« Un homme est grand quand il est à genoux devant Dieu » : cette parole du cardinal Robert Sarah pourrait presque servir de préface spirituelle au communiqué que Monseigneur Alberto Rojas, évêque de San Bernardino en Californie (États-Unis), a publié à l’approche de l’Avent 2025. Dans ce texte appelé à entrer en vigueur dès le début de la nouvelle année liturgique, le prélat réaffirme avec clarté la dimension spirituelle de la génuflexion, geste fondateur du rite romain. En répondant à un désir croissant de révérence et de silence sacré, il entend aider les fidèles à entrer plus profondément dans le mystère de l’Eucharistie.
L’évêque ouvre son instruction en rappelant l’enseignement de Benoît XVI, pour qui le cœur du croyant doit être constamment en recherche de la manière la plus juste d’honorer Dieu.
La liturgie, écrit-il en substance, est un acte reçu, un héritage vivant issu de la prédication apostolique et façonné par les siècles. Si le rite romain demande régulièrement à l’assemblée de s’agenouiller en présence de l’Eucharistie, ce n’est ni par automatisme ni par archaïsme : c’est parce que le corps exprime ce que l’âme croit. La foi catholique n’a jamais dissocié l’attitude intérieure du geste extérieur.Il rappelle ensuite que la Présentation générale du Missel romain confie explicitement aux évêques diocésains la responsabilité de déterminer si les fidèles doivent être à genoux entre l’Agnus Dei et la communion. Loin des débats passés, parfois stériles, Monseigneur Rojas souligne que cette liberté n’est pas un caprice : elle est inscrite dans le rite lui-même. Chaque évêque doit discerner ce qui, dans son diocèse, favorise le mieux la dévotion eucharistique. Sa décision, précise-t-il, n’est « ni correcte ni incorrecte en elle-même », puisque la liturgie prévoit cette marge pastorale.
L’évêque revient aussi sur l’histoire longue de l’agenouillement. Ce geste, souvent réduit à une habitude, fut en réalité l’expression progressive d’une conscience eucharistique de plus en plus profonde.
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Les premiers chrétiens adoptaient parfois la station debout, signe de la Résurrection, mais ils n’ont jamais cessé de reconnaître dans l’agenouillement un acte d’adoration, surtout lorsque la compréhension du mystère eucharistique s’est enrichie au fil des siècles. Le geste n’a rien de désuet : il est une manière d’entrer humblement dans la lumière de Celui qui se donne.L’évêque prend soin de rappeler que l’Église, fidèle à sa tradition, n’impose jamais l’impossible. Ceux qui, en raison de l’âge ou d’une fragilité, ne peuvent s’agenouiller, sont invités à exprimer leur foi par une inclination profonde. L’essentiel n’est pas la performance, mais la vérité du cœur : c’est la disposition intérieure qui donne au geste sa signification.
Cette décision s’inscrit dans un mouvement plus vaste de redécouverte du sens de l’adoration, particulièrement visible chez de nombreux jeunes catholiques. Beaucoup aspirent à une liturgie plus silencieuse, plus contemplative, où chaque geste possède un sens et une profondeur. La démarche du diocèse de San Bernardino n’est donc pas un retour en arrière, mais un retour à l’essentiel : placer le mystère eucharistique au centre, avec une cohérence nouvelle entre la foi professée et le geste accompli.En définitive, la génuflexion est plus qu’une posture : elle est un acte théologal. Elle exprime la foi en la présence réelle, elle manifeste l’amour, elle rappelle que Dieu seul est Dieu. Elle dit la petitesse de l’homme et la grandeur de Dieu, non pour abaisser l’homme, mais pour le relever. S’agenouiller devant Dieu, c’est entrer dans la vérité, dans l’humilité qui ouvre à la joie. Dans un monde où l’homme oublie parfois la mesure de sa propre grandeur, l’Église rappelle ici que celle-ci ne se trouve pas dans l’affirmation de soi, mais dans l’adoration. Car aucune parole ne proclame mieux la foi que ce geste silencieux qui dit tout.
Texte intégral traduit du communiqué du diocèse de San Bernardino
Nouvelles normes diocésaines concernant la génuflexion
(pour mise en œuvre à l’Avent 2025)
Chers frères et sœurs,
Que la paix soit avec vous et vos familles. Le pape Benoît XVI a un jour commenté qu’un catholique croyant doit être constamment en quête de la manière juste d’honorer le Dieu vivant. Sous de nombreux aspects, le fait que Dieu entre dans l’histoire humaine signifie que l’Église prie toujours en demeurant enracinée dans la prédication des Apôtres, au sein d’une tradition culturelle, théologique, mystique et liturgique particulière, appelée un Rite. Pour le diocèse de San Bernardino, aucune tradition rituelle n’est aussi importante que celle irriguée par le sang des saints Pierre et Paul à Rome. Le rite romain est unique en ce qu’il demande régulièrement à l’assemblée de s’agenouiller en présence de l’Eucharistie, une pratique qui, au fil des ans depuis le Concile, a suscité une certaine gêne.
Fondé sur le fait que chaque évêque, comme principal liturgiste de son diocèse, doit chercher à accroître la dévotion eucharistique de son peuple et, ayant entendu le désir du peuple pour une plus grande révérence, je souhaite promulguer les normes suivantes en expliquant quatre points :
- La GIRM 43 (Présentation générale du Missel romain) laisse la question de s’agenouiller de l’Agnus Dei jusqu’au début de la Communion à la seule discrétion de l’Évêque diocésain. Chaque évêque a l’obligation de discerner sérieusement, selon sa propre prière, les gestes et attitudes corporelles qui communiquent aux fidèles que le Seigneur Ressuscité est réellement présent. Puisque la GIRM laisse cette décision entièrement à l’Évêque diocésain, la décision de chaque évêque n’est ni correcte ni incorrecte. Un évêque peut choisir l’une des options possibles tandis que l’évêque d’un diocèse voisin peut librement en choisir une autre. Ce pouvoir lui est donné par le rite lui-même.
- S’agenouiller et se tenir debout sont tous deux des gestes traditionnels dans le rite romain. L’agenouillement existe comme norme depuis le Moyen Âge et est devenu obligatoire pour les catholiques seulement à partir des années 1500. La GIRM 6 nous demande de restaurer le rite selon la norme des saints Pères. Certains de nos pères dans la foi romaine restaient debout, d’autres s’agenouillaient. Les deux attitudes sont en cohérence avec ce que nous avons reçu. Ce qui était normatif pour eux ne peut être considéré comme étranger pour nous.
- L’Église n’exige jamais l’impossible. Dans toute l’histoire de l’Église catholique, si quelqu’un était incapable de s’agenouiller en raison de l’âge ou d’une maladie, l’Église a toujours permis à la personne de s’asseoir et d’incliner la tête avec révérence pendant la consécration du pain et du vin. » ( Traduction Tribune Chrétienne )


