Lundi 17 novembre, la visite de la ministre de la Culture comprenait un parcours de plusieurs sites patrimoniaux dans la Vienne. À Poitiers, elle a commencé son déplacement par Notre-Dame-la-Grande, où elle a déclaré que « Notre-Dame-la-Grande à Poitiers est la Notre-Dame de Paris locale », soulignant ainsi la place particulière que cet édifice occupe dans le paysage régional.
Notre-Dame-la-Grande est une église collégiale romane située au cœur de Poitiers, dont les premières mentions remontent au Xe siècle sous le nom de Sancta Maria Major, en référence à Sainte-Marie-Majeure de Rome. Rebâtie au XIe siècle, elle est consacrée en 1086 par celui qui deviendra le pape Urbain II. Au début du XIIe siècle, l’édifice est transformé, allongé et doté de sa célèbre façade sculptée, chef-d’œuvre du roman poitevin. Aux XVe et XVIe siècles, de riches familles poitevines ajoutent plusieurs chapelles privées. En 1562, les huguenots pillent l’église, détruisent les reliques et décapitent de nombreuses statues. Classée monument historique dès 1840, la collégiale connaît d’importantes restaurations au XIXe siècle, puis une vaste campagne entre 1992 et 2004. Une nouvelle restauration, lancée en 2024, vise à sauvegarder ses peintures intérieures, ce qui entraîne sa fermeture au public jusqu’en 2027. Édifice emblématique, Notre-Dame-la-Grande demeure aujourd’hui l’un des plus beaux témoignages de l’art roman en France.
« Je suis ici pour rappeler le soutien de l’État en faveur du patrimoine religieux français »
On ne peut que saluer qu’une responsable nationale reconnaisse clairement la valeur du patrimoine religieux, qui n’est pas seulement un ensemble de pierres anciennes mais le témoignage d’une histoire spirituelle qui a façonné la France. Pourtant, cette déclaration soulève aussi des interrogations légitimes. Beaucoup de fidèles, d’élus locaux et de bénévoles espèrent désormais que ces paroles se traduiront en actes concrets, réguliers, durables.Sur le terrain, chacun sait que les communes rurales restent souvent seules face à des charges financières colossales, parfois écrasantes. L’État intervient lorsque des projets emblématiques ou lorsqu’une situation d’urgence ne peut plus être ignorée, mais l’entretien quotidien des églises, chapelles et presbytères beaucoup plus modestes continue de reposer sur des budgets municipaux trop souvent insuffisants. On espère donc que ce soutien annoncé en faveur du patrimoine religieux de la France ne se limite plus aux grands édifices , mais qu’il donne naissance à un véritable dispositif national stable, structuré, capable de soulager les maires qui ne devraient plus être les seuls à porter la préservation des églises de France.
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Rachida Dati s’est ensuite rendue à la Maison-Dieu de Montmorillon, bâtiment du XIᵉ siècle engagé dans un nouveau projet porté par Régis Marcon, chef triplement étoilé où la ministre a confirmé que « les travaux de restauration des parties classées de la Maison-Dieu vont bénéficier d’un financement de la part de l’État à hauteur de 40 % ».Le déplacement s’est poursuivi à l’abbaye de Saint-Savin, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le site, connu pour ses fresques, mène une programmation culturelle diversifiée et souhaite obtenir la labellisation « centre culturel de rencontre ». Selon les données communiquées par le ministère de la Culture, 39 pour cent des sites patrimoniaux de la Vienne sont classés en mauvais état ou en péril. Dans les Deux-Sèvres, la part atteint 47 pour cent. Ces chiffres, supérieurs à la moyenne nationale, montrent la difficulté des communes rurales à entretenir un patrimoine abondant avec des moyens limités. De son coté , Rachida Dati a rappelé que le plan « culture et ruralité », lancé en 2024, prévoit 100 millions d’euros sur trois ans, auxquels s’ajoutent 20 millions supplémentaires dédiés aux monuments ruraux en 2025. Le ministère indique également que le budget national consacré au patrimoine a augmenté de 40% depuis 2017.
Ce déplacement dans la Vienne rappelle donc que le patrimoine religieux français demeure l’un des grands témoins de l’histoire nationale et que l’identité culturelle du pays trouve une part essentielle de ses racines dans le christianisme. Beaucoup d’élus locaux souhaiteraient toutefois que l’État intervienne plus régulièrement, non seulement pour les cathédrales et les sites emblématiques, mais aussi en mettant en place un dispositif qui ne laisse pas aux seuls maires la responsabilité d’entretenir ou non les églises de leurs villages.


