Pour la première fois de son histoire, l’Autriche ne compte plus de majorité catholique. La part des fidèles est tombée en 2024 à 49,6 % de la population, marquant une rupture symbolique dans un pays profondément enraciné dans le catholicisme. Pourtant, derrière ce constat se dessinent aussi des signes d’espérance, avec une fréquentation des messes en hausse et des finances ecclésiales solides.Le nombre de sorties de l’Église a reculé en 2024 avec 71 531 départs, contre 85 163 en 2023 et 90 975 en 2022. Dans le même temps, 5 154 personnes ont rejoint ou retrouvé l’Église et 255 adultes ont reçu le baptême. On note également que 453 personnes ont annulé leur décision initiale de quitter l’Église après un dialogue pastoral.
La fréquentation dominicale montre une progression notable. Aux deux dimanches de comptage, 366 210 et 378 797 fidèles ont été recensés, soit une augmentation moyenne de 11 % par rapport à l’année précédente. À cela s’ajoute une participation estimée entre 800 000 et un million de personnes via la radio, la télévision et Internet, ce qui illustre l’attachement persistant des Autrichiens à la liturgie.Les sacrements reflètent néanmoins la tendance démographique. En 2024, 36 705 baptêmes ont été célébrés, un chiffre en baisse par rapport à 2023. Les mariages religieux ont été 7 537, également en recul. Le nombre de funérailles catholiques s’est établi à 47 353, en diminution par rapport aux années précédentes. En revanche, la première communion et la confirmation connaissent un léger regain, avec respectivement 45 685 et 39 677 célébrations.
La vie sacerdotale reste relativement stable. L’Autriche comptait 3 269 prêtres en 2024, légèrement moins que l’année précédente, tandis que le nombre de diacres permanents atteint 763, en progression. Le réseau paroissial demeure dense avec 4 167 paroisses et lieux de pastorale, même si les congrégations religieuses poursuivent leur déclin numérique.
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Sur le plan financier, l’Église autrichienne se trouve dans une situation robuste. Les contributions ecclésiales ont atteint 539,4 millions d’euros en 2024, contre 511 millions en 2023. Les revenus totaux des dix diocèses se sont élevés à 763,8 millions d’euros. Plus de 60 % des dépenses, soit 480,7 millions d’euros, ont été destinés aux paroisses et aux missions pastorales. Les charges de personnel ont représenté 453,2 millions d’euros, dont une large part pour les laïcs engagés dans la mission de l’Église.
Rappelons que l’histoire religieuse de l’Autriche plonge ses racines dans l’Antiquité tardive, lorsque le christianisme s’implanta progressivement dans les provinces romaines du Norique et de la Pannonie, au IIIᵉ et IVᵉ siècles. Après les invasions barbares et la désagrégation de l’Empire romain, la mission évangélisatrice connut un nouvel essor grâce à l’action décisive de saint Rupert de Salzbourg, qui fonda au VIIᵉ siècle le monastère bénédictin de Nonnberg et établit la base de l’Église autrichienne.
Par la suite, l’œuvre missionnaire de saint Boniface et l’essor des abbayes bénédictines et cisterciennes consolidèrent la foi catholique dans la région, faisant de l’Autriche un bastion du catholicisme au cœur de l’Europe. Au fil des siècles, les Habsbourg firent du catholicisme un pilier de leur monarchie, notamment après la Réforme protestante, lorsque le Concile de Trente inspira une vigoureuse restauration religieuse.
Aujourd’hui, l’Église autrichienne, marquée par les défis de la sécularisation et par une pluralité croissante, poursuit sa mission en s’appuyant sur un riche héritage spirituel et culturel. Si elle ne constitue plus une majorité statistique, elle demeure une présence vivante et influente, capable d’offrir aux fidèles comme à la société autrichienne des repères spirituels, une vie liturgique dynamique et une action sociale reconnue.Le passage sous le seuil des 50 % illustre bien une perte d’influence culturelle durable. Mais les données révèlent aussi une Église vivante, soutenue par une pratique liturgique stabilisée, des retours de fidèles et des finances saines. En dépit de sa minorisation statistique, le catholicisme continue d’habiter profondément la société autrichienne, invitant l’Église à poursuivre sa mission avec réalisme et confiance.