Depuis plusieurs années, un mouvement discret mais réel traverse l’Église en France. Dans un pays marqué par des décennies de recul de la pratique religieuse, certains indicateurs témoignent d’une vitalité inattendue. Les chiffres du catéchuménat, qui concernent les adultes et adolescents se préparant au baptême, ont atteint des niveaux inédits depuis plus de vingt ans. En 2025, plus de 17 800 catéchumènes doivent être baptisés à l’occasion de la fête de Pâques, dont plus de 10 000 adultes. Il s’agit d’une progression très nette par rapport à l’année précédente, et d’un niveau rarement observé dans l’histoire récente de l’Église catholique en France.
Cette croissance ne relève pas d’un simple effet statistique. Elle traduit une dynamique réelle, particulièrement marquée chez les jeunes adultes. Les 18–25 ans représentent une part importante des nouveaux baptisés, signe que la jeunesse est directement concernée par ce retour vers la foi chrétienne. Ce constat contredit en partie l’idée d’un christianisme réservé à des générations vieillissantes ou à des milieux socialement résiduels.
L’on modérera cet enthousiasme en précisant qu’il s’agit aussi d’un rattrapage post-Covid, mais qu’il y a quand même une dynamique réelle.
Au sein de ces nouveaux baptisés, un autre élément mérite l’attention. Les femmes y sont majoritaires, comme c’est le cas depuis plusieurs années dans le catéchuménat adulte. Cette donnée, régulièrement constatée par les diocèses, rejoint ce que révèle l’observation concrète de la vie de l’Église. Dans les paroisses, les groupes de prière, les aumôneries étudiantes, les parcours de préparation aux sacrements ou les pèlerinages, la présence des jeunes femmes est non seulement visible, mais souvent structurante. Elles sont fréquemment au cœur des dynamiques communautaires, engagées dans la prière, la formation et l’accompagnement spirituel.
Cette réalité contraste fortement avec la lecture médiatique dominante, qui tend à interpréter le renouveau religieux comme un phénomène identitaire, principalement masculin et idéologiquement orienté.
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Une telle grille d’analyse, si elle peut s’appliquer à certaines trajectoires individuelles, ne rend pas compte de la profondeur du mouvement observé. Elle ignore en particulier le rôle décisif joué par des jeunes femmes dont la démarche spirituelle ne s’inscrit ni dans un repli culturel ni dans une réaction politique.Pour beaucoup d’entre elles, la foi chrétienne est le fruit d’un chemin personnel, souvent long, parfois exigeant, mené dans un contexte largement sécularisé. Leur engagement ne procède pas d’un héritage sociologique, mais d’un choix réfléchi, nourri par une recherche de sens, de vérité et du sacré. Face au relativisme ambiant et à l’éclatement des repères anthropologiques, le christianisme apparaît comme une proposition spirituelle structurante, capable d’unifier la vie intérieure et l’existence concrète vers une réelle espérance.
Cet engagement se vit rarement dans la facilité. Assumer une pratique chrétienne visible dans les milieux universitaires, professionnels ou culturels expose davantage à l’incompréhension qu’à la reconnaissance. Ce coût social, loin de décourager ces jeunes femmes, souligne au contraire la solidité de leurs convictions et la solidité de leur foi qui n’est ni conformiste ni opportuniste. Elle est exigeante, incarnée et durable.
Le contexte général de l’Église en France rend cette dynamique d’autant plus significative. La baisse continue des baptêmes d’enfants, le vieillissement des assemblées dominicales et la fragilisation de nombreuses structures ecclésiales dessinent un paysage souvent préoccupant. Le développement du catéchuménat adulte ne compense pas ces fragilités, mais il révèle l’existence d’un courant spirituel profond, porté par des personnes qui choisissent librement l’Église, sans pression sociale ni avantage culturel.Le renouveau chrétien en France demeure fragile, minoritaire et inégalement réparti. Il ne saurait être idéalisé ni instrumentalisé. Mais les faits sont là. La progression du catéchuménat, la place centrale des jeunes adultes et la forte implication des femmes invitent à revoir certaines lectures trop rapides. Loin d’un simple phénomène identitaire, ce renouveau s’enracine dans une quête spirituelle profonde, et les jeunes femmes en sont aujourd’hui l’un des visages les plus constants et les plus déterminants.


