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Saint Thomas More : le rire du sage, la fidélité du martyr

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Chancelier d’Angleterre, humaniste brillant, père de famille joyeux, mais surtout serviteur intrépide de l’Église : saint Thomas More incarne l’idéal du laïc catholique, capable d’allier intelligence, droiture et humour jusqu’au martyr

Martyr (+ 1535)

Il portait la robe du juriste, non la bure du moine, et pourtant sa sainteté ne le cédait en rien à celle des cloîtres. Thomas More, exécuté le 6 juillet 1535 sur ordre du roi Henri VIII, est l’un des plus lumineux témoins de la fidélité catholique dans les heures sombres de la réforme anglaise. Canonisé en 1935, proclamé patron des responsables politiques par saint Jean-Paul II en 2000, il demeure une figure prophétique pour notre temps, où conscience et pouvoir entrent trop souvent en collision.

Fils d’un magistrat londonien, Thomas grandit dans la foi et les lettres. Jeune homme, il fréquente les chartreux, mais comprend que sa vocation est ailleurs : non dans la solitude du cloître, mais dans les combats du siècle. Brillant avocat, esprit affûté, il s’impose très tôt comme un humaniste d’envergure européenne. Son amitié avec Érasme et la publication de L’Utopie en 1516 — traité à la fois satirique et profond sur la meilleure forme de gouvernement — le placent au cœur de la Renaissance chrétienne.Mais la légèreté de son style n’enlève rien à la gravité de son engagement. Cet homme de joie, père d’une famille nombreuse, enracinée dans la prière et la gaieté, devient Lord Chancelier du Royaume, bras droit d’Henri VIII. Et c’est là que son chemin de croix commence. Quand le roi exige de rompre avec Rome pour légitimer son remariage, Thomas More refuse. Il abandonne son poste, mais pas sa conscience. Ni les menaces, ni l’isolement, ni les flatteries ne le feront fléchir : « Je suis le bon serviteur du roi, mais d’abord de Dieu », dira-t-il à la veille de sa mort.

Son humour, célèbre jusque dans les couloirs de la Tour de Londres, ne fut jamais une esquive, mais un éclat de vérité : « On me reproche de mêler boutades, facéties et joyeux propos aux sujets les plus graves. Avec Horace, j’estime qu’on peut dire la vérité en riant », écrivait-il. Il mourra avec cette liberté intacte, uni dans le martyre à saint Jean Fisher, évêque de Rochester, lui aussi décapité pour son attachement indéfectible au pape et à l’unité de l’Église.

Thomas More nous laisse l’image rare d’un saint pleinement engagé dans la cité, joyeux, cultivé, exigeant, politique au sens noble du terme. Sa vie rappelle que le laïc chrétien peut — et doit — chercher la sainteté au cœur du monde, sans sacrifier ni la foi, ni la raison, ni l’humour.

« Bienheureux les persécutés pour la justice, car le Royaume des Cieux est à eux » (Mt 5, 10). En Thomas More, cette béatitude s’est incarnée jusqu’au dernier sourire.

Avec nominis

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