Alors que Lourdes s’apprête à vivre une nouvelle saison de pèlerinages, une situation paradoxale inquiète les organisateurs : il y a trop de volontaires, mais pas assez de malades. Un phénomène inattendu qui oblige les diocèses à solliciter activement les paroisses et les maisons de retraite.Durant les pics de fréquentation estivale, le sanctuaire marial du sud-ouest de la France peut compter jusqu’à trois bénévoles pour un seul pèlerin à aider. À l’occasion du centenaire du pèlerinage de l’archidiocèse de Paris, organisé pendant la Semaine sainte, ce déséquilibre est déjà visible : il y a presque deux fois plus de volontaires que de malades inscrits. Résultat : certains jeunes, venus avec enthousiasme pour servir, seront contraints de repartir sans avoir pu participer pleinement.
Le père Stéphane Gravereau, responsable des pèlerinages pour l’archidiocèse de Paris, souligne : « Ils viennent chercher une expérience forte, qui donne du sens à leur vie quotidienne, souvent vide de repères. »
Les raisons de ce déséquilibre sont multiples. La pandémie de Covid-19 a laissé des traces durables : de nombreux aînés se montrent toujours réticents à voyager en groupe, préférant des chambres individuelles aux dortoirs collectifs traditionnels de Lourdes.« Nous avons aussi contacté de nombreuses maisons de retraite pour voir si certains résidents accepteraient de venir », confie la docteure Astrid Lalanne, impliquée dans l’organisation du pèlerinage parisien, au magazine La Vie.
À cela s’ajoutent des difficultés logistiques. Les fauteuils roulants motorisés occupent plus de place dans les trains spéciaux réservés aux pèlerinages, et les maisons de retraite manquent souvent de personnel pour accompagner les malades. Le risque de perdre des aides financières de l’État si un résident s’absente plus de cinq jours complique encore les départs.
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Initialement conçu pour accueillir les invalides, Lourdes reçoit désormais un nombre croissant de pèlerins souffrant de troubles mentaux, mais capables de marcher seuls. Si ces profils nécessitent un autre type d’accompagnement, ils ne résolvent pas le manque de malades au sens classique du pèlerinage.De leur côté, certains jeunes bénévoles arrivent avec peu de formation religieuse, ce que le recteur du sanctuaire, le père Michel Daubanes, perçoit comme une opportunité : « Lourdes est une porte d’entrée merveilleuse vers la foi. »
Lourdes accueillera également cet été le 80e anniversaire de Pax Christi International, du 18 au 20 juillet. Fondé en 1945 par des catholiques français pour promouvoir la réconciliation avec les Allemands, le mouvement pacifiste tient à revenir à Lourdes, lieu du premier congrès international de 1948. « Un lieu d’espérance, et nos expériences partagées seront source d’espérance pour tous », annonce l’organisation.
Mgr Philippe Ballot, archevêque de Metz et président de Pax Christi France, présidera cet événement commémoratif.
Alors que Lourdes reste un haut lieu spirituel et symbolique, cette nouvelle donne pose question : comment faire venir à nouveau les malades, pour que les jeunes puissent vraiment servir ? Un défi pastoral et logistique, mais aussi une occasion de repenser la mission de ce lieu unique.