La commission d’enquête parlementaire présidée par Fatiha Keloua Hachi, et dirigée par les députés Paul Vannier (LFI) et Violette Spillebout (Renaissance), vient de rendre un rapport aussi volumineux que polémique sur les violences en milieu scolaire. Si son point de départ – les révélations autour de l’affaire Bétharram – justifie un nécessaire travail d’investigation, certaines conclusions inquiètent profondément les fidèles attachés à la tradition catholique et au respect de la liberté religieuse.
Car au-delà du constat, déjà connu, d’une chaîne de responsabilités souvent défaillante au sein de l’Éducation nationale et de certains établissements privés, c’est à l’Église elle-même que s’adresse une charge d’une rare violence, s’attaquant frontalement à l’un de ses sacrements les plus inviolables : la confession.
« Recommandation n° 34 : Lever systématiquement le secret obtenu dans le cadre de la confession dès lors qu’il porte sur des faits de violences commis sur un mineur de moins de 15 ans, qu’ils soient en cours ou non. »
Une telle proposition, si elle venait à être suivie d’effet législatif, constituerait une rupture inédite avec la tradition bimillénaire de l’Église. Le secret de la confession, rappelé avec force par le droit canon et défendu sans compromis par les papes successifs, est considéré comme absolu. Il ne peut être levé ni par le pénitent, ni par l’État, ni même par le pape. Le catéchisme de l’Église catholique est clair : « Tout prêtre qui entend les confessions est tenu, sous peine de très graves sanctions, au secret absolu concernant les péchés révélés à lui dans la confession » (CEC, n°1467).Cette volonté de subordonner le sacré au temporel n’est pas une première. Mais elle intervient dans un climat de défiance croissante envers les établissements catholiques, présentés dans le rapport comme des lieux où règne une « loi du silence », une autorité « verticale » propice aux abus, et une culture d’influence et de notabilités empêchant toute dénonciation.
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L’amalgame est redoutable. Sans nier les graves fautes et crimes qui ont pu être commis – et que l’Église elle-même, par la voix du pape et de nombreuses conférences épiscopales, ne cesse de condamner – faut-il pour autant piétiner ce qui constitue le cœur même de la vie sacramentelle ?Les prêtres entendront-ils demain des pénitents avec un micro de l’État sur l’épaule ? Le confessionnal deviendra-t-il une extension du bureau du procureur ? Ce sont des questions cruciales que pose cette recommandation n°34, dont les implications dépassent de très loin la seule question des violences scolaires.
Dans un passage du rapport, on lit avec stupeur : « Secret médical, secret de la confession : des obstacles à lever ? » L’association entre la discrétion thérapeutique et le silence du confessionnal révèle une confusion grave entre l’accompagnement professionnel et le sacrement divin. L’un est un cadre humain, l’autre, un lieu de grâce.
L’Église de France acceptera-t-elle ce chantage institutionnel ? Osera-t-elle encore, comme elle l’a toujours fait, rappeler que c’est justement en protégeant la confidence sacramentelle qu’elle peut parfois sauver des âmes, y compris celles des bourreaux, et orienter vers une vraie conversion, parfois suivie de dénonciations volontaires ?L’enjeu est capital. Si demain, un prêtre devait briser ce sceau sacré, ce ne serait pas seulement une atteinte à la conscience, mais à la liberté religieuse elle-même. Et si l’État persistait, ce serait alors une persécution masquée, au nom d’un bien qu’il prétend supérieur à celui de Dieu.