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Liturgie : entre mensonges et dissimulation, le Vatican a-t-il manipulé la vérité pour faire disparaître la messe traditionnelle ?

Monseigneur Patrick Chauvet lors de la messe d'envoi du 43 eme pèlerinage de Chartres à l'église Saint Sulpice @tribunechretienne
Monseigneur Patrick Chauvet lors de la messe d'envoi du 43 eme pèlerinage de Chartres à l'église Saint Sulpice @tribunechretienne
Le constat principal est sans équivoque, la majorité des évêques ayant répondu considéraient que Summorum Pontificum avait été une mesure bénéfique

Le 16 juillet 2021, le pape François promulguait Traditionis Custodes, un décret venant limiter sévèrement la célébration de la messe traditionnelle selon le missel de 1962, abrogeant de fait la libéralisation accordée par Benoît XVI avec Summorum Pontificum. Pour justifier cette décision, le pape affirmait s’être appuyé sur les réponses des évêques du monde entier à un questionnaire envoyé en 2020. Selon lui, ces réponses manifestaient un malaise profond et l’échec du projet de paix liturgique initié par ses prédécesseurs.

Or, la journaliste américaine Diane Montagna vient de révéler, dans une enquête exclusive, l’existence du rapport officiel de la Congrégation pour la doctrine de la foi, resté jusqu’ici confidentiel. Ce document, intitulé Giudizio Complessivo ( Appréciation d’ensemble) , dresse une synthèse des réponses des évêques à cette fameuse consultation, et il contredit point par point les motifs invoqués par Traditionis Custodes.

Le constat principal est sans équivoque, la majorité des évêques ayant répondu considéraient que Summorum Pontificum avait été une mesure bénéfique, qu’elle avait contribué à la paix ecclésiale, attiré de jeunes fidèles, favorisé les vocations, et permis une meilleure unité dans la diversité des formes liturgiques. Beaucoup d’entre eux exprimaient leur satisfaction, tout en reconnaissant que là où le dialogue entre évêques et communautés traditionnelles avait été bien mené, la situation était pacifiée.

Loin du tableau sombre dressé en 2021, le rapport révèle que les véritables résistances provenaient d’une minorité de prélats, souvent peu informés ou réfractaires, notamment en Italie et dans les pays hispanophones. Ce n’était donc pas un rejet général du motu proprio de Benoît XVI, mais une série d’observations disparates, souvent liées à une méfiance personnelle, qui ont été grossies pour justifier une décision centralisatrice.

Plus troublant encore, certains passages du rapport mettaient en garde contre les conséquences d’une suppression de Summorum Pontificum. Ils prévoyaient un regain de tensions, un sentiment d’injustice chez les fidèles attachés à la liturgie ancienne, et même un risque de schisme. Des craintes qui, aujourd’hui, semblent confirmées par les divisions croissantes observées depuis trois ans.

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Le rapport confirme aussi ce que beaucoup d’observateurs avaient noté, la vitalité du rite ancien, notamment auprès des jeunes. Les évêques soulignaient que les groupes stables étaient souvent composés de jeunes familles, de convertis, ou de personnes revenues à la pratique grâce à la solennité, au silence, à la beauté du chant grégorien, et à la profondeur doctrinale des homélies.

Par ailleurs, les évêques interrogés exprimaient leur attachement à l’ancienne Commission Ecclesia Dei, absorbée depuis dans la Congrégation pour la doctrine de la foi. Ils soulignaient son rôle précieux comme interlocuteur compétent pour accompagner ces communautés spécifiques, et redoutaient un traitement plus administratif et autoritaire de leur situation.

Ce rapport, dont Diane Montagna a révélé plusieurs extraits, jette une lumière crue sur le processus ayant mené à Traditionis Custodes. Il semble clair que certaines données ont été ignorées ou dissimulées, et que la décision du pape François n’a pas reposé sur une analyse objective des résultats de la consultation. Le document met également en évidence que le pape, selon des sources internes, avait expressément demandé à consulter ce rapport avant la publication de son décret, ce qui exclut l’hypothèse d’une simple méconnaissance.

Le témoignage de Mgr Allen Vigneron, ancien archevêque de Detroit, vient renforcer cette impression. Répondant à la question finale du questionnaire, il plaidait pour le maintien de Summorum Pontificum, soulignant les fruits abondants de ce motu proprio, tant dans la vie des fidèles que dans l’unité de l’Église. Il rappelait que les deux formes du rite romain ne s’excluent pas mais se complètent, et que leur coexistence ne nuit en rien à l’ordre liturgique de l’Église.Depuis 2021, les interdictions de la messe traditionnelle se sont multipliées, comme à Détroit où, à compter du 1er juillet 2025, elle est désormais bannie des églises paroissiales. Ces mesures s’appuient sur une interprétation stricte de Traditionis Custodes, renforcée par un rescrit romain de 2023. Mais à la lumière du Giudizio Complessivo, une question brûlante demeure, cette répression liturgique s’est-elle fondée sur une falsification du réel ?

À l’heure où des dizaines de milliers de fidèles, souvent jeunes et fervents, ne demandent qu’à prier dans la paix des autels, cette révélation ouvre une brèche. Et elle pose une question grave, jusqu’où certains responsables dans l’Église sont-ils prêts à aller pour faire disparaître un trésor que Benoît XVI appelait « une richesse pour toute l’Église » ?

Source dianemontagna.substack.com

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