L’histoire des Juifs en Iran remonte à l’époque biblique. Les livres d’Isaïe, de Daniel, d’Esdras et de Néhémie relatent la vie des Juifs sur la terre de Perse, soulignant le respect témoigné par les souverains achéménides à leur égard. Cyrus le Grand, Darius et Xerxès ont permis le retour des Juifs à Jérusalem et la reconstruction du Temple, comme le mentionne Esdras 6:14. Ce geste marqua une période d’influence et d’établissement stable pour les Juifs en Perse dès le VIe siècle av. J.-C.
Les premiers Juifs sont arrivés dans l’actuel Iran vers 722 av. J.-C., déportés par Salmanazar V après la chute du royaume d’Israël. Cette migration initiale fut suivie par celle des exilés de Babylone, capturés par Nabuchodonosor en 586 av. J.-C. et relâchés après la victoire perse. Dès cette époque, la communauté juive vivait principalement repliée sur elle-même, mais formait une composante importante de la Perse, s’étendant jusqu’à l’Afghanistan, l’Azerbaïdjan, l’Inde du Nord et l’Asie centrale.
Sous Cyrus, le seul roi non-juif désigné comme « messie » par la Bible, les Juifs obtinrent une liberté religieuse sans précédent, contrastant avec l’oppression des souverains assyriens et babyloniens. Son décret autorisant la reconstruction du Temple est consigné dans Esdras 1:1–4. Le Second Temple, dont la construction débuta sous Cyrus, fut achevé sous Darius en 515 av. J.-C. après consultation des prophètes Aggée et Zacharie.L’épisode du Livre d’Esther, souvent associé à Xerxès, évoque un projet d’extermination des Juifs par Haman, contrecarré grâce à la reine Esther et Mardochée. Ce récit est célébré chaque année lors de Pourim, une fête qui rappelle la revanche juive contre leurs ennemis. Certains textes juifs postérieurs présentent Cyrus comme fils d’Esther, bien que cette hypothèse soit rejetée par les historiens.
Lire aussi
Peu de traces juives subsistent de la période parthe, où les Juifs vivaient dans une monarchie décentralisée. Malgré quelques violences, les rois parthes adoptèrent une politique globalement tolérante envers les religions, et certains auraient même embrassé le judaïsme. En 40 av. J.-C., les Parthes capturèrent Hyrcan II, grand prêtre juif, dans un contexte de tensions régionales.
Sous les Sassanides (à partir de 226), le zoroastrisme devint religion d’État, marginalisant les minorités religieuses. Toutefois, certains souverains comme Shapour Ier et son successeur Shapour II furent favorables aux Juifs. Ce dernier entretint de bons rapports avec le rabbin Raba. Son fils Yazdgard Ier épousa Shushandukht, une Juive qui aurait fondé le quartier juif d’Ispahan. Mais les relations se dégradèrent avec le temps : exécutions, conversions forcées et pogroms furent ordonnés sous d’autres rois comme Peroz Ier ou Yazdgard II.
Les Juifs participèrent activement à la conquête de Jérusalem par les Sassanides en 614, contre l’Empire byzantin, contribuant à l’établissement provisoire d’une autorité juive dans la ville.Avec l’arrivée des Arabes, la situation évolua. Puis vinrent les Mongols, les Safavides, les Qajars, la dynastie Pahlavi, puis la République islamique. À chaque période, la condition des Juifs fut tantôt protégée, tantôt compromise. Mais c’est surtout depuis 1979 que les Juifs d’Iran vivent dans une insécurité profonde. La République islamique les tolère à condition qu’ils ne montrent aucune proximité avec Israël. Cette ligne rouge non négociable les prive de toute liberté d’expression sur la question du sionisme.
Héritiers d’un passé glorieux, les Juifs iraniens sont aujourd’hui otages d’une idéologie qui nie leur histoire millénaire dès lors qu’elle s’avère favorable à Israël. Une mémoire menacée d’effacement si elle n’est pas défendue.Officiellement protégés par le régime, ils n’en demeurent pas moins vulnérables, accusés à la moindre occasion de collusion avec Israël et contraints à afficher un antisionisme de façade. Leur quotidien est marqué par une relative liberté religieuse ,synagogues, écoles, bains rituels ,mais dans un cadre strictement contrôlé. La peur, toujours présente, limite les contacts avec Israël et interdit toute critique politique.
Malgré des tentatives passées pour encourager leur départ, la majorité reste, attachée à ses biens et à sa langue, incapable d’imaginer une vie ailleurs. Les autorités iraniennes cultivent une distinction artificielle entre judaïsme et sionisme pour se présenter comme tolérantes, tout en maintenant une propagande antisioniste virulente.
Depuis le début du conflit avec Israël , pour certains observateurs « Les Juifs d’Iran sont tous des otages potentiels ». Soumis à une véritable propagande ils ont été contraints de publier ce communiqué le 15 juin dernier :
Communiqué de Presse imposé à la communauté juive d’Ispahan (IRNA, 25 khordad 1404 / 15 juin 2025)
« La communauté juive d’Ispahan condamne les actes de violence sauvages perpétrés par le régime sioniste sur le territoire de la République islamique d’Iran.Les brutalités sionistes, qui manquent totalement de toute éthique humaine, ont causé la mort de plusieurs de nos chers compatriotes, y compris des enfants innocents, et nous ont profondément attristés.
Nous présentons nos condoléances au peuple noble d’Iran pour la perte des martyrs – le général Salami, le général de division Mohammad Bagheri, le général Gholamali Rashid, le général Haji‑Zadeh, le Dr Fereydoun Abbasi, le Dr Mohammad‑Mehdi Tehranchi, le Dr Abdol‑Hamid Minou‑Chehr et d’autres compatriotes, victimes innocentes de ces violences.
Nous sommes convaincus que la République islamique d’Iran, fière et honorée, répondra au régime sioniste par une riposte écrasante et le fera regretter ses actes infâmes. »