En 1925, à l’occasion du Jubilé, le pape Pie XI voulut que les pèlerins découvrent la dimension universelle de l’Église. Dans les jardins du Vatican, il fit installer vingt-six pavillons retraçant la présence missionnaire catholique sur tous les continents. On y trouvait des objets venus d’Afrique, d’Asie, d’Amérique et d’Océanie, des lettres de missionnaires, des cartes géographiques inédites, des spécimens naturels, et même des collections entières de revues missionnaires comme Les Missions Catholiques. L’exposition attira plus d’un million de visiteurs et marqua durablement la conscience missionnaire du XXᵉ siècle.
Devant ce succès, Pie XI fonda en 1926 le musée ethnologique missionnaire confié au père Wilhelm Schmidt, missionnaire du Verbe Divin. Ce musée deviendra plus tard l’Anima Mundi, intégré aux Musées du Vatican, où l’on peut encore admirer une partie des collections rassemblées il y a cent ans. L’Exposition de 1925 inspira aussi plusieurs institutions durables, comme la Journée mondiale des missions, l’Union Pontificale Missionnaire, la relance de l’Université Pontificale Urbanienne et la création de l’Agence Fides en 1927, première agence missionnaire de l’Église.
Pour célébrer cet héritage, le colloque « Un siècle après l’Exposition missionnaire du Vatican, héritage et vision globale de la mission (1925-2025) » réunit à Rome et au Vatican des historiens, théologiens et responsables ecclésiastiques. Les travaux s’ouvrent le 5 novembre à l’Université IULM de Rome, au Palazzo Cipolla, par une conférence de la professeure Raffaella Perin (Université Catholique du Sacré-Cœur) sur le renouveau de l’action missionnaire dans les années 1920 et le rôle de la Compagnie de Jésus.
Le lendemain, à l’Université Pontificale Urbanienne, la séance d’ouverture rassemble plusieurs figures majeures du monde académique et ecclésial : le recteur Vincenzo Buonomo, la directrice des Musées du Vatican Barbara Jatta, la rectrice de l’Université IULM Valentina Garavaglia et le père Marek Inglot SJ, président du Comité pontifical des sciences historiques. La prolusion est confiée à Mgr Fortunatus Nwachukwu, secrétaire du Dicastère pour l’Évangélisation, qui évoque la mission dans le contexte des nouvelles Églises particulières.La première session aborde le contexte historique du pontificat de Pie XI et les grands axes missionnaires du XXᵉ siècle, avec les interventions de Gianpaolo Romanato (Université de Padoue), Claude Prudhomme (Université Lyon 2) et Antoine De Padou Pooda (Université Urbanienne). La deuxième session explore le rapport entre foi, culture et progrès scientifique, avec Micol Forti (Musées du Vatican) sur la participation du Saint-Siège aux Expositions universelles, Diego Pinna (Université Grégorienne) sur la genèse de l’Exposition missionnaire, et Giovanni Rizzi sur les archives littéraires de 1925.L’après-midi se déroule aux Musées du Vatican. José Luis Alonso Ponga (Université de Valladolid) présente l’Exposition missionnaire comme un modèle d’anthropologie appliquée, tandis qu’Alison Kahn (Université de Loughborough et Stanford Overseas, Oxford) analyse le tournant scientifique de la muséologie vaticane. Le père Andrzej Miotk SVD évoque le rôle décisif du père Wilhelm Schmidt dans la conception du musée ethnologique.
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Les dernières interventions mettent en lumière la continuité historique de l’œuvre missionnaire : le père Blas Sierra de la Calle OSA (Musée Oriental de Valladolid) évoque la participation des Augustins à l’exposition, et Nadia Fiussello (Musées du Vatican) retrace l’évolution de la collection ethnologique jusqu’à nos jours. La conclusion académique est confiée à Massimo De Giuseppe (Université IULM), sur le thème des missions dans un monde « glocal » au crépuscule de l’impérialisme européen.
Le colloque se clôt par l’intervention du cardinal Luis Antonio Gokim Tagle, pro-préfet du Dicastère pour l’Évangélisation et grand chancelier de l’Université Pontificale Urbanienne, suivie d’une visite du musée Anima Mundi.
Un siècle plus tard, la même conviction habite l’Église : la mission n’est pas une conquête mais une offrande, une fidélité à la vérité du Christ confiée à son Église. Face aux tentations du relativisme et de l’indifférence, le souvenir de l’Exposition missionnaire de 1925 rappelle que la foi n’est pas destinée à rester enfermée dans le silence des consciences, mais qu’elle est appelée à rayonner dans toutes les cultures comme une lumière qui éclaire sans détruire. Il peut y avoir plusieurs types de rencontre, certaines d’ordre culturel ou scientifique, d’autres profondément spirituelles, mais toutes ont pour horizon la découverte de la dignité humaine et l’appel à la vérité. Dans un monde où la sécularisation fragilise le sens du sacré, l’élan missionnaire demeure le signe d’une Église sûre de son identité, enracinée dans la tradition apostolique et tournée vers l’avenir avec confiance.


