleurs vœux pour la nouvelle année. Merci !
Prions ensemble : Notre Père…
[Bénédiction]
Tous mes vœux et bonne année ! Et bon pèlerinage ! »
Source Vatican


