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Les femmes catholiques seront-elles en grève durant le Carême ?

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"Grève des femmes catholiques : témoignage mondial pour l'égalité" , une mobilisation minoritaire mais amplifiée médiatiquement

Un mouvement féministe radical, soutenu par la Women’s Ordination Conference (WOC), appelle les femmes catholiques à une grève mondiale pendant le Carême 2025 pour protester contre ce qu’il qualifie de « trahison » de l’Église sur la question de l’ordination des femmes. Ce projet, baptisé « Catholic Women Strike: Global Witness for Equality » ( « Grève des femmes catholiques : témoignage mondial pour l’égalité ») , invite les catholiques engagées dans la vie paroissiale à suspendre toute participation active, qu’il s’agisse de la messe, du bénévolat ou du soutien financier à l’Église.

Le mécontentement des militantes féministes catholiques est né du Synode sur la synodalité qui s’est achevé en octobre dernier à Rome. Selon Kate McElwee, directrice exécutive de la Women’s Ordination Conference, l’absence de décision sur le diaconat féminin et le manque d’engagement clair pour des changements concrets dans la gouvernance de l’Église ont été perçus comme une trahison.

Après des années de discussions, le document final du synode à affirmer que la question de l’accès des femmes au diaconat « reste ouverte »; insuffisant pour ce suffragettes de l’Eglise … . Pour les militantes, cette formulation est un prétexte pour gagner du temps et éviter toute réforme substantielle. Elles dénoncent notamment le rôle du cardinal Victor Manuel Fernández, responsable du groupe de travail sur le ministère féminin, qui selon elles a brillé par son absence lors d’une réunion cruciale sur le sujet.

Capture de la page Facebook de Catholic Women Strike

Ce blocage est d’autant plus critiqué que le pape François lui-même a commandé à deux reprises, en 2016 et 2020, des études sur l’histoire des diaconesses dans l’Église. Si ces rapports n’ont jamais été publiés officiellement, de nombreuses voix affirment qu’ils confirment l’existence d’un rôle liturgique féminin dans les premiers siècles du christianisme. Pour certaines militantes, il ne s’agit plus d’un débat théologique mais d’une résistance politique et institutionnelle.

Une contestation qui dépasse les frontières

La WOC n’est pas seule dans ce combat. D’autres organisations féministes catholiques à travers le monde s’associent à l’appel à la grève, notamment en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Des figures du féminisme catholique, comme Miriam Duignan, du mouvement britannique Catholic Women’s Ordination, affirment que les femmes accomplissent déjà une grande partie des tâches pastorales sans reconnaissance officielle.

Pour ces militantes, il est urgent de faire entendre leur voix à un moment où les vocations sacerdotales masculines sont en chute libre, notamment en Europe. Elles estiment que l’ordination de diaconesses ne serait qu’une première étape vers le sacerdoce féminin, un objectif qu’elles jugent désormais inévitable.Dans ce contexte, la grève du Carême vise à rendre visible l’influence des femmes dans la vie de l’Église en démontrant l’impact de leur absence. Certaines appellent également à un boycott des dons financiers, espérant ainsi accentuer la pression sur la hiérarchie ecclésiale.

Cette campagne reflète une fracture croissante entre les féministes progressistes et la doctrine de l’Église catholique. L’enseignement de l’Église est pourtant clair : le sacerdoce est réservé aux hommes, non par discrimination, mais en raison du modèle du Christ et de la tradition apostolique.

Le pape Jean-Paul II, dans sa lettre apostolique Ordinatio Sacerdotalis (1994), avait tranché la question en affirmant que « l’Église n’a pas le pouvoir de conférer l’ordination sacerdotale aux femmes » et que cette décision devait être considérée comme « définitive ». Cette position a été confirmée par Benoît XVI et réaffirmée par le pape François, qui a pourtant encouragé une plus grande place des femmes dans la gouvernance ecclésiale.

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Malgré cela, les militantes considèrent que la hiérarchie catholique utilise des « tactiques de retardement » pour éviter d’affronter la question de l’ordination. Elles dénoncent un manque de courage politique et affirment que « l’étude interminable du rôle des femmes est une stratégie patriarcale destinée à maintenir le statu quo ».

Bien que relayé par de nombreux « médias progressistes« , ce mouvement ne semble concerner qu’une infime minorité de fidèles. La grande majorité des catholiques pratiquants, hommes et femmes, demeure attachée à la tradition de l’Église et ne voit pas dans l’absence de femmes prêtres une injustice à réparer.Cependant, cette grève s’inscrit dans une stratégie de pression médiatique et institutionnelle visant à influencer les prochains débats synodaux. L’objectif des militantes n’est pas seulement d’interpeller le Vatican, mais aussi de mobiliser les catholiques progressistes en vue de futures réformes ecclésiales.

Le Carême, temps de conversion et de prière, se transformera-t-il en une période de confrontation avec l’Église ? Rien n’est moins sûr. Pour l’instant, ce mouvement illustre surtout un bras de fer idéologique entre un courant féministe contestataire et une institution attachée à la tradition bimillénaire.

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