Un petit séisme a éclaté dans la Ville éternelle. La cause ? La Cour des comptes française aurait affirmé que l’église de la Trinité-des-Monts et son célèbre escalier de 135 marches appartenaient à la France.
Cette assertion n’a pas manqué de déclencher l’ire des Italiens, qui rejettent catégoriquement l’idée que le site emblématique situé Place d’Espagne puisse être revendiqué par un État étranger. Vendredi dernier, le quotidien romain Il Messaggero en a fait sa première page avec ce titre alarmant : “Paris revendique la Trinité-des-Monts : pour la Cour des comptes française, elle a été ‘construite avec [leur] argent’”.
« Les Français ? Qu’ils se contentent de Paris et nous laissent tranquille avec la Trinité-des-Monts », a asséné la coordinatrice de l’association des habitants du centre historique de Rome, Viviana Piccirilli di Capua. L’homme politique italien Vittorio Sgarbi a quant à lui déclaré : « Que les Français nous rendent tous les tableaux du Louvre que Napoléon a dérobés en Italie s’ils veulent les marches de la-Trinité-des-Monts ».
5 églises françaises dans le centre de Rome
La discorde fait suite à un jugement de la Cour des comptes française, qui a mené une enquête sur les Pieux établissements de la France à Rome. Cette institution gère un ensemble de propriétés en lien avec la France, dont certaines remontent au XVIIe siècle. Au total, la France administre 13 propriétés dans le centre de Rome, dont cinq églises notables : la Trinità dei Monti, San Francesco a Ripa, Santa Maria dell’Anima, San Claudio dei Francesci et l’Église de San Luigi dei Francesi.
L’escalier monumental, construit entre 1723 et 1725 avec les fonds légués par le diplomate français Etienne Gueffier, est considéré comme faisant partie des terrains de l’église de la Trinité-des-Monts. Cependant, le rapport de la Cour a mis en lumière des problèmes d’administration financière au sein des Pieux établissements, évoquant une prise de décision « opaque » et des « carences » en matière d’entretien. La cour a également signalé des cas de détournement de fonds et émis des préoccupations concernant la sécurité des propriétés.
Pas de propriété française
Un point de discorde a été soulevé concernant une structure liée à la Trinité-des-Monts, qui était initialement gérée par des religieuses françaises pour une école pour filles, mais qui est maintenant occupée par une école privée italienne où seulement 3 % des élèves sont étrangers. En réponse, les Pieux établissements ont déclaré que les problèmes soulevés dans le rapport étaient en grande partie résolus et que les pratiques actuelles respectaient les règles en vigueur.
Des experts juridiques ont précisé que les églises françaises à Rome ne bénéficient pas d’un statut extraterritorial en droit international, ce qui signifie qu’elles restent la propriété du Vatican ou de l’État italien. Ainsi, bien que la cour française puisse ordonner des réformes au sein de la fondation qui gère ces propriétés, elle ne peut pas revendiquer la propriété française sur celles-ci, même si la France a contribué à leur entretien.
Simple clarification
De son coté, le président de la Cour des comptes française, Pierre Moscovici, a tenu à rassurer l’Italie : « Il n’y a pas et il ne peut pas y avoir dans un rapport de la Cour des comptes une quelconque intention de privatiser ces biens ou de les vider de leur signification. Les juges demandent seulement que d’anciens accords entre la France et le Saint-Siège soient clarifiés aujourd’hui. Il s’agit d’accords datant de plusieurs siècles, qui doivent être adaptés au temps présent. ».
Actuellement, l’église de la Trinité-des-Monts est administrée par des membres de la Communauté de l’Emmanuel, groupe catholique fondé en France en 1972, issu du mouvement charismatique.