C’est un acte qui révèle bien plus qu’un simple éloignement de l’Église : La Conférence épiscopale de Belgique a confirmé hier que 4780 personnes avaient choisi, l’an dernier, de demander leur radiation des registres baptismaux. Ces chiffres, en apparence moins spectaculaires que les 14.000 désistements de 2023, confirment néanmoins une tendance alarmante : le sacrement de baptême, signe ineffaçable d’appartenance au Christ, est traité par beaucoup comme une option contractuelle que l’on pourrait annuler par un simple geste sur un registre.
Effacer son nom d’un registre de baptême ne saurait effacer le sceau éternel que Dieu a imprimé dans l’âme au jour de la grâce
Pourtant, il ne s’agit pas d’un simple acte administratif mais d’un geste spirituel grave : le refus conscient de la grâce reçue au baptême. Le baptême n’est pas une inscription à un club, mais une nouvelle naissance qui imprime dans l’âme un sceau éternel. Par ce sacrement, l’homme est arraché à l’esclavage du péché originel, adopté comme fils de Dieu, uni au Christ et incorporé à l’Église. Nul pouvoir humain, nulle décision administrative, ne peut effacer cette marque indélébile. C’est pourquoi ces démarches, loin d’annuler l’action de Dieu, traduisent plutôt un drame spirituel et une incompréhension profonde de ce qu’est vraiment la vie chrétienne.Dans son commentaire, le porte-parole Geert De Kerpel distingue ceux qui n’ont jamais pris leur foi au sérieux de ceux qui, écœurés par les scandales, veulent rompre. Mais réduire l’acte de renier son baptême à une simple réaction sociologique, c’est oublier la réalité spirituelle : on ne « défait » pas une grâce divine par la simple volonté de l’homme.
En Belgique, le geste prend un relief particulier. Le pays vit une crise profonde de la foi. Les églises se vident, les vocations s’effondrent, la catéchèse est en lambeaux. Depuis des années, l’épiscopat, gagné par une mentalité sécularisée, peine à offrir une parole claire et prophétique. La série documentaire « Godvergeten », qui a révélé des abus et la souffrance de nombreuses victimes, a achevé d’ébranler la confiance de beaucoup, mais a aussi servi de prétexte à une vague de « débaptisations » massives, comme si la faute des hommes effaçait la fidélité de Dieu.
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La situation est d’autant plus grave qu’elle survient moins d’un an après la visite du pape François en Belgique, en septembre 2024. Ce voyage, organisé pour le 600ᵉ anniversaire de l’Université catholique de Louvain, a tourné à la confrontation publique. Le roi Philippe et le Premier ministre Alexander De Croo ont profité de l’occasion pour rappeler au pape, dans des termes d’une sévérité inédite, le scandale des abus sexuels et la nécessité de mettre les victimes au centre. À Louvain, étudiants et professeurs ont interpellé François sur l’absence des femmes aux postes de responsabilité dans l’Église, sur l’exclusion de la communauté LGBTQ+ et sur l’injustice sociale. Devant ce tribunal moral, le pape a exprimé sa honte, a demandé pardon et a rencontré des victimes, mais les critiques se sont multipliées quand le Saint Père a rappelé la position de l’Eglise sur l’euthanasie : beaucoup ont dénoncé une Église discréditée, en retard sur les attentes du monde moderne, incapable de regagner son autorité morale.
Cette visite, au lieu de raviver la foi, a montré une Église belge fracturée et hésitante, tiraillée entre un progressisme mondain et une fidélité vacillante à la Tradition. Aujourd’hui encore, les fidèles attachés à la foi regardent avec angoisse la tempête qui secoue leur pays.
Faut-il rappeler que l’apostasie reste une blessure profonde infligée au Corps mystique du Christ ?
Mais le jour viendra où ces « radiés » comprendront que l’empreinte du baptême, indélébile, demeure en eux, pour leur salut ou leur jugement.À l’heure où l’Église de Belgique s’enfonce dans le relativisme et la confusion doctrinale, la consternation des fidèles attachés à la foi catholique est immense. Ils voient autour d’eux des frères et sœurs qui, au lieu de crier vers le Christ sauveur, se détournent de Lui comme on tournerait le dos à une institution humaine. Mais l’Église n’est pas un parti politique. Elle est l’Épouse du Christ. Et rejeter le Christ, c’est rejeter la vie éternelle.