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Monseigneur Cador acceptera-t-il de désacraliser une église romane ?

église de Saint-Hilaire-Petitville - DR
église de Saint-Hilaire-Petitville - DR
C’est une décision grave qui se profile dans le diocèse de Coutances et Avranches. L’église romane de Saint-Hilaire-Petitville, dans la Manche, pourrait bientôt être désacralisée

Une demande officielle de désacralisation a été adressée à l’évêque de Coutances et Avranches, Monseigneur Jacques Cador, concernant l’église de Saint-Hilaire-Petitville, édifice roman des Xe-XIIe siècles. La paroisse et la municipalité de Carentan-les-Marais souhaitent en faire un lieu destiné à des activités culturelles…L’église de Saint-Hilaire, construite dans le style roman, se dresse encore au cœur du village. Même si elle n’accueille plus la messe dominicale, elle demeure un signe de la présence de Dieu, un témoin de la foi populaire, et un refuge silencieux pour ceux qui cherchent encore un lieu pour prier.

On évoque volontiers une « nouvelle vie » pour ces lieux, expositions, concerts, événements culturels. Mais ce langage masque une réalité plus austère, la rupture entre une communauté chrétienne et son sanctuaire. Et cette rupture, lorsqu’elle est entérinée par l’évêque lui-même, engage bien plus qu’une décision pratique ou patrimoniale.A-t-on tout tenté pour éviter cela ? Une messe annuelle ? Un pèlerinage local ? Une présence pastorale régulière, même discrète ? Peut-on affirmer que l’on a épuisé toutes les options avant de renoncer à la sainteté de ces murs ?Des voix s’élèvent dans la région, y compris parmi les fidèles des alentours, qui s’interrogent : n’aurait-on pas pu proposer un projet de préservation spirituelle, plutôt qu’un simple transfert d’usage ? Car désacraliser une église, ce n’est pas seulement l’adapter à un autre usage. C’est acter qu’elle n’est plus, aux yeux de l’Église elle-même, un lieu habité par Dieu.Nous avons tenté de joindre le secrétariat de l’évêché de Coutances pour recueillir la position officielle de Monseigneur Cador. À ce jour, aucune réponse ne nous a été adressée.

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On nous objectera, comme toujours, les raisons bien connues, le manque de prêtres, la faiblesse de la pratique dominicale, la nécessité de rationaliser les lieux de culte. Ces arguments, répétés depuis des décennies, semblent désormais fonctionner comme des automatismes. Ils s’appuient sur une logique de gestion qui, bien qu’efficace à court terme, ne dit rien de l’appel évangélique à maintenir vivante la présence du sacré dans nos campagnes.À cela, nous répondrons qu’une église n’est pas une salle parmi d’autres, et qu’un lieu consacré ne se remplace pas sans perte. Là où l’on cesse de croire qu’un sanctuaire peut encore porter du fruit, on cesse aussi de croire en la puissance silencieuse de la prière, du signe, de la pierre offerte à Dieu.

Monseigneur Cador a-t-il pris toute la mesure d’un tel acte ? A-t-il entendu les fidèles qui, sans forcément réclamer un retour complet à la vie paroissiale, refusent de voir disparaître une présence sacrée dans leur village ? La voix des catholiques de Carentan-les-Marais et des alentours mérite d’être écoutée, car ils sont les premiers concernés.Cette décision engage bien plus que la gestion d’un bâtiment ancien. Elle touche à notre rapport au sacré, à la mémoire, à la continuité du culte dans nos territoires. Désacraliser une église, c’est poser un acte qui, pour beaucoup, ressemble à un abandon.

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